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Dans les méandres du temps — Sa longue veste noire recouvrait sa silhouette svelte, presque famélique sous l’ombre des réverbères, certains fatigués au point de clignoter par intermittence. Dans sa main nue trônait sa fidèle serviette, contenant moult papiers et documents d’une importance capitale. Le croissant lunaire accroché à la myriade d’étoiles dans le ciel noir de suie éclairait son chemin, pavé de béton crasse. Seuls ses pas esseulés résonnaient dans la rue déserte. C’est vrai qu’il se faisait tard. Il ne devrait pas traîner dehors à une heure pareille, alors que les bonnes gens se rassemblaient autour de la table pour passer un bon moment, loin de l’agitation diurne et des tracas quotidiens. Lui aussi devrait rentrer chez lui, dans le risible appartement qu’il appelait maison depuis qu’il ne logeait plus à l’enseigne des Blackwell. Mais il ne le pouvait pas, pas vraiment. Malgré l’heure avancée, il ne pouvait décemment pas aller se reposer avant d’avoir rayé de sa to do’s list toutes les tâches qu’il s’était fixées ce matin même. Il était un homme très occupé, oui, mais heureux de l’être. Garder son cerveau en état d’ébullition du matin au soir, voilà la meilleure solution qu’il avait trouvée pour contrer le désespoir qui menaçait de lui éclater au visage à la moindre incartade. Le désespoir. Celui d’avoir failli à l’unique personne ayant été là pour lui presque toute sa vie durant. Celui de tourner en rond comme un animal en cage dans la poursuite de l’artisan de son malheur. Cet ange à la peau et au cœur de pierre, dissimulé dans les coulisses de la tragédie fomentée de ses propres mains. Mais à défaut de le rendre à la justice dans un avenir proche, peut-être Nero pouvait-il s’immiscer dans un chapitre étranger et en châtier les malfrats? Peut-être pourrait-il ainsi cesser de ressasser à toute heure du jour et de la nuit des remembrances que d’aucuns avaient déjà oubliées.
Voilà pourquoi il se sentait reconnaissant de l’affaire dont il s’occupait ces temps-ci. Une affaire des plus sordides, vraiment. Des gamins pris en otage pendant des années par un sombre illuminé qui s’était mis en tête de se servir de gamins aux talents uniques comme de véritables rats de laboratoire, avec les rouages d’un trafic humain pour couronner le tout. Une fois la tête pensante de l’organisation capturée, la justice s’était mise en branle comme de coutume, c’est-à-dire avec paresse. Après des mois et des mois d’attente, pendant lesquels les journalistes s’en étaient donné à cœur joie pour martyriser les pauvres enfants de questions pointues et indiscrètes, la date du procès apparaissait enfin à l’horizon. Il importait donc de se préparer en conséquence, et cela commençait naturellement par de longues discussions avec les jeunes victimes, qui devraient témoigner publiquement de leurs tourments aux mains de leur ravisseur. En tant que leur avocat, Nero se devait de tisser un lien de confiance avec eux, au-delà du cadre de ses obligations professionnelles. Pour avoir élevé les quatre rejetons Blackwell, il savait mieux que quiconque que les enfants, par nature, pouvaient se montrer insupportables et capricieux avec vous s’ils ne vous appréciaient pas de prime abord. Cela, couplé à la très possible instabilité psychologique de ses jeunes clients, risquait de compromettre l’issue du procès. Il avait donc l’intention d’apprendre à les connaître, exactement comme il l’avait fait autrefois pour Jill, Asta, Dante et Soledad Blackwell.
Il se faisait tard, mais il avait encore le temps de rendre visite au jeune Andrea Moore. Avant de quitter son bureau tout à l’heure, Nero avait passé un coup de fil au couple Moore, qui lui avait confirmé que l’adolescent serait bien à la maison ce soir. C’était à leur adresse qu’il se rendait maintenant, tandis que la brise hivernale soufflait sur les pavés et que les chaumières s’éclairaient une à une, au fur et à mesure qu’avançait la soirée. Il poussa un soupir en apercevant enfin le numéro de porte qu’il cherchait, au détour d’une rue. Il espérait que la rencontre se passerait bien. Il s’était déjà trouvé en présence du jeune Andrea précédemment, mais ils n’avaient échangé que des banalités sur l’affaire qui les liait. Cette fois, il faudrait essayer de briser la carapace de l’adolescent. « Rien de moins, » marmonna Nero dans sa barbe, après avoir frappé à la porte. La porte s’ouvrit sur une femme dans la fleur de l’âge, qui l’invita à prendre place dans le salon pendant qu’elle allait chercher son fils, occupé à faire ses devoirs dans sa chambre. Une tâche si banale, après l’enfer que le pauvre gosse avait vécu ces dernières années. Nero enfonça sa vieille carcasse dans le canapé, sa serviette posée sur ses genoux.
L’instant plus tard apparaissait dans l’embrasure du salon un jeune gringalet, l’œil méfiant et la lippe boudeuse. À la demande de Nero, la femme le laissa discuter seul à seul avec Andrea. Le silence régnait à présent dans la pièce sobrement décorée. « Bonsoir Andrea. Je m’appelle Nero de Funès, mais appelle-moi simplement Nero, sinon je vais prendre un coup de vieux, » plaisanta-t-il. Il retrouva toutefois son professionnalisme en un rien de temps : « Je suis navré de te déranger à cette heure plutôt tardive, mais je me suis dit qu’il était plus que temps que je me présente à toi, comme je suis celui qui défendra tes intérêts pendant le procès. Honnêtement, j'ai bon espoir que celui qu’on désigne par le sobriquet de l’Alpha se retrouve derrière les barreaux jusqu’à la fin de ses jours, mais pour cela, j’ai besoin de ta coopération comme de celle de tes camarades. » Il jugea inutile d’angoisser davantage l’adolescent en lui rappelant que le procès approchait à grands pas. Il tenta un sourire avenant pour le mettre en confiance, puis désigna d’un geste de la main le fauteuil en face de lui, comme si la maison lui appartenait et qu’Andrea était son invité. « Mais je t’en prie, assieds-toi. Nous serons beaucoup plus à l’aise pour discuter. » Pendant qu’il parlait, il ne quittait pas le gamin du regard. Il ressentait malgré lui le désir viscéral de le protéger, lui et les autres, de tous les Alphas de ce monde.



Dernière édition par Nero de Funès le Mar 5 Jan - 23:08, édité 2 fois
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" bright lights, big city "

Andrea, s'il te plait, tu peux venir ? Monsieur De Funès arrive. Andy grimace. Assis en tailleur sur son lit, l'regard noir, il fulmine. Pourquoi s'escrime-t-elle à toujours l'appeler Andrea ? Ne lui a-t-il pas dit qu'il préférait Andy ? Ce ton mielleux l'insupporte. Il ne lui fait aucun reproche verbal, pourtant. Il sait qu'elle fait de son mieux. Qu'elle s'attendait à retrouver son fils adoré. Qu'elle a récupéré un parfait adolecent inconnu, en plein dans l'âge traître. L'môme, quatorze ans bien entamés, referme son livre de classe. C'est difficile, à l'école. Privé de scolarité huit années durant, a appris à lire dans la cave sordide. Avec Alpha. Lui qui lui a appris. Une main sur sa cuisse. Alors rattraper le retard, ç'a été difficile. Les maths, la chimie, la littérature. Les langues étrangères, la philosophie. L'enfant soupire, attend encore quelques minutes assis sans rien faire, sans rien dire, enveloppé dans un silence pesant. Puis, décidant qu'il avait assez attendu pour, sûrement, faire attendre en retour leur invité par spécialement invité par lui-même, faut dire, Andy décide de descendre les marches le menant à l'étage principal. Il adresse un regard méfiant et fuyant à l'inconnu. Il l'a déjà croisé, bien sûr. Avec les autres. Même s'il en manque. Doivent former une équipe, parait-il. Doivent faire tomber l'seul qui a été un pilier pour eux. Peut-être plus pour Andy. Parce qu'Andy, c'est le plus jeunes des enfants du loup, comme on les appelle dans la presse. Peut-être qu'il était plus modulable, alors. Il entre dans le salon, où se tient cet homme, son avocat même s'il ne connait pas bien sa fonction exacte. Là pour le défendre, qu'il parait. Le défendre de quoi ? Ne risque plus rien, Andy. N'voudrait même pas de mal à l'Alpha, finalement. Contradiction bien ancrée dans son petit crâne trop influençable. Pourtant, il dévisage l'inconnu en hochant la tête à sa présentation. D'accord, répond-il seulement. Il affiche une grimace, sans filtre. Sobriquet ? répète-t-il, en articulant difficilement. Il n'comprend pas trop le mot. Le prend comme une insulte. Fixe toujours l'avocat, en inclinant la tête sur le côté. Son regard n'est plus méfiant, est passé plutôt sévère. Un gamin qu'en a déjà trop vu, trop subi. Faudrait rassembler plusieurs âmes pour vivre c'qu'il a enduré, bien qu'il ne considère pas ça comme une épreuve. Juste une nécessité. C'était sa place, son destin, d'être Sigma. Vous devez l'appeler Alpha. C'est comme ça qu'on l'appelait. Et c'est important. L'adolescent a un ton ferme, presque un ordre.

