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tw , accident de voiture violent, blessures graves et traumatismes.

••this is the end
this is the end hold your breath and count to ten feel the earth move and then hear my heart burst again for this is the end i've drowned and dreamt this moment


Fatigué. Putain comme il est fatigué. Des semaines que les heures se cumulent, des semaines que tout prend de plus en plus de temps. Son entrevue avec Susan qui tourne en boucle dans un coin de sa tête comme un rappel de tout ce qui ne lui convient plus dans son quotidien. Il en a marre, marre de tout, il est crevé. En fait, il a besoin de vacances, juste ça. Quelques jours à Hawaii et c’est reparti comme si de rien n’était. Alors qu’il rassemble ses affaires au bureau du tribunal, Marlon entend son téléphone sonner. Le nom d’Alvin s’affiche sur son écran et évidemment, il décroche. « Quoi ? » « Maman s’en sort pas, Marlon… faut que tu viennes… s’il te plaît. » « J’arrive. » Il soupire et raccroche. La détresse dans la voix de son plus jeune frère lui donne envie d’exploser tout ce qui l’entoure. Ses cernes plus grands que jamais devront patienter encore un peu pour trouver les plages de sable et la tranquillité. Dans un soupir de lassitude, l’avocat se glisse dans sa voiture et allume le moteur. C’est une route qu’il connaît absolument par cœur, il a fait le chemin plus souvent qu’il ne l’a fait jusqu’à chez lui. Parce qu’il n’a jamais vraiment été totalement chez lui, tellement une part de lui est toujours restée chez eux.

Mais ce n’était pas le moment pour les états d’âme, pas plus que pour une remise en question existentielle. Ses frères avaient besoin de lui, s’il n’était pas capable de leur offrir la même affection qu’à Susan, il pouvait au moins être complètement là pour eux. Marlon n’était pas son père, il valait mieux que l’homme qui les avait abandonnés. Il n’avait pas choisi sa famille, contrairement à l’homme que sa mère avait épousé, mais il l’avait décidée. Chaque jour de sa vie, il les choisissait, encore et encore, avec tout son cœur, c’était comme une évidence. Il avait beau en avoir marre et mourir de fatigue, rêver de son lit plutôt que de voir sa mère encore amorphe sur un sofa et devoir gérer toute la maison, il n’avait pas hésité une seconde. Les mains sur le volant et les yeux embués par la fatigue pesante, Marlon faisait ce qu’il avait fait tant de fois déjà : prendre la route en étant bien trop épuisé.

C’était pas très important, parce qu’il la connaissait tellement, et à cette heure-ci il n’y avait plus personne de toute façon. On ne pouvait pas dire que le chemin pour la maison était le plus peuplé de tous. Tout allait bien se passer, comme tout s’était toujours bien passé. Les paupières devenaient de plus en plus lourdes et sa respiration de plus en plus pesante. Plus que quelques minutes. Une des mains quitte le volant et il se colle une claque. Allez, putain, pas le moment de lâcher.

Et puis tout devient noir. Une seconde, une seule petite seconde. Les paupières gagnent la bataille contre les pupilles et l’océan se noie dans les abysses. Marlon sent son corps se relâcher, ses muscles qui décident de ne plus batailler. Et puis c’est trop tard, trop tard pour se rattraper. Le temps s’arrête et tout bascule. Les yeux s’ouvrent à nouveau et le monde est tout retourné. Tout est à l’envers, lui le premier. Le bruit est d’une violence inouïe alors que le tas de ferraille s’écrase contre la bas chaussée. La taule se froisse dans un hurlement de douleur et la ceinture de sécurité vient compresser sa poitrine tandis que les air-bags se déclenchent et que ses oreilles se mettent à siffler. Le temps n’a toujours pas repris et pourtant les événements s’enchaînent, tout son corps lui fait un mal de chien, un mal tellement fort, plus fort que tout ce qui n’avait jamais existé. Il n’arrive plus à respirer et le long de son corps, il sent ce liquide visqueux couler. Marlon veut bouger ses mains, ses pieds, bouger mais c’est impossible alors qu’il a l’impression que tout son corps s’est brisé. Pourtant il est en vie, alors il veut se battre, exister. Alvin et Curtis l’attendent, ils n’ont pas encore mangé. Sans trop comprendre comment, il arrive à bouger, même si le temps n’existe plus, sa main atteint la ceinture dans un hurlement de douleur, avec la sensation d’un bain de sang entre ses dents. Mais avant qu’il n’ait pu atteindre le clic pour se défaire de l’emprise, tout devient noir à nouveau.

