no time to die - sanya

La nuit tombe sur les bas-fonds d’Exeter, alors qu’il s’aventure vers l’ancienne prison. Combat ordinaire qui s'achève en crépuscule, le sang qui vient maculer le ciel avant de rendre les armes. Joute perdue d’avance, la lumière termine toujours vaincue. Les mains dans les poches, il se fond dans le simulacre d’obscurité. Silhouette déglinguée dont l’ombre prend les devants contre le sol. Le manque cisaille ses veines, plante des aiguilles en travers de ses nerfs à vif. La came qu’il essaie de moins toucher depuis quelques jours, se défaire des addictions qui lui grignotent la carne. Ses tripes se tordent d’anticipation, sa gorge se noue alors qu’il déambule sur le bitume. Il se sait loin d’être le bienvenu, mais ce n’est pas ce qui l’arrête. Il faut dire que le flic ne lui a pas donné d’autre option. Tu coopères ou on te fout derrière les barreaux. Il n’a pas laissé son père endosser le meurtre sanglant de Yelena pour croupir en taule à ses côtés. Pas à son premier coup d’essai, le cafard n’en est de toute manière plus à une trahison près. A protesté surtout pour la forme, conscient d’être piégé comme un rat. A peine une once de culpabilité pour lui érafler les côtes. Juste la trouille que le stratagème se retourne contre lui.

Pas très convaincu d’être vraiment utile au plan, chair à canon qu’on sacrifie en première ligne. Aimant à emmerdes, il respire le danger, semble rechercher son parfum. Victime volontaire, plus qu’il n’est réellement fautif. C’est sans doute pire. Et la situation ne manque pas de dégénérer quand il s’approche d’un des dealers, réclame sa dose en chien galeux qui se respecte. Sauf que le gang lui a trop fait crédit. Le mépris qui se crache, la suspicion qui s’installe. Pas lui qui les a dénoncés la dernière fois, mais faut croire que son récent statut de taupe est déjà inscrit au milieu de sa figure. Le ton monte, les insultes fusent. Le sale type l’empoigne par le col de son t-shirt, le soulève légèrement du sol. Vient titiller sa jugulaire du froid de sa lame, à en faire perler des gouttes de sang sous son menton. Abime et égratigne l'opale dans le but de le faire céder. Menace qui l’incite davantage à serrer les dents qu’à se répandre en aveux compromettants. Il se contente de nier avec aplomb, s'efforce de ne pas se démonter. Le malfrat semble prêt à lui concéder le bénéfice du doute, commence légèrement à desserrer son emprise, quand Kirsten se rue sur eux comme un boulet de canon. Attirée par les éclats de voix, elle pointe son arme de service sur le scélérat, sans l’effrayer le moins du monde.

La détonation lui vrille les tympans, fait chuter le genou bousillé à terre. Les billes sombres s’écarquillent autant d’horreur que de stupeur, il ne réalise qu’à retardement ce qui vient de se produire. Bruit sourd qui sème la panique dans la foule de drogués, ça se rue dans les brancards pour fuir ou s’avancer. La policière profite de la confusion pour le tirer vivement vers elle. Pas le temps de réfléchir, il se laisse docilement emmener, ne reprend son souffle que dans le semblant d’abri qu’elle leur a trouvé. « - Putain mais t’es folle ou quoi ?! T’as jamais été en mission de ta vie, ils vous apprennent pas le terrain avant de vous lâcher dans la nature ? Tu viens de nous griller d’une pierre deux coups, félicitations hein. » Qu’il aboie, effaré par son intrusion désastreuse. Son arrêt de mort qu’elle vient probablement de signer.  « - Je gérais parfaitement la situation, t’avais pas besoin d’intervenir. » Furieux contre elle, malgré son intention évidente et louable de le protéger.