Pourtant, il s'installe en face de Nero, nom qu'il a retenu dès le premier jour, dès que leurs regards se sont croisés et qu'il s'était présenté à la meute - ou du moins, ce qu'il en restait. L'en manquait deux. Omega, disparue, envolée, même si Andy se refuse à croire qu'elle est morte, elle aussi. Aussi, parce que le cinquième nom qui manque, c'est Kappa. Kappa, qu'a pas survécu. Et pour ça, seulement pour ça, Andy en veut à l'Alpha. Mais ce sont sans doute des choses que les adultes ne peuvent comprendre, Andrea l'a bien saisi, dès lors qu'il a raconté leurs vies à la police, dès lors que ses parents prennent des pincettes en parlant des instants dérobés à la loi. De ces choses qu'ils disent forcées quand ils ignorent qu'elles ne l'étaient pas. Ou sûrement qu'si, mais son cerveau d'enfant les a tant acceptées qu'elles semblent parfaitement normales. Assis en face de Nero, l'adolescent s'étend sur sa chaise, reposant son dos sur le dossier. L'absence de ses parents ne le fragilise en rien. Leur présence ne lui apporte rien, vérité bien cruelle pour eux. Nulle protection, nul réconfort. Il a grandi sans eux et aujourd'hui, il n'en a pas besoin, si jeune soit-il. Parfois, la nuit, il pleure en silence, la tête enfouie dans son oreiller. Pour un manque étrange, viscéral, qu'il ne peut avouer aux adultes bien qu'il ait déjà essayé. Alpha lui manque. Clairement. Il ne peut clamer son envie, son besoin de le revoir. Et de quoi allons-nous discuter ? Parle comme un adulte malgré sa voix qui n'a pas encore muée. J'ai déjà tout raconté à la police. Affiche un air blasé, presque moqueur, comme pour dire ils ne comprennent rien. Mais au-delà de ça, son regard signe une interrogation. Est-ce que lui comprendra là où les autres ont échoué ? Il sent une sensation viscérale le pousser à lui faire confiance. Et ça le dérange presque, comme il n'y trouve aucune explication plausible. Il ne le connait pas, alors il devrait s'en méfier. Andy décide donc de le soumettre à une série de tests. Secrètement. Il étend ses jambes, le fixe toujours droit dans les yeux sans peur ni honte. Si vous avez des questions, c'est maintenant. J'ai beaucoup de devoirs et l'école, c'est déjà pas facile, alors j'aimerais ne pas prendre trop de retard. Et sous la table, son pied vient effleurer le mollet de l'homme en face de lui. Andy s'demande s'il est comme le chef de meute. S'il pourrait, lui aussi, le prendre sous son aile - quand celui-ci s'est servi de lui sous couvert d'allures protectives. La pointe de son pied se fait plus insistant et remonte le long de son pantalon, se frottant plus franchement contre son mollet, l'regard toujours fermement accroché dans celui de l'adulte.


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Nero faisait partie de la majorité de gens pour lesquels les enfants et adolescents représentaient une constante source d’émerveillement. Leur candeur, bien qu’éphémère, lui rappelait qu’il y avait encore du bon en ce monde corrompu jusqu’à la moelle et qu’il fallait se battre pour cela, pour paraphraser la tirade de l’un de ses personnages fictifs favoris. Il connaissait des gens pour qui au contraire la jeunesse demeurait une énigme à jamais insoluble, ou pire encore une source de tension, de friction. Cela, Nero ne le comprenait pas vraiment. Il admettait volontiers et non sans indulgence que certains gamins pouvaient se montrer particulièrement irascibles quand ils s’y mettaient, mais en général, si on prenait la peine de les traiter comme des personnes à part entière plutôt que comme des êtres implicitement inférieurs, sous prétexte qu’ils n’étaient pas encore majeurs et vaccinés, eh bien ils vous le rendaient bien. C’était avec cette pensée en tête que l’ancien majordome abordait aujourd’hui le jeune Andrea, debout dans l’embrasure du salon. À voir son visage quelque peu renfermé, peut-être même sceptique, le garçon ne semblait pas prêt du tout à lui faire confiance. Normal, après ce qu’il avait vécu, se rappela l’avocat avec une pointe de pitié. Non. Il ne fallait pas le prendre en pitié. Rien de pire que la pitié pour ruiner un lien de confiance. Ça sous-entendait qu’il s’adressait à lui du haut de sa tour d’ivoire, alors qu’il voulait au contraire qu’ils discutent d’égal à égal, malgré le gouffre abyssal qui les séparait en tous points de vue. Mais Nero n’était pas le genre d’homme à renoncer à la première difficulté.
Il esquissa un sourire bienveillant en sa direction avant de se présenter et de lui expliquer la raison de sa visite. Il se flagella mentalement dès qu’il réalisa qu’il avait employé une tournure de phrase par trop complexe pour le garçon, qui n’avait après tout que quatorze ans, comme l’indiquait très clairement, noir sur blanc, le dossier qu’il avait lu et relu jusqu’à s’épuiser les mirettes. Ce n’était pas le moment de jouer le dictionnaire ambulant. « Oui, pardonne-moi. Je voulais dire qu’on le surnomme l’Alpha. » Décidément, ça commençait bien. Il se promit de surveiller ses excès de vocabulaire à l’avenir en présence du garçon. Il resta impassible face à cette requête des plus inattendues, mais au plus profond de lui, s’étonna de l’aplomb avec lequel il se portait à la défense de son ancien bourreau. Comme s’il ressentait un certain attachement envers lui. Syndrome de Stockholm non diagnostiqué? Peut-être, peut-être pas. Ça valait la peine qu’il se fasse évaluer par un psychiatre, à moins que ce ne soit chose faite. Il faudrait qu’il en glisse un mot au couple Moore avant de partir. « Alpha? Très bien, c’est noté. Mais tu dis que c’est important, peux-tu m’expliquer pourquoi? » Puisque le sujet était d’ores et déjà lancé sur le tapis, autant en profiter.
Enfin, le garçon prit place sur le fauteuil en face de lui. Une table basse les séparait, sur laquelle trônaient une petite plante qui semblait n’avoir pas été arrosée depuis des lustres ainsi que la télécommande de la vieille télévision non loin d’eux. Un décor parfaitement normal, typique d’une famille américaine de classe moyenne. Et pourtant, le gosse qui le toisait à présent d’un œil sombre, presque torve, n’avait rien de normal. Il ne cadrait plus dans le tableau propre et idyllique dont on l’avait arraché voilà des années. Il était revenu en un morceau, oui. Mais il n’était plus le même. Ça se voyait dans son visage farouche. Ça s’entendait dans sa voix délicate. De ses doigts fins, Nero pianota doucement sur sa serviette, toujours posée sur ses cuisses. « Oui, mais moi, je ne suis pas la police. Je ne te vois pas comme un élément parmi tant d’autres pouvant résoudre l’enquête. Je souhaite qu’on collabore, toi et moi, pour que l’Alpha… enfin, Alpha paie pour ce qu’il vous a fait subir, à toi et aux autres. Tu comprends? » Il accompagna sa question d’un autre sourire. Il souriait beaucoup, Nero, malgré ses airs austères. Il n’était pas un mauvais type, loin de là. Il espérait qu’Andrea le comprenne, et même qu’il en vienne à lui faire confiance et à le considérer comme une personne importante dans sa vie, sans trop pouvoir se l’expliquer. C’était seulement la deuxième ou troisième fois qu’ils s’adressaient la parole et pourtant, Nero s’attachait déjà à ce gamin, si sérieux que c’en était presque comique. Il voulait sincèrement lui venir en aide, à ce petit, au-delà de son devoir d’avocat. Et ça l’effrayait. Ça l’effrayait même beaucoup.
Il attendait encore une réponse de la part d’Andrea. Il fallait y aller à son rythme, éviter de le brusquer sous peine de le voir se renfermer sur lui-même. Il apprenait à l’apprivoiser, sans savoir ce qui se tramait réellement derrière sa paire d’yeux blasés. Mais il ne tarda pas à le savoir. Il venait d’ouvrir la bouche pour lui répondre d’un ton compatissant que bien sûr, il comprenait, qu’il ne comptait pas abuser de son temps, mais aucun mot n’en sortit. Car il sentit soudain contre la peau nue de son mollet l’orteil inquisiteur d’Andrea. Il sursauta, malgré lui. Le masque de sa légendaire impassibilité venait de choir à ses pieds. « Andrea, je… À quoi joues-tu, enfin? » balbutia-t-il, les mains crispées sur sa serviette. À tout moment, la mère ou le père pouvait débarquer dans le salon, par exemple pour leur servir un verre d’eau. Et Dieu seul savait comment ils réagiraient face à une telle scène… Une fois qu’il eut repris ses sens, toutefois, il se demanda si ce petit jeu, certes dangereux, ne recelait pas la clé du jardin secret du gamin. Peut-être qu’en se soumettant aux excentricités d’Andrea, il pourrait mieux le comprendre? Ce serait peu cher payé pour une avancée aussi grande sur la psyché de son jeune client. Nero ferma les yeux un instant, respira, inspira. Puis les rouvrit. Il était déterminé à agir comme s’il n’y avait rien d’étrange ou de choquant dans la soudaine tournure de leur conversation. « Oui, je comprends que passer du temps avec quelqu’un comme moi ne te fasse pas très plaisir. Tu souhaites sûrement tourner la page sur cette histoire. Mais crois-moi, ta version des faits est plus importante que tu ne le penses. Tu as vécu aux côtés de cet homme — d’Alpha — pendant les dernières années de ta vie. Les autres enfants et toi, vous le connaissez sans doute mieux que quiconque. Pour vous défendre de la meilleure façon qui soit, j’ai besoin de savoir tout ce qui s’est passé, dans les moindres détails. » La pression de l’orteil contre son mollet commençait sérieusement à le déconcentrer. Et le regard insistant du jeune adolescent ne l’aidait en rien. À croire qu’il le faisait exprès. « Raconte-moi ce que tu as vécu, Andrea. À ton rythme. Dans l’ordre que tu veux. » Il l’encouragea d’un signe de la tête, se maudissant déjà d’avoir accepté de jouer le jeu. De s’être persuadé de n’avoir pas le choix. Fol imbécile.

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Il soupire, comme un peu blasé. Pourquoi doit-il donner ce genre de détail à un inconnu ? À la justice qui s'en servira contre lui, contre eux, ou contre Alpha de toute façon. Le garçon semble hésiter un peu, jouant avec ses doigts au-dessus de la table.C'est important parce que c'est comme ça qu'on l'appelle. Il penche la tête sur le côté, enfonce un peu son regard perçant dans celui de l'adulte. Adulte qui semble doux sans en faire des tonnes, et Andy trouve ça curieux, cette absence de pitié dans ses yeux. Est-ce enfin un qui ne va pas le plaindre pendant deux heures. Et ça, Andy apprécie. Il s'appuie contre le dossier de sa chaise.Enfin, pour vous il doit avoir un autre nom. Pour nous, c'était Alpha. Pour vous, je suis Andrea, pour lui, j'étais Sigma. Dévoile, explique, d'façon pas bien claire pourtant, sans s'en rendre compte. Parce que ça lui semble si logique. Parce qu'il n'a connu son vrai prénom que cinq ans avant que celui-ci ne soit remplacé par un autre. Huit années durant. Andy trouve aussi qu'le gars en face de lui sourit beaucoup. Il étudie son visage, avec insistance, avant de hausser les épaules, presque désinvolte.La façon dont vous me voyez change quoi ? Mon récit sera le même. Il serre un peu le poing contre le bois de la table, pianotant dessus avant d'être rapidement agacé par le bruit qu'il fait lui-même.Aux autres, qu'il insiste d'une voix sévère malgré son jeune âge qui, sûrement, la fait paraître un peu risible, pas autant féroce qu'il aimerait qu'elle soit.Moi, il ne m'a rien fait. Déni profond, trouble psychologique sévère, qu'il dit. S'il en veut à Alpha, c'est surtout pour les coups que les autres ont pu prendre, parfois. Ceux qu'il a reçu, lui, ne comptent pas. Il lui en veut aussi pour la mort de Kappa. Impardonnable. Et leur relation intime... pour Andy, il n'a rien subi. Rien qui ne mériterait punition. Mais du point de vue des adultes, de la police, de ses parents, visiblement, ce n'est pas la vision de tout le monde.