Et cette fois-ci, Marlon sait. Ce ne sont pas ses poumons qui deviennent lourds, ce n’est pas la douleur qui semble seule résistante de toute l’existence. C’est le néant, le vide le plus total. Putain, je suis désolé. Mais c’est trop tard, pas vrai ? Cet abruti s’est tué. Quelle manière conne de mourir, sans déconner. Quelle manière débile d’en finir. Les plages d’Hawaii remplacées par des débris de verre partout sous ses pieds. Fais chier.

Puis le temps reprend, comme si rien ne s’était passé. Le bruit infernal a laissé place au silence le plus total. Dans le vide, Marlon entend des pneus, un claquement de porte. Incapable de comprendre ce qui lui arrive, impossible pour lui de se concentrer sur autre chose que les pas qui semblent se rapprocher. Il est conscient, les yeux bleus s'ouvrent sur le monde, toujours à l’envers et une voix s’insinue jusque dans ses oreilles. Avec une difficulté monstrueuse et l’impression qu’on lui arrache tout ce qui le compose, Marlon articule sans trop savoir s’il est vivant, s’il parle vraiment. « Aidez… moi… S’il… » Chaque mot comme une torture, il fatigue. Ses yeux se ferment mais il sent une présence de plus en plus proche. « J’suis… vivant? »

Comment?



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I'm done with your bittersweet, bittersweet tragedy
It's no fun, when I'm sitting all alone
You're right in front of me


C’est un soir comme les autres. Un soir où les étoiles sont de sortie, la lune est à son plein, toutes ces conneries de princesse de conte de fées. Pour un peu, on entendrait probablement les petits animaux de la forêt chanter.
Je tire sur ma cigarette.
Ma main ne quitte pas le volant de ma décapotable. Je pense à tout le travail qui m’attend en arrivant chez moi et ne peut m’empêcher de soupirer. Toujours la même routine, d’un train-train fatiguant. Et toujours pas de nouvelles de V. Je me demande si je ne devrais pas faire un petit sacrifice, pour faire tourner la chance en ma faveur. Mais la vérité, c’est qu’il n’y a personne assez proche de moi pour que je puisse le sacrifier. Dans mes parages, il n’y a que A. et il n’est pas question que qui que ce soit touche à un seul de ses cheveux.
Alors quoi ?
Quelles sont les solutions ? Engager un détective privé ? Est-ce que ça résoudrait seulement le problème ? D’un doigt, la cendre s’écoule dans le cendrier, au bord du levier de vitesse. V. où te caches-tu ? Est-ce que tu cherches à ce point à nous échapper ? Quel prix a ta disparition ?
Les pensées frémissent dans mon esprit, s’éclipsent au prix de nouvelles élucubrations sans but. J’ai beau retourner et tourner le problème dans ma tête, j’ignore comment retrouver la trace de V. Il pourrait être n’importe où, et le monde est grand. Qui sait ce qu’il a bien pu se passer dans sa caboche, toutes ces années ?
Il est peut-être même mort.
La pensée me tire un frisson.
V. si t’es là, quelque part, envoie moi un signe, n’importe quoi…

L’odeur de la fumée interrompt tous mes questionnements et je me concentre sur la route, soudain conscient de mon entourage. C’est une petite route, peu empruntée. Pourtant, au bout de celle-ci, j’aperçois une voiture retournée.

« Merde… »

C’est bien ma veine.
J’écrase ma cigarette dans le cendrier et ralentit. Un instant, me vient l’idée de juste accélérer et dépasser le lieu de l’accident, faire comme si je n’avais rien vu. J’ai suffisamment de problèmes comme ça et pas vraiment de temps à perdre avec ce genre de conneries.
Sûrement un type ivre qui s’est cru plus malin que le code de la route.
Je m’arrête toutefois à quelques mètres. De là, j’ai une bonne vue de l’incident, et j’aperçois facilement la silhouette encore dans les décombres de la voiture. Quelqu’un appelle à l’aide et ses mots se perdent dans le vent. Je lance un regard autour de moi. Il n’y a personne sinon nous. Si je le laisse ici, cet homme va probablement mourir. Alors j’approche, je jette ma veste sur le bas côté et remonte les manches de ma chemise blanche.

