dirty little secret (soledad)

T'es pas le genre à côtoyer des putes, à payer pour coucher. T'en as pas forcément besoin, mais t'as rien contre ces femmes et ces hommes non plus. Ils font bien ce qu'ils veulent de leur corps, tu te fiches de leur sort. C'est indigne de vendre son corps à des personnes qui payent, mais par contre c'est digne de sucer son patron pour avoir une promotion ? L'hypocrisie, ça t'agace. Non, t'es pas le genre à chercher quelqu'un que tu peux payer, en général. Aujourd'hui, t'as décidé de tenter le coup. Parce que t'as faim, très faim et que t'as deux façons de te nourrir. Faire du mal, ce que t'adores, ou te faire adorer. Tu veux essayer cette méthode et ça sera plus simple dans une maison close plutôt que d'avoir à jouer avec quelqu'un. C'est sans doute de la curiosité qui te pousse à vouloir découvrir ce qui se cache derrière ces portes fermées aussi. Le savoir, c'est le pouvoir, alors tu préfères tenter des choses et voir ce que ça donne. Ainsi, tu t'es rendu au firmament comme on l'appelle, cet endroit où les hommes et les femmes vont avec honte. Ridicule. Toi, tu t'en fiches, tu marches jusqu'aux portes d'entrée et tu fais face à quelqu'un qui t’accueille, un garde du corps sûrement, faut bien protéger ces pauvres pantins sexuels. Le fric, tu l'as emprunté à Trish, sans lui dire à quoi ça te servirait bien sûr. La connaissant, elle n'aurait sûrement pas accepté de te filer des billets pour te payer une pute. Mais vu que t'as l'argent, tu rentres facilement et tu pénètres dans un monde que tu découvres. Un monde de luxure, un monde qui sent l'alcool, la transpiration et les phéromones. Un monde où le désir et le sexe règnent en maître. Il doit sans doute y avoir des chambres, mais déjà dans la salle principal, tu peux voir ces gens par deux ou plus en train de rire, de s'embrasser, de se tripoter sans gêne. L'alcool est sans doute là pour désinhiber. Tu ne peux pas dire que ça ne te fait rien, mais c'est loin d'être le nirvana. Une fille s'approche de toi, tu l'observes un instant avant de secouer la tête. Non, tu préférerais un mec. Les femmes sont trop douées pour simuler, un mec aura plus de mal à te mentir. Il sera plus facile de te faire adorer. Tu t'approches d'un gros porc qui tripote un plus jeune et attrape la main de la victime pour l'entraîner contre toi, plantant tes yeux dans les siens. Un simple regard et tu te nourris un peu, ton charme fait visiblement effet.

Tu vas pour l'embrasser, un sourire amusé sur les lèvres, mais alors que tu te penches un peu plus vers lui, ton regard qui balaie la salle tombe sur une silhouette que tu reconnaîtrais entre milles. Tout s'arrête pour toi et tu relâches le gars que tu tiens, le repoussant un peu violemment. « Dégage. » Le ton est froid, tout comme ton regard qui ne la quitte pas des yeux. Heureusement pour elle, elle ne se trouve pas avec un client, sinon tu l'aurais définitivement grillée. Non, elle est habillée bien qu'un peu sexy et seule, ça laisse le doute sur la situation. T'as les poings serrés, le regard sombre, il suffirait d'une étincelle pour faire exploser cet endroit. A voir si Soledad serait cette étincelle ou non. Tu t'avances vers elle, ne la quittant pas des yeux et une fois à sa porte, tu l'attrapes en posant tes mains sur ses épaules, ton regard ancré dans le sien. « Que tu sois une pute ou une cliente, je n'aurais jamais dû te voir ici. » Autrement dit, mieux vaut pour elle qu'elle ait une bonne explication à donner avant que tu n'exploses de rage. Torturer un mec parce qu'il la draguait c'était pas grand chose, mettre le feu à une maison close ça ferait sans doute plus de bruit. Mais il y a une explication, il y a forcément une explication. Soledad n'est pas comme ça, elle ne coucherait pas pour de l'argent, elle ne paierait pas pour coucher. T'es pas si con, tu sais qu'à son âge elle a peut-être perdu sa virginité, mais tu refuses de la voir souillée. Non, il y a une explication, quelque chose de logique, quelque chose qui explique sa présence ici. La tienne importe peu, toi tu n'es plus à ça prêt. Tu finis par lâcher ses épaules, mais pas ses yeux. Plus rien ne compte à part elle, rien ne compte tant que tu ne sauras pas. « Je te laisse dix secondes pour m'expliquer ce que tu fais ici. Si je ne suis pas convaincu... » Tu ne peux pas dire ce qu'il se passera, tu ne peux pas lui dire le genre de monstruosité dont t'es capable, tu préfères laisser planer le doute. En attendant, tu ne la lâches pas, à l'écoute. Elle a intérêt à te convaincre.