Alors, Andy décide de mettre à l'épreuve l'avocat. S'il veut devenir son allié. Il va bien falloir le tester. Savoir s'il peut lui faire confiance, quand même envers ses parents, sa loyauté semble avoir été remise en question. Savoir s'il sera de son côté ou du côté du reste du monde. Alors, l'adolescent essaie. Le long de son mollet, il y fait glisser son pied. Et il voit tout de suite le malaise qui s'installe chez son hôte. Sa façon de crisper les lèvres, les yeux, l'corps tout entier qui se tend. Andy esquisse un semblant de sourire en coin sans cesser pour autant. Il se penche en avant, lentement, enfonçant ses yeux grisonnants dans ceux de Nero.Vous pensez que c'est un jeu ? Il se gratte la tête, comme réellement pensif. Est-ce qu'Alpha a joué avec lui, alors ? Est-ce que tout ça n'était qu'un jeu ? Il reste dubitatif, le gamin, sans même craindre que sa mère n'entre dans la pièce et le surprenne. Il laisse planer les paroles de Nero dans l'air sans y répondre, le regard même ailleurs, le mollet immobilisé contre celui de l'homme. Venu pour l'aider, qu'il dit ? L'aider à quoi ? C'est tout ça qu'Andy ne comprend pas. Lui s'en fiche de l'avenir d'Alpha, finalement. Tant qu'il n'est pas tué. Voudrait presque le protéger, sans que personne ne puisse comprendre pourquoi. Comme s'il avait envie de le revoir, un jour. Peut-on lui en vouloir ? Il a vécu à ses côtés huit ans durant. Plus d'une année qu'il s'est enfui et Andy doit bien s'avouer qu'il lui manque.
D'un seul coup, l'adolescent se lève, s'arrachant au contact malvenu que son pied imposait contre celui de l'avocat. Si on croirait qu'il va simplement quitter la pièce, il bifurque pourtant et vient s'installer sur le canapé, à côté de Nero. Il ne le regarde pas, d'abord, fixant la pièce qui lui est toujours restée étrangère. Comme si souvenirs d'enfant avant la meute n'avait pas existés, comme s'il n'avait jamais vécu ici. Comme si tout ce qu'il avait dû retrouver avait été inventé. Le seul repère qu'il ait retrouvé, c'est Nora. Il reste stoïque, assis bien droit et c'est là qu'il jette un regard en coin à l'homme à côté de lui. Remarque bien sa serviette froissée. Retrouve le fil, s'rappelle les paroles, les demandes, les questions qu'elles ont amenées. Et, sans prévenir, le jeune Moore pose sa main gauche à plat sur la cuisse de Nero. Il veut sentir chaque crispation de ses muscles par ce geste.Tous les détails ? Hum. Eh bien, ça a commencé comme ça. Il affermit sa prise sur sa cuisse, avant de remonter sa main enfantine encore à son genou, d'y refermer ses doigts.Il m'a demandé "est-ce que ça te dérange, Sigma" ? Vous, la réponse est flagrante. Moi, j'avais sept ans. Et pourtant dans sa voix, on n'y décèle aucune gêne, aucune honte, aucune blessure. Il ne retire pas sa main ; bien au contraire, celle-ci quitte son genou pour reprendre sa place sur sa cuisse. Il remonte même un peu.Êtes-vous vraiment prêt, Nero, à entendre tout ce qu'il s'est passé là-bas ?


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Le corps droit, Nero continuait d’écouter les paroles du garçon qui se démenait pour comprendre son point de vue dans cette sale histoire, bien qu’il doutât que ce fut seulement possible et pas seulement à cause de leur large différence d’âge. Pour comprendre certaines choses en ce monde, il fallait hélas les avoir vécues. Par exemple, difficile de réellement comprendre pourquoi Nero s’échinait autant à retrouver l’assassin de son meilleur ami et de sa femme, même après toutes ces années. Tout au plus pouvait-on compatir à sa souffrance et son envie de vengeance. Mais Nero était persuadé que personne, hormis peut-être les enfants Blackwell, ne ressentait la même colère, la même injustice, à l’idée qu’un tel monstre puisse continuer de ravager sur ce qui se trouvait sur son passage par sadisme ou nécessité – les coulisses de ces meurtres étaient tellement floues qu’il était encore impossible de pencher vers l’une ou l’autre de ces théories. Ça lui laissait un goût si amer dans la bouche qu’il n’arrivait parfois pas à fermer l’œil de la nuit ou même imaginer redevenir l’homme paisible et pacifique qu’il avait autrefois été, dans une autre vie lui semblait-il. Cet événement des plus traumatisants avait détruit quelque chose en lui.
Et il se disait que c’était un peu la même chose pour le jeune Andreea Moore, bien qu’il s’entêtât à s’embourber dans son déni de la réalité pour il ignorait quelle raison, exactement. Le plus tragique, bien sûr, c’était qu’il s’agissait d’un gamin, non d’un adulte. Andrea avait encore toute la vie devant lui et il avait fallu qu’un cinglé décide de le priver de son innocence, mot qui lui semblait de plus en plus approprié s’il en jugeait par la soudaine tournure de l’entretien. Point besoin d’un diplôme en psychiatrie pour deviner que cet Alpha avait dépassé l’interdit à maintes reprises. Rien d’étonnant à cela, il avait séquestré des enfants pour les entraîner à devenir des machines sous son contrôle, pourquoi ne pas en profiter au passage? Ainsi avait dû raisonner son esprit pervers et tordu. Mais en se laissant toucher de la sorte par le gamin, Nero ne valait-il pas mieux que cet homme dérangé, si nobles que puissent être ses intentions? Il voulait simplement chercher à apprivoiser le jeune adolescent, après tout. Alors pourquoi diable sentait-il qu’il ne devait pas l’encourager dans ce sens? Il était l’adulte, il savait mieux juger de ces choses-là qu’un gosse de quatorze ans aux définitions du bien et du mal plus que défectueuses.
Pourtant, il ne put que glapir, tel un oiseau repéré par le chat, un semblant de protestation en sentant sa peau nue contre la sienne dans un geste presque intime. Il grimaça, conscient de son choix de mots à nouveau douteux. Lui qui se flattait d’être doué avec les jeunes… « Non, ce n’est pas un jeu. C’était juste une expression. » À quoi bon? Ses paroles ne valaient rien si elles n’étaient pas suivies d’actions. C’est alors que le garçon se leva pour venir le rejoindre sur le canapé, leurs deux corps alors plus près l’un de l’autre que jamais. Nero toussota, tentant bien que mal de reprendre contenance. Sa serviette posée sur ses genoux comme unique bouée de sauvetage. Et plus les minutes passaient, plus le naufrage s’annonçait imminent. Il tressaillit en sentant la paume juvénile se déposer sur sa cuisse. Bon, ça suffisait, maintenant. Il avait voulu jouer au plus fin, voilà que ça lui retombait en plein visage. Son esprit rationnel reprenait le dessus. Dans un geste ferme, il s’empara de la main étrangère et l’éloigna de lui. « Je dois te demander de ne plus me toucher, Andrea. Je ne suis pas Alpha. Tu ne t’en rends pas compte, pas encore peut-être, mais ce qu’il t’a fait est mal. Très mal. » Il soupira, espérant ne pas avoir fermé une porte entre eux en ayant employé des mots si manichéens à propos d’un monde qui, lui, ne l’était certes pas. « Pour te répondre, je suis prêt à entendre tout ce que tu es prêt à me révéler, puisque c’est mon travail de connaître tous les dessous de cette affaire. Voyons voir. Tiens, parle-moi plutôt de ta relation avec les autres enfants. » Il lui lança un regard encourageant. Secrètement soulagé par la distance relative entre le garçon et lui.

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Une expression. Andy hoche la tête. Malgré son jeune âge, il l'avait compris, voulait peut-être titiller l'avocat. Voir de quel bois il est fait. Parce qu'assurément, s'il veut vraiment s'occuper de cette affaire - leur affaire - il leur faut quelqu'un qui tient le coup. Qui a du répondant, de la hargne, de la volonté. Qui sait ce qu'il veut ou ne veut pas, aussi. Parce que les enfants du loup ne sont pas tendres et ne le seront peut-être jamais. Encore moins maintenant, presque une année après la fin d'un enfer peu commun. C'est trop frais, trop récent. Trop incrusté à même leurs veines. Alors qu'Andy teste les limites de son avocat, ce dernier attrape sa main. L'adolescent affiche sur son minois un sourire désinvolte, presque victorieux. Il a réussi à le mettre mal à l'aise et avec le commun des mortels, cela est presque trop simple d'y parvenir. Surtout à son âge. Andy a vite compris ce qui mettait les adultes dans une position d'inconfort, voire de gêne garantie. Ce genre de choses, par exemple. Et ça tient à si peu. Une main sur une cuisse et voilà leurs fondements évanouis. Pourtant, il a noté un détail, peut-être insignifiant pour d'autres. Nero a laissé sa main une seconde. Une seconde de trop.