« J’arrive, ne bouge pas ! »

J’ignore ce qui me pousse à agir. Comme un vieil instinct qui se réveille d’un coup de pied alors que je m’accroupis et attrape l’homme sous les bras pour le tirer de dessous les débris. L’adrénaline s’écoule dans mes veines comme un venin qui m’incite à puiser dans mes forces alors que la masse volumineuse de l’inconnu est peu à peu sortie de la voiture.
Un sourire jaune se dessine sur mes lèvres alors que ses mots me parviennent et je réponds, sans cesser mes efforts :

« Ouais, t’es en vie mon vieux, alors ne me lâche pas maintenant. »

J’aurais pu passer mon chemin. Ça aurait été beaucoup plus simple. Je pourrais être chez moi, en train de réviser mes documents pour les prochains procès. Mais c’est trop tard maintenant, alors que le sang laisse des traînées poisseuses sur mes vêtements et mes bras et que le visage contusionné de mon inconnu m’apparaît.
Marlon Love.
Je le reconnais immédiatement.
Merde.
J’aurais probablement dû le laisser là. Trop tard. C’est trop tard. Je le revois, quand on était gamins, et je ne peux plus l’abandonner. Bon gré, mal gré, il est un des derniers liens avec V. et je le traîne hors de la voiture en soupirant sous l’effort.

« Reste avec moi, Marlon, ça va aller. Tu vas t’en sortir. »

Une fois sorti de l’engin, je saisis mon téléphone dans ma poche et compose le 911 d’un geste assuré. J’appelle au secours, demande de l’aide, reporte l’incident, reste en contact avec l’infirmière qui, à mon oreille, me cite les mesures à suivre.

« Marlon, tu m’entends, t’es avec moi ? »

Vérifier que la victime est consciente, c’est la première étape. Je reste près de lui, jette un coup d’oeil au reste de son corps ensanglanté, sans bien savoir par quel bout m’y prendre. Je ne suis pas médecin, si Love me fait une hémorragie, il n’y aura guère moyen de le savoir avant que ce ne soit trop tard.
Je m’étonne de me trouver si calme, pourtant c’est vrai, la vie de Marlon ne représente pas grand-chose pour moi sinon un lien ancien, presque périmé, avec V. S’il décède dans mes bras, au moins j’aurais essayé, ce qui est probablement plus que je n’en aurais fait pour la plupart des gens.
L’infirmière me spam d’indications et je grommelle d’un « je ne peux pas faire tout ça » alors que j’essaie de ne pas trop bouger Marlon pour éviter les blessures supplémentaires.

« Les secours vont bientôt arriver. »

Son sang me colle à la peau. Je peux presque sentir sa douleur. Si je tendais les doigts, je parie que je pourrais la toucher. Personne autour de nous.
Il n'y a que la nuit et le bruit de sa respiration.

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Le temps a repris mais il n’est pas tout à fait comme avant. Marlon a l’impression que tout dure des heures et une toute petite seconde à la fois. Qu’il est coincé dans cette voiture écrasée depuis toujours tout en ayant le sentiment que ça vient juste d’arriver. Il ne sait pas combien de temps se déroule entre le moment de ses premiers mots et les suivants. Il n’est même pas tout à fait sûr d’être conscient. En cet instant, il pense à ses frères qui l’attendent, à sa mère qui doit, elle aussi, avoir ce temps cassé comme seul allié. C’était donc comme ça qu’elle vivait depuis des années ? Est-ce que c’était possible de vivre coincé entre les aiguilles d’une horloge et faire comme si de rien n’était ? Et Susan, Susan, où elle était ? Tout se mélange dans sa tête alors que la douleur s’accompagne d’un horrible sifflement dans l’une de ses oreilles. Il a un peu envie de tousser mais pour le moment, son corps refuse de lui obéir.

Sans trop savoir comment, ni si c’est réel, il sent des mains qui l’attrapent. Il veut hurler à la personne d’arrêter, qu’il a trop mal, que c’est foutu, qu’il faut le laisser, mais il ne dit rien. Sa voix s’étrangle dans sa gorge et toute la douleur s’éclate à l’intérieur de chacun de ses vaisseaux sanguins. Marlon a du mal à respirer alors que ses yeux océan trouvent la nuit noir comme nouveau repère. Le monde est à nouveau à l’endroit. Qu’il songe alors que les étoiles, floues mais bien là, le regardent avec une mélancolie singulière. Encore une fois, il veut bouger, mais il est incapable d’y arriver. Il a froid, l’impression d’être rempli de crasse ou de boue. Il veut se relever et s’en aller. Au lieu de ça, c’est une voix familière qui vient se glisser à son oreille. Dieu ? Non, et puis quoi encore. Les mots semblent terre à terre, ce qui n’avait plus aucun sens semble enfin reprendre un cours normal. Les aiguilles de l’horloge à nouveau alignées, les tic et tac deviennent enfin à nouveau réguliers. Les mains de la personne toujours sur lui, l’avocat n’a pas la moindre idée de s’il a envie d’hurler, de pleurer, ou juste de fermer les yeux.

