situation 9 - i've got a dream

“La mort fut le premier mystère ; elle mit l'homme sur la voie des autres mystères. Elle éleva sa pensée du visible à l'invisible, du passager à l'éternel, de l'humain au divin.”

Sensation dévorante.
Son âme contemple et dévore.
Dans la splendide paix du silence divin;
Sans regret ni désirs, sachant que tout est vain.
L'irrésistible nuit dévorait sa peau comme un étau tangible qui se referme lascivement contre sa peau. Lacérant son être tout entier comme pour lui signifier un manque qui devait mortellement combler. Ce manque qu'il ne pouvait ignorer, ce manque monstrueux qui palpitait en son propre sein. Ses affres sont comme un châtiment dévore sa poitrine. Encore. Encore que cela en devient douloureux de ne pas y répondre pourtant passa outre à cette sensation pour penser à d'autres choses. Il n'avait guère envie de rien. Cigarette aux lèvres, engouffrant la mort à travers sa poitrine et expulsant la fumée si lentement qu'elle se mélangeait avec l'air du soir. Le mégot finissait par se consumer lentement, tandis qu'à chaque inspiration une triste lueur éclairait son faciès. Décidément, il semblait étrangement soucieux et indécis. Son téléphone sonna, affichant sur l'écran un message qui mua son visage dans un fascié méconnaissable. Un instant figé. Cet instant qui resta figé dans le temps, pour venir disparaître comme un fantôme. Il scruta l'écran indécis, relisant encore et encore le message qui était apparu. Il se décida. Il finit par répondre à son interlocuteur en tapotant rapidement sa réponse.

« Retrouve-moi au Cave dans 2 heures, ne sois pas en retard. »
Message envoyé.

Il glissa son téléphone dans sa poche, jetant sur le sol mégot, tout en l'écrasant du bout du pied. À cet instant, cette nuit, n'était qu'un triste amas de solitude qui s'écrasait contre l'aurore. Il s'extasiait immobile, imperturbable de tout bruit venant se propager autour de son ombre. Une nuit, dénuée de paix. Une nuit, dénuée de sang, une nuit où il semblait avoir lâché totalement prise. Pourtant, ce simple message l'agaçait. Et contrariaient ses plans pour la soirée. Mais il avait envie de s'accorder un instant, abandonné tout désir, toute contrariété, abandonnée toute envie. Juste un instant. Il ne cherche même pas à s'imprégner du voile de l'au-delà. Laissant pénétrer cette envie de liberté morne qu'il s'autorisait fallacieusement. Perturbé. Cette irrésistible nuit, noire, humide, funeste et pleine de frissons. Il semblait s'en foutre comme s'en délecter. Mais il avait de surcroît besoin de satisfaire son envie de s'égarer quelques instants en se délectant des voluptueux parfums des arômes d'alcool, qui allait imbiber ses lèvres d'un plaisir dangereux. Plaisir qu'il allait apprécier seul, pendant ce long moment ou allait pouvoir s'octroyer un moment de calme, bien loin de l'agitation mortuaire le temps que son rendez-vous ne s'empresse pas de le rejoindre. Rendez-vous qui semblait tout à fait l'irriter au plus haut point, mais qui devait se faire quoi qu'il arrive, d'une certaine manière, c'était inévitable. Cette simple pensée, son visage restait de marbre, mais son sang bouillonnait tel un feu dévorant, qu'en témoignait l'irritation de sa peau et le sourire mortel qui tapissait ses lèvres ne faisaient que s'étirer davantage se murant dans un sourire de diable. Quoi de plus intrigant.

Ce soir, il n'y avait pas de règle, il s'en foutait, il n'était pas non plus le maître du jeu. Masque mortuaire qu'il aimait arborer le temps de ses jeux morbides. Et cela le rendait intensément dangereux. Cette chose qui aurait dû lui provoquer une réelle aversion, mais qu'au final le soulageait. Il semblait comme un enfant soulageant ses caprices d'un soir s'installant contre le bar au milieu des autres clients qui s'extasiaient de leurs déboires de la journée. Le patron, un homme de grandes carrures avec qui, il lançait souvent des discussions peu communes. Est-ce qu'il l'appréciait. Il ne saurait pas le dire. Il n'avait réellement aucune empathie pour personne. Bien que le patron s'occupât d'un groupe bruyant en l'apercevant, il se rapprocha en sa direction déposante un verre vide sans aucune liqueur dans son ventre, le jonchant d'un regard sarcastique.

« Cela fait bien des lustres que tu n'étais pas venue. »
« Le travail accapare toutes mes nuits, plus que mes hobbies. »
« Tu veux mon avis . »
« Les avis, c'est comme les trous du cul, tout le monde en a un, mais je t'en prie, éclaire-moi. »
« Tu devrais prendre des vacances. »
« Des vacances ? Tu me vois allonger dans un chant rempli de coccinelle où aller cueillir des artichauts. J'ai une tête prendre des vacances.»
« Toujours aussi coincé. Tu es amusant mec. Je te sers quoi l'ami. »
« Quelque chose de fort, mais de raffiner, je ne bois pas n'importe quelle merde. Tu devrais t'en souvenir. »
« Toujours aussi agréable de te servir dans mon bar. »
« Toujours un plaisir de venir boire ton venin »

Mots artificieux entourés d'un voile de faux-semblant jusqu'à ce qu'il se décide à lui servir un verre. Ses phalanges se fermèrent sur le verre portant à l'embouchure de ses lèvres le breuvage qui s'écoulait comme du miel salvateur, mais tout semblait être perturbé subitement par des vociférations qui s'échappaient d'un groupe qui emplissait soudainement le bar d'un bruit désagréable. Des mots qui s'élevaient subitement déchaînant rapidement le groupe pour venir se répercuter sur chaque individu présent dans la pièce. Une bagarre semblait prendre de l'ampleur. L'écho de leur voix acariâtre restait palpable et tous semblaient s'étendre au travers du Bar venant ainsi gâcher son moment détente.