L'adolescent récupère sa main en forçant un peu sur la poigne bien plus forte que la sienne de l'avocat. Le dévisage lentement, ancrant ses yeux gris dans ceux d'un brun ténébreux de l'homme. Il le trouve séduisant. Pas de la même façon que l'Alpha, certes. Il parait oui, on me le répète à longueur de temps. Soupir dissimulé quand il porte ses doigts à ses lèvres avec lesquelles il joue distraitement. Nouveau soupir, plus discret cette fois-ci. Il ramène ses jambes contre lui, les entourant de ses bras, comme un enfant en bas âge le ferait. Ses yeux se perdent dans un vide où ce qu'il voit n'est accessible qu'à lui. Je trouve ça quand même injuste que la définition du bien ou du mal d'un acte ne soit pas donnée par celui qui l'a subi, esquisse-t-il comme une remarque, en se reconnectant lentement pour venir poser ses prunelles sur l'homme à côté de lui. Il pivote sur sa chaise, se trouvant face à lui comme pour ne plus avoir l'envie de le toucher. Il obéit, malgré qu'il n'en ait peut-être aucune envie. Quelque chose lui dit que cela en vaudra la peine. Il affiche donc un comportement sage, contrastant avec l'air effronté qu'il portait peu avant, jouant déjà avec une dextérité peu commune à alterner entre différents rôles. Nous avons été élevés comme des frères et des soeurs, commence-t-il alors, d'une voix calme. Il ne lâche pas Nero de son regard insistant, presque provocateur, contrastant avec sa voix posée. Je donnerai ma vie pour l'un d'entre eux. Un regret meurt dans sa gorge et la fait se serrer. Parce que ça aussi, c'est encore trop frais. Il détourne le regard, comme s'il ne voulait pas que l'on puisse voir sa peine, sa douleur, sa culpabilité. Cruelle position qu'il a eu dans ce jeu mesquin qui a duré huit longues années ; le plus jeune et pourtant, celui prêt à tout pour protéger les siens. Mais il a échoué. Kappa n'a pas survécu et tous les regrets du monde ne la ramèneront pas. Nous avions chacun une utilité propre. Nous avons été entrainés chacun dans un domaine précis. Sélectionnés, chacun, pour un... don que nous possédons. Relève son regard dans celui de l'avocat, pour attraper au vol sa réaction primaire. Croit-il à ce genre de choses ? Au commissariat, beaucoup se sont esclaffés, d'autres moins. Cela ne touche pas Andy. Il se fiche de savoir qu'on croie ses paroles ou non. Son histoire, il ne l'a pas inventée. Il fait une courte pause et tend un bras, avant de se figer, la main en l'air, suspendue entre lui et l'avant bras de Nero. Vous toucher m'apporte du réconfort. Mon but n'était pas de vous blesser ou de vous mettre mal à l'aise. Mais vous l'êtes, parce que vous savez ce que j'ai vécu. Alors qu'un autre enfant à la vie normale qui aurait agit comme moi, vous l'auriez peut-être laissé faire. Je me trompe ? N'est sûr de rien, Andy, quand il prêche le faux pour savoir le vrai, anxieux de se prendre pour plus mature qu'il ne peut l'être.


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Non, il ne savait décidément pas à quoi jouait ce garçon. Il insistait sur le mot. Jouer. Il avait l’impression d’être une marionnette aux mains de ce gosse qui au moindre mouvement, à la moindre parole, pouvait réduire son cœur en charpie. Il le contrôlait. Et Nero détestait être contrôlé. Nero détestait perdre le contrôle, fût-ce pendant quelques secondes. Il s’agrippait de toutes ses forces à la partie rationnelle en lui, l’unique égide contre son insanité rampante. Il écoutait les paroles du garçon tout en ne le quittant pas du regard, prêt à intervenir s’il recommençait son petit manège, celui de l’attirer vers les zones grises de l’affection jusqu’à peut-être goûter l’interdit du bout des lèvres. Il serra les dents. Il ne céderait pas. Il n’avait jamais cédé. Il savait vassaliser ses pulsions hérétiques qui depuis sa jeunesse le taraudaient où qu’il aille. Un regard admiratif, une main curieuse, un compliment équivoque. Rien de plus. Jamais rien de plus. Il n’oserait jamais aller au-delà de la moralité. Il connaissait les conséquences par cœur pour les avoir étudiées sous leurs moindres coutures, pendant ses études en droit. Ce n’était pas de l’amour, pas au sens propre du terme. Qu’un caprice charnel, parmi tant d’autres. Le corps était traître; il dictait ses propres lois et Nero tentait d’y résister, de toutes ses forces.
Il ne voulait pas devenir un monstre.
Il observa le garçon toucher ses lèvres de ses doigts fébriles et innocents. L’avocat détourna le regard, le posa faute de mieux sur le téléviseur éteint. Il avait presque envie de l’allumer pour créer une distraction à ses pensées impures et vagabondes. Seigneur, il devait se reprendre. Il était ridicule. Il était venu sonner à la porte des Moore pour raison professionnelle. Il ne devait pas l’oublier. S’il ne préparait pas un bon dossier pour ces gamins et que leur tortionnaire ne croupissait pas en prison comme il le méritait… Il secoua la tête. Il préférait ne pas y penser. Andy comme les autres victimes méritaient que justice soit faite, même s’ils n’en comprenaient peut-être pas encore la définition. Tout dépendait de Nero. Il opina du bonnet, signe qu’il comprenait la logique de l’adolescent. Mais il le laissa parler, pour ne pas qu’il se referme comme une huître. Il l’écouta avec révérence et nota la fuite de son regard à la mention d’un sujet de toute évidence encore sensible pour lui. Nero sauta sur l’occasion. « Tu en veux à Alpha d’avoir assassiné la jeune fille? » osa-t-il demander sans préambule. Il sentait qu’il tenait quelque chose pour percer la carapace du garçon.
Soudain, Andy reporta son attention sur lui, comme pour le tester de nouveau. Nero se sentait scruté, presque à nu. Son visage demeura impassible, bien qu’il mourût d’envie d’en savoir plus sur les desseins d’Alpha quant à ses petits soldats de chair et de sang. « Un don? Tu peux me donner un exemple? » Peut-être était-il simplement question d'un don d'observation ou de déduction, quelque chose de banal de ct acabit. Mais peut-être se fourvoyait-il sur toute la ligne. En tant qu’ancien majordome de la maison Blackwell, il avait été témoin de bien des événements insolites par le passé. Une partie de lui n’y croyait pas, refusait même d’y croire. Lui-même n’avait jamais rien vu qui sorte de l’ordinaire. Mais une autre partie de lui devait bien admettre que la petite ville tranquille d’Exeter recelait peut-être plus de dangers qu’elle ne le laissait paraître de prime abord. Face à des témoignages que seul résolvait le paranormal, il se sentait tiraillé entre ses sens et sa raison. Pris au piège. Du coin de l’œil, il aperçut la main du garçon se lever, se mouvoir vers lui. S’arrêter au dernier moment. D’un seul coup, il laissa échapper le souffle qu’il n’avait pas eu conscience de retenir dans ses poumons. « Andrea… » Le ton sévère, comme une menace (fragile) (factice). « Je… je n’en ai aucune idée, » balbutia-t-il, pris de court. Qu’est-ce que c’était comme question, qui plus est de la part d’un gosse de quatorze ans? À contrecœur, il examina les doigts juvéniles, à sa portée. L’envie de les effleurer de ses lèvres lui traversa l’esprit. « Ce n’est pas aussi simple que tu le crois, » murmura-t-il enfin, l’œil affolé. « Mais… » Le visage fixé sur le mur devant lui, d’une couleur terne, affreuse même, il agrippa sans crier gare la main encore levée du gamin dans la sienne. De sa poigne redoutable et sans pitié, il comprimait la peau et les os offerts en offrande. Il relâcha la main après quelques secondes (vertigineuses) (de trop). « Ne le dis à personne, tu m’entends? Sinon, je… » Il lui jeta un regard apeuré. Conscient d’avoir franchi le point de non-retour. Les dents serrées plus que jamais, il bondit du canapé, sa serviette sous le bras. « Je suis désolé, je n’aurais pas dû. Ce n’est pas ta faute. Je suis désolé. »
Désolé d’être devenu un monstre.

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Andy a détourné le regard. Parler de Kappa le plonge dans un sentiment d'insécurité. Il ne tient pas rigueur à Alpha pour beaucoup de choses, en vérité. Seulement pour ça. Et pours les quelques violences qu'ont subi ses autres frères. Il serre la mâchoire et les poings, gardant son regard obstinément détourné de l'avocat. Oui, elle.. elle ne le méritait pas. Des fois, je me demande si... si je n'avais pas pris la fuite, si... Si elle serait encore vivante. Si ça n'aurait pas pu se passer autrement. Son meilleur soldat qui le trahit, comment Alpha aurait-il pu réellement affronter ça autrement qu'en se défoulant sur l'un d'entre eux ? Et si ça avait été sur Novia ? Finalement, ils comptaient tous autant les uns que les autres. Alors pour ça, oui, Andy lui en voulait péniblement. Une haine qu'il n'aimait pas ressentir, quand elle s'entrechoquait avec d'autres sentiments bien contradictoires. Heureusement, il parvient à attraper la curiosité de l'avocat sur un autre sujet. Il tourne de nouveau la tête vers lui, affichant une satisfaction claire que de l'avoir intrigué. Ce genre de sujet laisse rarement les gens indifférents. Il rapproche sa chaise, l'air de rien. Eh bien.. saviez-vous que certaines personnes peuvent créer des étincelles, voire des flammes, par le simple contrôle de leur esprit ? Ou que d'autres... pouvaient s'immiscer dans votre esprit, y implanter leurs idées et les faire vôtres ? Il fait une légère pause, avec un soupir presque théâtral. A un sourire presque rêveur. Se souvient de ses escapades mentales qui lui sont propres, là où rien ni personne ne pouvait avoir d'emprise sur lui.

Mais il est bien décidé à surprendre un peu plus l'avocat. Toujours pour le tester, pour avancer un peu plus sur cette piste qu'il sait glissant. Et grisante. Sans comprendre le délit, sans comprendre les enjeux. Puisqu'on lui a appris que c'était normal. A bien remarqué les grimaces des adultes, pourtant, quand il parlait de sa relation avec Alpha. Les soupirs choqués, les hoquets d'indignation. Andy, ça le fait sourire, ces réactions. Peuvent pas juger, qu'il estime. S'rend pas compte, qu'à son âge, il n'peut réellement savoir ce qui est bien ou bon pour lui. Vous dirait même qu'il s'en fiche ? Le ton soudain sévère arrache un sourire au garçon, quand on croirait que la fermeté du ton de Nero le fâcherait. Il relève la menace avec insolence. Va-t-il le gifler ? Il en a vu d'autres, Sigma. Mais la sévérité semble se fragmenter soudain et le sourire d'Andy s'agrandit, comme galvanisé par l'affront. L'adulte qui semble perdu laisse un semblant de victoire à l'adolescent, comme s'il était fier de l'avoir troublé. Non pas par mesquinerie. Ou peut-être que si ? Mais avant qu'il ne puisse le prédire ou l'espérer, Nero se saisit de sa main suspendue dans l'air (dans le temps). Andy reçoit un frisson depuis le bout de ses doigts, parcourant son bras jusqu'à faire trembler son épaule et remonter à la terminaison nerveuse de son cuir chevelu. Un frisson délicieux, coupable, interdit mais si grisant. Avant de ressentir la douleur et que son sourire insolent ne se transforme vite en une grimace réelle. Mais l'avocat le relâche avant qu'il n'ait pu esquisser une plainte sonore. Andy le dévisage lentement, la mine choquée qu'on n'peut pas louper. Mais c'est la peur qu'il lit imprimée dans les yeux de l'avocat qui lui redonne de l'assurance. Le nécessaire pour reprendre contenance. Il récupère sa main meurtrie et la serre dans l'autre. Feignant peut-être une douleur qu'il ne ressent pas vraiment. Pas à c'point, en tout cas.