Ses paupières décident pour lui et la nuit noire se perd dans une obscurité tout à coup terrifiante mais la voix le ramène à lui. Son prénom, cette voix qu’il connaissait. Son cerveau n’est pas en place et tout se mélange là-dedans, pourtant il en est persuadé, il le connaît. Sa main glisse difficilement du long de son corps au contact de l’autre, par besoin d’être sûr qu’il était vrai. L’effort surhumain qui suit consiste à ouvrir les yeux pour retrouver ceux de l’inconnu connu et, malheureusement pour lui, l’accidenté met trop de temps à réagir alors l’homme enchaîne à ses côtés. Il veut parler, comprendre, maîtriser mais il n’arrive à rien de tout ça et au lieu de ça, ses yeux trouvent enfin, malgré le flou qui les entourent, le visage du sauveur à ses côtés. « Max. » Qu’il articule avec un grain sombre dans sa voix. S’il n’arrive pas encore tout à fait à retrouver ses esprits, le sentiment d’avoir été sonné comme un gong et d’encore vibrer du choc, il arrive à apercevoir du sang sur celui qui le tient. « T’es… blessé ? » Il n’avait pas souvenir d’une autre voiture, pas plus qu’il n’avait souvenir d’avoir vu Max aussi près depuis de longues années. Mais en cet instant précis, il n’avait aucune confiance en lui, en ce qu’il savait et ce qui était vrai. Il tousse alors que le brun semble parler à quelqu’un d’autre que lui et maladroitement il cherche à tendre sa main pour à nouveau l’atteindre, le toucher, pour vérifier que tout ça n’est pas un mauvais rêve éveillé.

Mais l’effort est fatigant et Marlon commence enfin à arrêter de vibrer. Le sifflement dans son oreille lui, ne semble pas vouloir cesser. Tant pis, il fera avec pour le moment. Les douleurs semblent avoir toujours été là et s’il souffre le martyr, pour le moment il n’a plus envie d’hurler. Il fallait s’en contenter. Son regard cherche à nouveau celui de l’ancien enfant timide et il articule avec difficulté. « Max… qu’est-ce qui s’est passé ? » Mais rien que respirer, rien que les petits mouvements le lancent partout. Il a l’impression qu’on lui a roulé dessus. Ses dents lui font mal, il a l’impression d’en avoir des bouts qui se baladent dans la bouche sans avoir le courage de les cracher. Son bras droit le lance mais il arrive à le bouger. Son dos le tire mais il sent absolument tout, de sa tête à ses pieds. Sa jambe gauche par contre, lui fait mal à en crever. Il a l’impression qu’une pointe traverse son mollet, que sa cheville n’est même plus là où elle était. Il veut voir mais il ne peut pas se relever seul. « Putain… » qu’il ajoute en toussant, un sourire blasé sur le visage. « Mes frères vont crever de faim. » Bon, ça visiblement il s’en souvenait. Le sifflement le gêne de plus en plus tout autant que cette sensation d’être dégueulasse mais il n’arrive pas à bien articuler ses pensées. La seule chose qu’il arrive à dire c’est : « Appelle pas Susan, faut pas l’inquiéter. » Pas après la semaine passée, pas après l’espoir de la retrouver.

Puis finalement… en étant un peu moins sonné, c’était pas si grave, pas vrai ? Encore quelques secondes et il allait pouvoir vagabonder comme si de rien n’était.




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You seem to replace
Your brain with your heart
You take things so hard
And then you fall apart


Tout ce sang…
Ça va être une vraie plaie à nettoyer. Je jette un coup d’œil critique à ma chemise qui n’a plus de blanche que le nom. Elle est bonne pour le pressing, si tant est qu’ils parviennent à la rattraper… C’est à ça que je pense alors que j’examine le corps de Marlon.
La blessure la plus importante est probablement celle qu’il a à la jambe. Il faudrait certainement faire quelque chose à propos de ça, pour éviter qu’il ne perde plus de sang et sa jambe dans le même éclat.
La voix de Marlon me parvient alors, faible et  déroutée et je repose les yeux sur son visage abîmé.