Depuis qu'elle avait connu le Firmament par Shirley, les soirées de Soledad ne ressemblaient pas du tout à l'ancien temps. Fini les pyjama party, elle avait plutôt la tendance maintenant à retirer ses vêtements vers des clients aussi pressés de la chevaucher comme on ouvre une bouteille de Champomy lors des anniversaires de gamins. Elle avait trouvé son compte, la latina. Répondant à ce surnom pour créer son réseau de clients habitués, elle rivalisait de tenues les plus extravagantes et dessous quelque peu affriolants pour ameuter le quartier. Il fallait souvent mettre une veste par dessus pour éviter de se faire repérer par les plus gros pervers (qui pouvaient être dangereux) ou provoquer les flics. Autant dire qu'elle était sur ses gardes, Soledad. Persuadée qu'elle trouverait bien un jour une solution pour s'en sortir, elle était pour le moment assez satisfaite d'y être. Ce n'était pas un dur labeur, il fallait seulement s'allonger et répondre aux désirs des uns et des autres. Là aussi il y avait une variété qu'elle n'aurait jamais soupçonné auparavant mais qui était bien réelle. C'était l'occasion de ne jamais vivre une soirée semblable. Pas de chance, ce soir elle allait être de corvée pour attirer les clients de dehors. Pas de priorité sur le planning, elle n'allait pas baiser de suite. Elle soupira. Elle qui mourrait déjà de faim de ne pas pouvoir profiter du corps de son frère, voilà qu'elle devait faire la promotion du Firmament. La supérieure restait intraitable, il fallait mettre une tenue un peu plus décente et remonter la rue pour voir de potentiels clients... Ou persuader un peu plus les frileux de l'entrée.

Elle s'exécuta, non sans ronchonner un peu. Point commun avec son frère Dante. Quand elle n'aimait pas faire quelque chose, elle le faisait vraiment en traînant les pieds, ponctuant des murmures d'agacement et des yeux qui sortent des orbites. Elle souffla un bon coup pour éliminer cette contrariété et paraître la plus à même à recevoir les clients. Elle s'avance vers l'entrée... Il y a déjà du monde. Elle regarde de part et d'autre les petits groupes, tout le monde a l'air d'y trouver son compte. Elle les balaya d'un seul regard, il ne fallait pas qu'elle perde de temps. Elle avança jusqu'à l'entrée. Un teen/daddy se profilait gentiment dans un coin avant qu'un mec ne mette le nez là dedans. Elle émit un petit rire dans sa barbe, imaginant la réaction du gros plein de soupe qui se faisait berner la place sans respect. Elle passe la porte d'une des chambres et soudain, elle se fait agripper par les épaules. Elle compte répliquer, répondre comme à n'importe quel client mais elle le voit. Dante. Un rapide coup d'oeil au fameux duo de mecs de tout à l'heure, elle se dit que c'était sûrement lui. Bordel, elle était dans un sacré merdier maintenant. Elle aurait préféré un client insistant. Voilà qu'il a son regard concentré, celui qui lui fait peur. Parce qu'elle sait qu'elle est en faute, elle sait qu'elle fait une connerie. C'est juste plus fort qu'elle, elle ne sait même pas comment justifier qu'elle vend son boule en tarif normal ou réduit.


Ca cogite à vitesse 1000 dans sa tête. Si il était là, c'était pour sauter quelqu'un lui aussi... Quelle idée de venir ici alors qu'il avait un charme de dingue et qu'il pouvait faire tomber n'importe quel mec dans un bar... Un bar! Voilà qu'il lui donnait une idée. Si... si elle utilisait un autre mensonge ? Entre tous ceux qu'elle sort en ce moment, un de plus ne changerait pas vraiment la donne. Elle devait trouver un moyen d'expliquer sa venue ici. Et dire qu'elle accompagnait un mec ou une meuf n'était pas vraiment une bonne idée. Dire qu'elle venait essayer pour son plaisir personnel non plus. Ses collègues la regarderaient bizarrement et en plus, Dante en serait offusqué. Elle soutint son regard non sans avoir intérieurement les chocottes. Elle sait ce que Dante est prêt à faire pour la protéger, il sait comme il peut être incontrôlable une fois énervé. Il lui donne le timing de la muerte, le même que dans celui de Fort Boyard. Et Soledad, elle n'a plus le choix. Tremblante dans ses jambes mais pas dans sa voix elle lui répond d'une traite. _ Je viens faire de la pub pour le bar! Des fois des mecs viennent boire un coup... après avoir tiré leurs coups! C'est tout bénéf non? . Carte de l'humour pour ne pas se faire griller comme une merguez sur un barbecue d'un grand week end de l'Ascension. Elle tourne la tête un instant , réfléchissant à comment expliquer qu'elle n'a pas de tracts à la main. Elle montre son portable qu'elle a heureusement dans sa main droite. _ Je leur envoie le QR Code avec une super promo!. Elle le lui brandit avec un sourire maxwhite. Libre à lui de la croire ou non, franchement elle donne le tout pour le tout pour avoir l'Oscar. Et, alors qu'elle se rend compte de cette nouvelle supercherie et des idées qui viennent la sauver, elle en profite pour lui demander. _ Et toi, tu viens consommer ? J'pensais pas que les maisons closes étaient ton kiff.... Détourner la conversation pour éviter les soupçons. Pas sûr que cela marche, notamment dans Columbo. Mais bon, tout était bon à prendre pour gagner du temps, pour sortir de ce pétrin... Et pour rester la cadette parfaite Blackwell.