Il le suit des yeux alors que Nero se lève précipitamment. Sinon tu perdrais ton travail, n'est-ce pas ? demande-t-il, abolissant le vouvoiement par instinct. Comme si la limite avait été franchie, comme s'ils n'avaient plus besoin de s'embarrasser avec ça. Il se lève à son tour, mais plus lentement. Tu peux compter sur moi. Les secrets, ça me connait. Lui offre un clin d'oeil malicieux, sans se rendre compte de l'indécence de son comportement tout entier. Il s'avance vers lui, le regard assuré et téméraire. S'arrête juste devant lui. La différence de taille ne semble pas l'impressionner. Il garde un regard dur et confiant. S'il te faut d'autres informations pour.. m'aider, tu devrais te rasseoir. Je vais nous chercher de l'eau. Le frôle à peine en le contournant, sans vraiment le toucher. Dans la cuisine, fait couler l'eau longtemps, avec l'excuse qu'elle soit vraiment fraiche. S'remet un peu les idées au clair, en réalité. Même s'il ne saisit pas pourquoi ce qu'il ressent devrait être mal. Il le sait, au fond de lui, que ça l'est. Se remémore le frisson qu'il a senti quand il a attrapé sa main. Même si c'était un peu douloureux. Avec Alpha, ça l'était aussi parfois, finalement. Donc ça aussi, ça doit être normal. Se construit au fur et à mesure, l'gamin. À empiler dans son crânes des faits qu'il classe comme des règles, des certitudes. Revient au bout de quelques minutes à peine, le visage plus détendu. Comme si quelque chose avait changé. Comme s'ils étaient amis (et plus).
Les amis partagent des secrets, n'est-ce pas ?
Il se rassoit sur le canapé, déposant le verre d'eau de Nero devant lui sur la table, gardant le sien dans les mains. En boit quelques gorgées en prenant son temps, avant de tourner la tête vers Nero de nouveau. Nous avions chacun notre rôle. Je t'ai parlé des dons... eh bien, chacun avait un peu un "travail" par rapport à ça. Chacun était un maillon de la chaine, reprend Andy, comme s'il ne s'était rien passé.


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Sur le coup, Nero ne sut que répondre à l’évidente souffrance peinte sur les traits juvéniles du garçon, là, assis à moins d’un mètre de lui. C’était la première fois, depuis qu’ils avaient commencé à parler, qu’il parvenait à déceler une émotion en accord avec les traumatismes qu’il avait vécus aux mains de cet Alpha. Andrea regrettait la mort de sa camarade. Pire encore, il s’accusait du meurtre, du moins d’en être la cause indirecte. Nero hocha lentement la tête, l’air grave. Il avait lu le dossier à maintes reprises, connaissait par cœur les circonstances qui avaient conduit au dénouement de cette triste affaire. Un peu comme s’il les avait vécues, lui aussi, ne fut-ce que par procuration. « Je suis désolé, Andrea, » souffla l’avocat au bout d’un moment. Désolé qu’il ait perdu quelqu’un à qui il tenait. Quelqu’un qui lui manquait, qui lui manquerait sans doute pour le reste de ses jours. Cela, Nero ne le comprenait que trop bien. Il lança un regard plein de compassion à l’adolescent avant d’enchaîner : « J’ai perdu quelqu’un, moi aussi. Mon meilleur ami. Sa femme et lui ont été froidement assassinés. Je me dis parfois, encore aujourd’hui, que si j’avais été à leurs côtés ce soir-là, j’aurais pu éviter la tragédie. » Il haussa les épaules, voulant paraître plus fort qu’il ne l’était réellement. Un rire non de joie mais de tristesse le secoua soudain. L’un de ces rires spontanés qui ressemblaient presque à un jappement et qui sortaient de votre bouche au moment où vous vous y attendiez le moins. Juste pour relâcher la tension accumulée. Un mécanisme de défense, peut-être.
Il jeta un regard à Andrea, qui l’écoutait encore. Il aurait voulu le rassurer, le réconforter même. Poser la main sur son épaule dans un geste amical, solidaire. Lui offrir un chocolat chaud avec des marshmallows pour lui réchauffer le cœur pendant une longue journée d’hiver, quelque chose qu’il n’avait peut-être jamais connu. Andrea Moore avait encore tout à découvrir. Maintenant qu’il avait connu les pires horreurs de ce monde, il était grand temps qu’il découvre l’envers de la médaille. Il n’osa toutefois esquisser le moindre mouvement en sa direction. Il ne se faisait pas assez confiance, craignait que le geste anodin devienne la porte d’entrée d’un univers encore inexploré, car prohibé légalement, moralement. Par chance, Andrea changea le sujet de la conversation et l’avocat lui en fut très reconnaissant. Il fronça les sourcils. Il n’avait jamais entendu pareilles sottises être prononcées d’un ton si sérieux. Pourtant, il ne faisait aucun doute que le garçon ne plaisantait pas. C’était comme s’il avait été témoin des manifestations de ces dons particuliers. Peut-être l’avait-il réellement été. Dans une ville inusitée comme Exeter, ce n’était pas impossible. Même si Nero n’était pas encore tout à fait prêt à l’admettre à voix haute. « Et tu possèdes toi-même l’un de ces dons? Lequel? » Il avait pris un ton sérieux lui aussi, pour montrer qu’il ne se moquait pas de lui. Par la suite, il se demanda si c’était une erreur de l’encourager ainsi. Car le petit insolent sembla alors vouloir pousser ses limites. Et Nero tomba dans le panneau comme un imbécile.
La gorge sèche, le cœur en feu, il se leva d’un seul bond. Sa serviette désormais ridée sous le bras. Prêt à prendre la poudre d’escampette. Comme un lâche. Le plus lâche des lâches. Il déglutit, les yeux fixés sur l’adolescent qui lui faisait perdre tous ses moyens. Il remarqua à peine le tutoiement de son jeune interlocuteur. Changement subtil, mais ô combien édifiant. Il se passa une main nerveuse dans les cheveux. « Pas seulement mon travail. Tu n’as pas idée des conséquences que ça peut avoir. C’est… J’ai… » Il en perdait ses mots, le pauvre Nero. Ça ne lui arrivait pas souvent. « Ne le dis à personne, » répéta-t-il comme un automate, comme pour s’assurer qu’il avait bien compris. Le clin d’œil et la promesse implicite du garçon le rassurèrent à peine. Si ça se trouvait, il venait de bousiller sa psyché déjà suffisamment esquintée. Peut-être considérait-il même le geste honni comme normal. « Je n’aurais pas dû faire cela. Je ne le referai plus. » À ce stade, il ignorait qui il essayait de convaincre : Andrea ou lui-même. C’est alors qu’il remarqua que le gamin se massait la main, celle meurtrie par sa poigne de fer. Aussitôt, il s’en voulut d’avoir été si brusque avec lui. « Ta main. Je ne t’ai pas fait trop mal? » s’inquiéta-t-il à voix basse, pour ne pas alerter les parents. Il voulut s’approcher pour s’en assurer de lui-même avant de réaliser toute la dangerosité d’un tel geste. Il valait mieux prendre ses distances, à l’avenir. Il avait appris la leçon. Enfin, il se plaisait à le croire.
Il exhala un remerciement, un verre d’eau ne serait pas de refus. Seul dans le salon, il poussa un long soupir avant de laisser tomber sa serviette à ses pieds. Il se mit à faire les quatre cents pas comme un animal en cage. Il se dégoûtait à un point où il aurait voulu qu’on le condamne à la potence ou tout autre machine barbare de cet acabit. C’était tout ce qu’il méritait. Il le savait. Pourtant, il refoulerait ses envies les plus viscérales, les plus intimes, comme à l’habitude. Il n’avait pas le choix, n’est-ce pas? Et ce n’était pas la première fois que ça lui arrivait. À son esprit tordu s’imposa l’image fugace et enivrante de Jill Blackwell s’avançant vers lui, un désir innommable dans son regard de braise. Il secoua la tête, le visage crispé par la honte, ses mains accrochées à ses cheveux par pur désespoir. Il était dérangé. Aussi dérangé que l’homme qu’il s’apprêtait à condamner au nom des gamins kidnappés. Le masque du parfait gentleman venait de se fissurer. C’est ce moment que choisit Andrea pour revenir dans le salon avec les verres d’eau promis. L’avocat se saisit du sien, les mains encore tremblantes, pendant que son jeune client se rasseyait sur le canapé. Puis, l’entretien se poursuivit comme si de rien n’était, au point où Nero se demanda s’il n’avait pas imaginé l’incident. À contrecœur, il se rassit à son tour sur le canapé, qui craqua sous son poids. « Je vois. Toi tu… traquais les victimes, si j’ai bien compris. » Ça ne l’étonnait guère.
Le chérubin cornu savait traquer ses victimes avec une précision inégalée.
Nero venait d’en avoir la preuve absolue.

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Désolé ? Encore une expression d'adulte qu'Andy ne comprend pas. Souvent, on est désolé pour lui et pour les autres et il ne sait pas ce que ça veut dire. En quoi on peut être désolé de ce qu'ils ont vécu ou non. Il ne répond donc pas, et affiche même une mine légèrement troublée lorsqu'il entend Nero se... confier ? Il l'écoute pourtant avec une attention toute particulière, son cerveau déjà fermement actif s'arrimant à noter les détails, à inscrire les informations dans des cases. Il plisse les yeux. Ne lui offre pas vraiment de douceur dans le regard, ne sait pas trop faire ça, Andy. C'est qu'on ne lui a pas appris. Qu'on ne l'a pas été à son égard non plus et même dehors depuis plus d'un an, c'est dur de rattraper le retard sur ce genre de bases morales. Ou peut-être aurais-tu été froidement assassiné, toi aussi. Et alors, tu ne serais pas mon avocat aujourd'hui, fait-il alors remarquer, pour toute réponse, pour tout réconfort. Tout ce qui arrive a un sens, selon lui. Il faut parfois un bien pour un mal. Ou un mal pour un bien. Son plan a bien fonctionné, Nero a mordu à l'hameçon, même si cela n'était pas dans un but manipulateur. Andy garde un léger silence avant de répondre, lui jetant un regard en coin. Je suis capable de projeter mon esprit. Ailleurs. Mentalement. D'y voir ce qu'il s'y passe. Il surveille la réaction de l'avocat, n'affichant aucune gêne, aucune honte, n'ayant jamais vraiment connu ce stade d'ailleurs, tant leur don était sublimé par Alpha, qui se devait de leur apprendre qu'ils devaient être des alliés de leur nature plutôt que des ennemis. Mais ça parait fou, je sais, qu'il s'autorise à ricaner légèrement, en détournant le regard.

Andy ne lui offre aucune réponse à ses questions, s'esquivant vers la cuisine. Peut-être que Nero pensera que leur entrevue est terminée, qu'il s'est échappé, que cet accrochage a mis un terme à leur relation, si précoce pourtant. Mais Andy choisit simplement de le surprendre, nullement gêné par ce qu'il vient de se passer. Même la douleur est déjà oubliée, puisqu'elle fait partie de ça. Il constate que Nero s'est rassit et affiche un air satisfait, comme si les rôles étaient inversés, comme s'il se donnait le droit d'être le donneur d'ordre. Il décide de ne pas laisser ses précédentes paroles en suspens dans le désir, peut-être, de ne pas le blesser. Car réellement, Andy s'en voudrait. Je n'ai pas mal. Et je ne le dirai à personne, qu'est-ce que j'y gagnerai ? Il enfonce fermement ses grands yeux d'un bleu orageux dans ceux de l'adulte. On n'a pas beaucoup d'alliés, dans c'monde, alors faut pas les perdre, quand ils se montrent, qu'il chuchote, comme si c'était un secret. Il ponctue même ses derniers mots d'un clin d'oeil malicieux, bien qu'il soit sincère, car Andy ne se connait aucun vice pour le mensonge. Alpha lui a appris ça, aussi. À être transparent, à dire ce qu'il pense plutôt qu'à dire ce que les autres voudraient entendre. Quelle autre conséquence cela peut-il avoir ? souffle l'adolescent, réellement curieux, la mine interrogative sans voir quelle sanction pourrait s'appliquer à ce qu'il vient de se passer.

Sur le canapé, Andy ramène ses jambes à lui et les croise, en tailleurs. Il garde son verre d'eau dans les mains, jouant du bout des doigts sur son bord, comme distrait, soudainement. Même s'il a dû raconter son histoire encore et encore, les questions sont tournées différemment, cette fois. Et cela le replonge des années et des années en arrière. Quand il avait dû apprendre. Il ferme les yeux quelques secondes. Toi, Sigma, tu as un rôle très important. Tu n'agis pas à un seul moment, tu es utile tout au long du processus. Forcément, que c'était lui. Quel autre meilleur candidat qu'le plus jeune gamin récupéré ? Celui à qui ç'avait été si aisé, finalement, d'inculquer ce qu'il souhaitait. Il semble revenir à la réalité et passe une main dans ses cheveux courts en hochant la tête, sans pour autant regarder Nero. C'est à peu près ça. Mon rôle, une fois que la victime était choisie, était de la suivre. Mentalement parlant, bien sûr. Mais pour ce faire, il me fallait connaître les lieux où elle se rendait, y être déjà allé moi-même physiquement pour pouvoir les visiter ensuite. Les reconnaissances s'effectuaient sur plusieurs jours selon le nombre de lieux que la proie fréquentait le plus. C'est là qu'il relève les yeux vers son avocat. Son allié, qu'il a dit. Comprendra-t-il ? Peut-on vraiment le comprendre ? Les questions, on les lui a souvent posées. Mais alors, tu allais dehors ? Pourquoi tu n'as jamais essayé de t'enfuir ? Pourquoi tu as attendu huit ans ? Comme si c'était d'sa faute, tout ça. Mais la vérité, triste et cruelle, c'est qu'Andy n'avait jamais eu envie de partir. Là-bas, il était chez lui. Avec ses frères, ses soeurs, et même un père. Pour qui ou pour quoi serait-il parti ? C'est comme demander à un enfant adopté de s'enfuir de sa nouvelle famille. Sauf qu'un jour, ça a été trop. Et à force de mettre le minois dehors, Andy voyait bien qu'les autres gamins ne se faisaient pas frapper pour chaque erreur, chaque parole de travers. Il soupire, comme pour mettre un terme à ses propres réminiscences. Ainsi, qu'il reprend toujours d'un ton qui ne scille pas, je pouvais m'assurer du moment parfait où la proie devait être subtilisée et tuée. Des mots si durs qui tranchent avec son visage juvénile et son ton implacable, comme s'il y était insensible. Il penche la tête légèrement sur le côté. Si tu m'emmènes chez toi un jour, alors, je pourrai y venir, qu'il souffle sur le ton de la confidence. Comme un secret, une tentation, une proposition. Il y a encore la question de la distance, mais Andy n'a pas besoin de fournir tous les détails du fonctionnement de sa capacité.


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Il parvenait à lire dans le regard du garçon que le message ne passait pas, qu’une barrière semblait capturer les mots pour les emprisonner dans un lieu à part, lointain, répulsif aux mains d’Andrea Moore. L’avocat préféra ne pas insister, il ne voulait pas déconcerter davantage le pauvre gosse, de retour depuis peu dans une société qui lui était désormais étrangère, avec ses règles et ses codes qu’un fou furieux avait pris soin de démanteler un à un pour son propre intérêt, pour son propre plaisir. Résultat, il peinait à comprendre un simple message de sympathie exprimé à son endroit. Je suis désolé. Au même titre que toutes mes condoléances, que Nero avait précisément évité en raison de ce dernier mot peut-être trop complexe pour lui. N’empêche, ça demeurait des phrases toutes faites qu’on sortait presque par mécanisme en situation de deuil, qu’on comprenait tous implicitement. Mais pas Andrea. Jamais Andrea. Nero esquissa un sourire triste, prêt à changer de sujet; c’est ce moment que choisit le gamin pour le surprendre, lui, le vieux bonhomme de cinquante-trois piges. Lequel éclata de rire à la remarque candide et spontanée, mais aussi porteuse d’une implacable logique. Un rire sincère sortit de sa bouche, loin de ses rires courtois et réchauffés qu’il servait à ses interlocuteurs en toute situation, pour leur faire plaisir. Il aimait faire plaisir, Nero. Il était comme ça. Serviable et servile. Jusqu’au bout des ongles. Il essuya du revers de la main les quelques larmes qui poignaient à ses yeux, tant il avait ri. « Tu as bien raison. Ça aurait été dommage. » Il parvint à se calmer, bien qu’un sourire traître demeurât sur ses lèvres. Il reprit néanmoins son sérieux lorsque Andrea aborda le sujet, controversé selon certains de ses collègues, des dons des enfants kidnappés. Pour sa part, Nero attendait d’en savoir plus sur la question avant de trancher sur cette partie du témoignage des victimes. À première vue, ça semblait être tiré par les cheveux, peut-être l’énième signe précurseur des séquelles psychologiques à venir. Et pourtant… Si tous insistaient sur ce point, malgré les rires gras des enquêteurs, c’était qu’il devait forcément y avoir un fond de vérité quelque part, non? À moins que ce ne fut une autre des manipulations exercées par le fameux Alpha? « C’est vrai que ça semble assez extraordinaire. J’ai lu le dossier, je connais les rouages de la meute, pour reprendre le terme employé par Alpha lors des premiers interrogatoires. La façon dont vous procédiez pour enlever vos victimes… Elle se révèle tout bonnement impossible si les dons dont tu me parles n’existent pas. » Il raisonnait à voix haute, sans forcément attendre une réponse. Il soupira discrètement. « Alors, j’ai envie de te croire, Andrea. »

De nouveau assis sur le canapé, théâtre de ses impiétés inavouées, Nero avala une gorgée d’eau. Sa gorge l’en remercia. Il garda le verre froid dans sa main, peut-être par habitude, peut-être aussi comme ancrage à la réalité. Une façon de le maintenir dans l’instant présent et non dans ses fantasmes malsains qui avaient quelques minutes plus tôt failli prendre le dessus sur son sang-froid légendaire. Il aurait voulu éviter le regard un peu trop perspicace de l’adolescent à ses côtés, mais n’en fut point capable. À la place, il s’y accrocha comme à une bouée de sauvetage, les mots salvateurs sonnant à ses oreilles comme le glas de sa lucidité. Voilà qu’un gamin de quatorze ans le rassurait. Nero eut envie de gémir d’humiliation. Il ne manqua pas le clin d’œil taquin visé à son encontre. Comment Andrea, qu’il venait tout juste de rencontrer, parvenait avec une adresse déconcertante à lire en lui, à déchiffrer chacune de ses mimiques? C’était comme si leurs âmes se connaissaient en réalité depuis des millénaires et que leur première rencontre sur le plan terrestre n’était en réalité que des retrouvailles que l’un et l’autre avaient depuis longtemps cessé d’espérer. « Tu… Tu me considères vraiment comme ton allié? » répéta Nero, une douce chaleur se propageant dans tout son corps. Certes, c’était entre autres pour cette raison qu’il avait pris l’initiative de sonner à la porte des Moore ce soir. Pour apprendre à mieux connaître l’un de ses jeunes clients. Pour tisser un lien de confiance avec lui. Eh bien, ils venaient d’en tisser tout un, Andrea et lui. Une confiance fragile et précaire, sur fond de chantage émotionnel et de désir tabou d’apprivoiser l’autre. Nero se massa la tempe de sa main libre. Il ne souhaitait pas répondre à la question posée, bien qu’elle fût toute légitime. Pire encore, il ne souhaitait pas y penser. Il aurait voulu enfermer les conséquences de leur acte avorté dans un coin de son cerveau pour ne plus jamais y toucher. Jouer à l’autruche, en somme. Il était doué pour ça, l’ancien majordome. Il laissa échapper un rire nerveux. Il murmura, l’œil angoissé : « Eh bien, pour dire les choses très simplement, je ne pourrais plus être ton avocat. » Je ne pourrais plus être avocat tout court, fort probablement. « On ne pourrait plus jamais se revoir. » Il se mordit l’intérieur des joues, dégoûté de ses prochaines paroles. « Tu ne veux pas d’un autre avocat, n’est-ce pas? » À ses oreilles, la question sonnait presque comme une supplication. Rassure-moi, Andrea. Dis-moi que tu la ressens, toi aussi, cette attirance. Ou plutôt, ce désir de me connaître au-delà de mon titre de juriste. Dis-moi que je ne suis pas le seul. Il détourna la tête, incapable de soutenir plus encore le regard pénétrant de l’adolescent.
L’entretien se poursuivit ensuite, comme si de rien n’était. Nero écouta le témoignage de son jeune client. Il était persuadé que les policiers n’avaient pas eu droit à autant de détails sur le fonctionnement de la meute d’Alpha. Ils connaissaient l’affaire, bien entendu. Mais c’était peut-être la première fois que Sigma, pour reprendre le surnom, se confiait aussi librement. Nero en aurait ressenti une certaine fierté, si le geste qui lui avait coûté ce nouvel élan de confiance ne lui soulevait pas le cœur. Il fronça les sourcils. Suivre la victime? Mentalement? Il se rappela le soi-disant don d’Andrea. Il avait affirmé pouvoir projeter son esprit. « Tu pourrais me montrer comment tu procèdes? » s’enquit-il sans même y réfléchir. C’était sa curiosité qui le poussait à comprendre la mécanique de la chose. Il ne voyait pas l’intérêt de reposer des questions dont il connaissait déjà les réponses, pour les avoir maintes fois lues dans le dossier. « Enfin, si tu le veux bien. Je ne veux te forcer en rien, » ajouta-t-il, comme pris de remords en souvenir de ce qui avait failli se produire sur le canapé, quelques instants plus tôt. Il regrettait déjà d’être resté sous le toit des Moore. Il aurait dû déguerpir comme un voleur dès qu’il en avait eu la chance, à savoir quand le gamin était parti lui chercher un verre d’eau. Par la suite, il aurait prétexté une urgence au bureau ou un drame familial quelconque. Le couple Moore y aurait cru. Leur fils, en revanche… Une nouvelle fois, Andrea lui prouva par ses paroles qu’il comprenait à la perfection l’insidieux chemin qu’empruntait son imagination. Peut-être par habitude, sous l’égide de son précieux Alpha. Il baissa le regard vers ses pieds. Après l’épisode du canapé, il serait terriblement hypocrite de lui interdire toute forme de familiarité envers lui, n’est-ce pas? « Seulement si tu veux que je t’y emmène, » finit-il par marmonner entre ses dents, le regard toujours détourné. Il connaissait le risque que représentait une telle visite, où il se retrouverait alors véritablement seul à seul avec Andrea. Sans personne pour les déranger. « Et seulement pour que je comprenne ton… ton don. » Mais bien sûr. Qui essayait-il de duper, avec cette excuse pathétique? Le canapé? Il se racla la gorge dans l’espoir de dissiper le malaise qui s’installait en lui. « Par la suite, tu pourras visiter mon domicile autant de fois que tu le souhaites, et ce, à n’importe quel moment du jour ou de la nuit? » Les possibilités troublantes et plurielles dansaient dans sa tête. Et il était trop faible pour les juguler. Toujours trop faible.

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Le rire de Nero emplit la pièce. Andy le trouve mélodieux. Sincère, plaisant à entendre. L'inscrit dans son crâne, au même titre que les autres informations et confidences à son sujet, comme un employé de bureau le ferait avec des dossiers. Un mental à toute épreuve, travaillé, érodé pour en tirer le meilleur et, surtout, le plus efficace. Il écoute attentivement les mots, tête penchée, mine concentrée. Sûrement qu'il a plus de concentration que les autres adolescents de son âge, qui souffrent de déficit de la concentration et autres hyperactivités. Andrea, lui, selon les psychiatres qu'il a été obligé de rencontrer, souffre de bien pire. Mais il ne connait pas les termes, n'a pas voulu les entendre, les comprendre. S'estime seule juge impartial sur lui-même. Et la seule autre personne en ce moment, à ce jour, à le connaître mieux que quiconque reste Alpha. Indéniablement. Je ne peux t'obliger à croire, mais j'espère bien que tu en as envie, qu'il soulève avec un sourire mutin. Et s'il te plait, appelle-moi Andy. Garde son assurance qui semble inébranlable. À son regard insistant, il recueille celui de l'avocat, qui semble s'y accrocher comme un noyé à une bouée. Cela ne dérange pas Andy. Les autres enfants du loup aussi, s'accrochaient parfois à lui. Quand l'plus jeune semblait parfois l'plus fort. Un esprit forgé directement dans l'acier des mains de leur tortionnaire, bien sûr qu'il était peut-être le plus à même à endurer, à encaisser. Nero répète ses mots et cela ne fait qu'agrandir le sourire du garçon. Il peut comme sentir l'effet que ça lui fait. Il te faut savoir, Nero, qu'il souffle en se penchant un peu vers lui, dangereusement, prononçant son nom d'une voix sucrée, que je ne dis jamais ce que je ne pense pas, alors, ai-je tort en te considérant comme mon allié ? Il se recule, creusant une meilleure place pour son fessier dans le canapé, comme pour s'y cantonné. La gêne et le malaise du moment précédent, bien qu'il ait du mal à les accepter, l'ont dérangé au point qu'il ne veuille plus les faire ressentir à son hôte.

Il l'écoute et fronce les sourcils, sans pouvoir s'empêcher de presque le couper. C'est bien ce que je disais, tu perdrais ton travail. Il avait dire qu'il n'y avait pas seulement ça qu'il perdrait mais n'en a pas appris plus, pour le coup. Il capture son angoisse comme on attrape un papillon ; avec délicatesse mais une extrême vivacité. Pour, à la fois, ne pas le laisser s'échapper et ne pas briser ses ailes. Sa question réveille, à son tour, une douce chaleur dans le corps de l'adolescent qui lui, l'accepte avec bien plus d'assurance. Il s'en délecte, laisse ses terminaisons nerveuses s'en repaître, les apprivoiser, les garder juste là, à fleur de peau. Garde ses yeux brillants ancrés sur Nero, même quand celui-ci les détourne. Non, Nero, souffle entre déposant son verre d'eau sur la table, usant d'un certain effort pour rester à sa place, je ne veux pas d'un autre avocat.
Andy n'est pas surpris par sa requête, c'est là souvent motif à vouloir voir quand on ne peut simplement croire. Il hoche lentement la tête mais affiche une moue un peu embêtée. Bien sûr. Seulement, tu ne pourrais pas savoir si je dis la vérité ou si j'invente tout. Forcément, puisqu'il serait le seul à partir. L'adolescent écoute l'avocat abdiquer. Il se demande ce qui le pousse à lui faire confiance ainsi. Est-il sincère ou bluffe-t-il ? Peut-être ne compte-t-il jamais l'emmener chez lui. Encore un test, sûrement. Il garde le silence un peu trop longtemps, à la fois amusé par les excuses que l'adulte semble vouloir se donner (leur donner) et, aussi, implicitement concentré à déterminer s'il dit vrai. Sa dernière question lui permet de trancher et il se tourne vers lui. C'est trop tôt, qu'il assène brusquement, avec une drôle de fermeté. On ne se connait pas encore assez bien. Parce que oui, je pourrai y venir à toute heure du jour et de la nuit. Je pourrai... te regarder dormir, manger, Il laisse les situations en suspens, non pas qu'il n'ose pas les dire - sûrement qu'elles doivent s'inscrire dans ses yeux et dans le coin de ses lèvres qui se soulève, toutes ces situations où il pourrait le voir au plus près de son intimité. Bref soupir, il reprend d'une voix calme : Et pour cela, il est trop tôt. Nous devons attendre de mieux nous connaître.

Et sans vraiment lui laisser le temps de protester, Andy se lève du canapé. Il fait deux pas serrés en direction de l'avocat, mais ses yeux fixent le verre auquel il semble agrippé. Lentement, il se penche, attrape d'une main ce dernier et de l'autre, en décroche lentement chaque doigt. Il dépose délicatement le verre sur la table, non loin du sien, avant de, presque timidement, se saisir des mains de Nero, décalant légèrement ses jambes des siennes pour s'y frayer un chemin. Timidement mais dans un geste franc qui ne lui laissera, il l'espère, pas le temps de les esquiver. Immédiatement, il enfonce son regard dans celui de l'homme. Ne panique pas, chuchote-t-il, reproduisant ce qu'il a vécu, suivant les mêmes schémas, les mêmes étapes qu'Alpha a emprunté avec lui. S'dit que ça a marché, alors, pourquoi pas là ? Si je tiens la main de mon père, ou de mon oncle, ou de mon professeur de français, ça n'inquiète personne. Alors, ça ne devrait pas t'inquiéter. Et puis, j'ai eu une idée. Sur le ton de celui qui se veut rassurant, quand il sait (quand il sent) que ça n'a pourtant rien à voir. N'est-ce pas ? Il le tire lentement vers l'arrière, espérant que l'avocat y mettra un peu du sien pour se lever. Allons près de la fenêtre. Tu y regarderas la rue, juste devant chez moi. Moi, je retournerai sur le canapé. Ainsi, j'irai en bas et te décrirai ce qu'il s'y passe. Si ce sont les mêmes choses que tu vois, alors, tu ne pourras que me croire, propose-t-il en relâchant Nero, gardant une proximité indécente, debout juste devant lui, toujours dans l'étroit couloir que forme ses jambes. Comme pour ne pas faire durer le malaise qui sera sûrement déjà suffisant, s'imagine-t-il, il se recule lentement pour attendre la réponse de son avocat. Sur ses lèvres, un drôle de sourire a fait son apparition et il se frotte les yeux. Je te préviens, je ne pourrai pas le faire longtemps. Je me suis déjà projeté ce matin, et ça m'épuise beaucoup, si je le fais trop souvent.


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Nero arqua un sourcil en direction de l'adolescent qui semblait bel et bien se moquer de lui, à force de jouer avec les sous-entendus. Son regard assuré, son sourire en coin, tout cela contribuait à accentuer son absence de remords. Le gamin ne regrettait rien; il s'amusait avec lui comme si Nero, en frappant à sa porte ce soir, était devenu son nouveau jouet. Mais peut-être l'avocat se voilait-il la face en voulant rejeter sur lui tout le blâme? Peut-être n'était-il que le seul fautif dans l'histoire. Il ne le savait pas vraiment. Tout ce qu'il savait, c'était que plus son séjour chez les Moore s'éternisait, plus il s'embourbait dans un marécage de tabous et de non-dits. L'interdit juste au bout des doigts, prêt à être cueilli s'il osait franchir le pas. Il esquissa un sourire nerveux, faible tentative pour se reprendre contenance. « D'accord... Andy, » murmura-t-il, ses mains tremblant quelque peu malgré lui. Il s'empressa d'avaler une gorgée d'eau dans le risible espoir d'avaler du même coup sa fébrilité inassouvie. Échec monumental.
Il laissa échapper un soupir presque soulagé. Le gamin le considérait comme son allié. Quelqu'un pour l'aider, véritablement l'aider. Pas juste pour soulager sa conscience d'avoir tant traîné pour boucler cette affaire. Pas juste pour bien paraître auprès des habitants d'Exeter et du public en général. Non. À défaut de lui faire entièrement confiance, Andy le croyait (avec raison) du côté des enfants du loup — de son côté à lui. Aux yeux de Nero, ça revêtait une importance toute particulière. Et il avait peur, une peur sans nom, d'affronter son regard dans le miroir et de s'interroger sur ses véritables motivations. Il se réconfortait comme il le pouvait en se disant qu'il voyait mal comment défendre efficacement les intérêts de ces cinq enfants s'ils le voyaient comme un énième adulte capable seulement d'articuler de belles paroles sans aucune intention derrière. Il n'y avait déjà que trop d'individus de cette trempe de par le monde, certes. Mais ce n'était pas l'unique raison qui le poussait à rechercher la compagnie des cinq enfants, à commencer par Andy ici présent. Il refoula la vérité non sans émotions et secoua doucement la tête. « Non. Je te l'ai dit, je veux t'aider. Toi. Et les autres enfants. » Son allié. Eux contre le reste du monde.
Il grimaça. C'était encore un enfant. Il ne comprenait pas encore tout à fait le monde qui l'entourait. Le monde des adultes, sans pitié et d'un froid chirurgical. Perdre son travail ne représentait que la pointe de l'iceberg. Il ne mentionnait pas ce qui se cachait derrière. L'opprobre jeté sur son nom et  son visage. L'expulsion implicite de sa personne de toute activité organisée à Exeter, voire ailleurs. Il deviendrait un fantôme, un être abject qu'on évitait comme la peste et le choléra. Condamné sur la place publique ad vitam aeternam, noir sur blanc. Nero le savait. Il était témoin de cet affreux manège au moins une fois par an. Il connaissait les rouages de cette soi-disant justice comme le fond de sa poche. Andy ne comprenait pas. Andy ne comprendrait jamais. Il était figé dans le temps et l'espace. Un Peter Pan qui ne voyait le mal nulle part. Il l'observa sans piper mot, carré à l'extrémité du canapé. Il ne voulait pas d'un autre avocat. C'était une phrase à la fois si simple et si rassurante. Nero aurait pu en pleurer de joie s'il était le genre d'homme à se laisser ainsi aller aux émotions. « Ne t'en fais pas, je ne vais nulle part. » Pas comme ses parents, qui ne l'avaient pas suffisamment surveillé huit ans plus tôt. Pas comme Alpha, trop ambitieux et téméraire pour garder sa chère et précieuse marmaille auprès de lui. Non, Nero comptait rester près d'Andy, tant et aussi longtemps qu'il voudrait de lui. Il s'attachait déjà à lui, bien que ce ne fût que leur première vraie rencontre, seul à seul. Sa conscience le flagellait pour ses pensées impures, et pourtant... Rarement s'était-il senti si revigoré, si vivant. Ça ne s'expliquait pas, pas vraiment. Ça se vivait.
Il baissa les yeux face au refus du garçon de procéder à l'expérience, qui lui prouverait si, oui ou non, il possédait ce fameux don. Andy avait raison, bien sûr. C'était trop tôt. Ils ne se connaissaient pas assez bien. Et pourtant, Nero avait l'impression de le connaître depuis un millénaire, dix millénaires, cent millénaires. Andy le perturbait. Andy l'intriguait. Andy l'attirait. « Alors, que suggères-tu? » s'enquit-il en relevant la tête. Il ne tarda pas à obtenir réponse à sa question. Avec la lenteur du chasseur s'approchant de sa proie, il vint lui enlever le verre d'eau, une phallange à la fois. Torture délicieuse, enivrante. Nero baissa le regard vers leurs mains fusionnées, sans un mot. Il attendait de voir ce qui allait se passer, laissait Andy contrôler ses sens, son esprit, son corps tout entier s'il le voulait. Nero se soumettait. Encore. Toujours. Mâle dominé de la meute. Soudain, l'adolescent s'avança vers lui, son corps juvénile entre ses cuisses, son visage près du sien, trop près. La respiration de Nero s'accéléra, son coeur cognait dans sa cage thoracique. « Andy, tu ne devrais pas... On ne devrait pas... » Mais sa voix manquait de conviction, d'autorité. Il sentait la main du garçon dans la sienne, savourait la chaleur s'en dégageant. Il se laissait faire, encore une fois. Une marionnette entre les doigts d'un jeune dieu. Il écouta l'idée, se forçant à se concentrer sur les mots prononcés plutôt que sur la peau tendre et invitante de son (très) (trop)  jeune ami. « Quelques minutes suffiront, je pense, pour vérifier tes dires, » le rassura-t-il avec un sourire. Andy semblait si sérieux. Son esprit pouvait-il donc réellement voyager à volonté? Il ne tarderait pas à en avoir le coeur net. Andy parvint à le tirer du canapé, Nero flasque comme une vulgaire poupée de chiffon. Ça l'amusait de se faire mener par le bout du nez par ce gamin. De ne pas être en contrôle de tout, pour une fois. Il se posta près de la fenêtre tandis qu'Andy retournait s'asseoir sur le canapé. « Tu es prêt? C'est parti. » Nero baissa le regard vers le trottoir, juste en face de l'entrée de l'immeuble. « Il y a un vieil homme qui vient de sortir de l'immeuble. Décris-moi ce qu'il fait, ce qu'il porte si tu y arrives. » Il sourit malgré lui, le regard posé sur la silhouette qui venait effectivement de sortir à l'extérieur, non un vieil homme, mais une jeune femme à la crinière dorée, son bébé endormi dans le landau qu'elle poussait d'une main, l'autre tenait son téléphone. Nero ne la quitta pas du regard, notant chaque détail. « Alors, Andy? »

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Il peut noter sa tension, tant dans sa voix, dans ses gestes, dans ses yeux, qu'Andy ne lâche pas, comme si c'était tout autant d'indices à ne pas négliger. Scrutateur, l'gamin, toujours, trop entraîné, à chercher le moindre détail à ranger dans les tiroirs de son crâne. Il note ses mots, mentalement, le scrutant toujours de ses grands yeux brillants. Des yeux d'enfant, finalement, parce que c'est sûrement ce qu'il restera toujours. Mais t'as dit moi en premier, qu'il relève, comme si ça lui permettait de marquer un point, quand l'prend une espèce de jalousie bizarre, à s'dire qu'il veut Nero pour lui avant les autres, avant même ses frères de meute. Et, comme rassuré par ses prochains mots, Andy, qu'il lui offre un sourire sincère, comme une main tendue, comme une bouée de sauvetage. Et c'est là qu'il trouve l'indécence de s'approcher de lui. Plus encore. Qu'il vient même lui saisir le verre d'eau, le dégager de ses doigts. Et si Andy fixe ses yeux, il voit bien que Nero, lui, est arrimé à leurs mains liées, à ses doigts qui vont et viennes, s'enlacent aux siens pour mieux les écarter et s'y échapper. Et pour, finalement, les attraper plus fermement malgré sa poigne d'adolescent, quand il sent qu'à cet instant, celui qui aura bien l'plus de force et de courage, c'est lui. Pourtant, il voit bien que Nero essaie de batailler. Qu'il voudrait le repousser. Qu'il l'entend dans sa voix, le perçoit dans la tension de son corps, soudain. Et pourtant, il n'fait rien. Pourtant, malgré ce qu'on pourrait croire, Andy ne tire pas de cette conclusion une quelconque impression de victoire. Même si cela lui offre de la satisfaction, pour sûr. Et comme pour le faire taire, gentiment, presque tendrement, l'adolescent pose un doigt en travers de ses lèvres. Et juste de les toucher, cela fait remonter un frisson le long de son échine. Qu'il ne peut pas ignorer, qu'il ne cherche même pas à nier, en fait. En savoure juste la délicieuse sensation. Nero, Nero,... si tu ne ressentais pas ça toi aussi, alors, on pourrait. Cligne lentement des yeux, avant de l'entraîner, arrimant ses mains aux siennes pour le tirer lentement vers l'avant, quand lui se penche en arrière.

Et que Nero suit, au comble de ses espérances. Il le positionne devant la fenêtre sans y jeter un oeil, justifiant ainsi sa bonne volonté et retourne s'installer sur le canapé, en tailleurs, comme il le fait souvent. Il hoche lentement la tête. Je suis prêt, qu'il répond, avant de fermer lentement les yeux en imprimant les paroles de son mentor du jour. S'plisse un sourire au coin des lèvres en l'imaginant de la sorte, comme s'il pouvait tenir le rôle d'Alpha, comme si finalement, toute cette justice, qu'ils disent, avait en réalité arraché à Andy un véritable pilier de son existence. Ses yeux parfaitement clos, il inspire à fond et se concentre, son front se plissant légèrement avant de se détendre d'un seul coup. Sa tête retombe lentement devant lui, comme s'il s'était soudainement endormi - ou évanoui. Dure un silence de quelques instants seulement, quand, sans bouger de cette position étrange, ses lèvres s'animent. C'est étrange, Nero. Parce que ce vieil homme qui vient de sortir semble promener hum... sa petite-fille, peut-être ? Attends, je me rapproche un peu. Non, la couverture est bleue, assurément, donc si on juge cet attribut des couleurs au sexe, je dirai que c'est un petit garçon. Il fait une légère pause, très légère, pendant laquelle l'écho de sa voix se meurt dans le salon. Je crois que tu es démasqué, Nero. Et le vieil homme n'a pas l'air d'apprécier comme tu le fixes depuis ta fenêtre, comme un espion. Et d'un seul coup, qu'il rouvre les yeux, la tête qui se remet à sa place, la nuque un peu tendue encore, qu'il se masse distraitement, un sourire sur ses lèvres. Ses yeux sont immédiatement revenus sur la silhouette de l'avocat, sûrement qu'il a dû croiser le regard de la femme au dehors qui s'est sentie observée. Il n'a pas fait durer ça longtemps, Andy, épuisé de son escapade matinale. Mais à son tour, pour l'imiter, depuis le canapé, qu'il lance : Alors, Nero ? Et que sans prévenir, il se lève, avec une grâce étrange. Une assurance qui ne ressemble pas à celle d'un adolescent de quatorze ans. Qu'il avance rapidement mais avec fluidité vers le rebord de la fenêtre avant que l'avocat ne se lève. Reprend sa position précédente, à s'immiscer entre ses jambes, mais cette fois, ses mains n'attrapent pas les siennes mais son visage. Comme pour le forcer à affronter son regard. Et que l'temps se suspend légèrement, quand il s'approche, pour déposer ses lèvres sur sa joue. Qu'il se recule lentement, pas assez pour ne plus sentir son souffle s'échouer sur son visage. À présent, tu ne peux que me croire. Maintenant, il faut partir, Nero. On se reverra. Lui offre un clin d'oeil avant de s'échapper avec un sourire mutin, pour récupérer son verre d'eau et l'observer discrètement depuis le travers du verre.
On se reverra.


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