« Je ne suis pas blessé. C’est ton sang. »


Quel imbécile.
Est-ce vraiment le moment de t’inquiéter pour moi alors que tu es à moitié en train de crever sur le parvis ? Je ne comprendrais jamais ce genre de personne. Je viens toutefois poser ma main sur la sienne, pour l’empêcher de trop bouger, dans un geste de bon samaritain qui est loin de me ressembler. Une fois encore, je me demande ce que je fous là, surtout avec la tonne de boulot qui m’attend sagement dans ma voiture.
Passivement, je demande à l’infirmière ce que je dois faire pour la jambe de Marlon.
Je ne suis pas certain d’avoir envie d’obéir à ses indications, mais ce n’est plus vraiment comme si j’avais le choix maintenant. Si j’abandonne Love maintenant, après qu’il m’ait vu, et qu’il survit, je peux dire adieu à la bonne image que j’ai mis de si longues années à travailler.
Portable pris entre l’épaule et l’oreille, je retire ma cravate. Quel dommage, je l’aimais bien…Ce faisant, j’explique à Marlon :

« Tu as eu un accident. Ta voiture s’est retournée. »

Comment ? Pourquoi ? Pas la moindre idée. Je ne sais même pas depuis combien de temps Marlon est là. Ça ne peut pas faire bien longtemps s’il n’est pas mort vu l’état de ses blessures.

« Je vais devoir faire un garrot à ta jambe. Ça risque de faire mal, mais tu perds trop de sang, alors on doit faire quelque chose. »

Quand je dis « on », je parle de moi, car vu son état, Marlon ne va pas pouvoir faire grand-chose. À part me demander de ne pas prévenir Susan, ce qui, admettons-le, me fait froncer le museau, alors que j’approche de sa jambe.

« Ta sœur va me tuer si elle apprend que j’ai attendu pour la prévenir, tu en es conscient ? »

Je ne suis pas sûr qu’il soit bien conscient de quoi que ce soit en ce moment-même, pour être honnête. Je pose mon portable sur le sol et adjoint à Marlon :

« Je vais faire le garrot, serre les dents, d’accord ? »

Sans attendre davantage, j’utilise ma cravate – hors de prix ! Qui aurait mérité une fin bien meilleure que celle-ci !- pour la serrer autour de la cuisse de Marlon, juste au dessus du genou, comme l’infirmière me l’a indiqué. Une manœuvre en somme pas bien compliquée mais qui me donne quand même des sueurs d’angoisse. D’une main, j’essuie ma joue et, dégoûté, remarque que j’y laisse une traînée de sang.
Répugnant.
J’ai l’impression vague d’être à un sacrifice. C’est bien la seule image qui me vient en tête avec tout ce sang. Pourtant, c’est la première fois que j’essaie de sauver plutôt que de mettre fin au jour d’un être vivant. L’ironie de la situation n’est pas sans me faire rire jaune.
Une fois le garrot mis en place, je reprends mon téléphone et revient prendre la main de Marlon, comme pour le rassurer.

« De quoi est-ce que tu te souviens ? Tu sais ce qui a causé l’accident ? »

Ce n’est pas tant que ça m’intéresse plutôt le fait que j’essaie de le garder éveillé et conscient. Je ne sais pas où en sont les secours mais j’espère qu’ils ne vont plus tarder. D’une main, j’attrape ma veste pour la placer sur le corps de Marlon, histoire d’éviter qu’il nous fasse une hypothermie par dessus le marché. Une petite voix dans ma tête se demande pourquoi je fais tant d’efforts. Ce que ça va m’apporter.
Rien.
La voix est claire dans mon esprit. Je ne vais rien gagner à faire ce que je fais. Alors pourquoi je le fais ? La question trouble un instant mes sens et j’essaie de ne pas trop m’y intéresser alors que je sens poindre au fond de mes pensées la présence pesante de V.
Marlon n’est pas V. Ça ne sert à rien d’entretenir ce genre de pensées. C’est à peine s’ils étaient amis à l’époque et Marlon n’a plus fait partie de mon existence après le départ de V. Son visage m’a toujours rappelé cette période maudite et bénie où V. était encore avec nous et je dois bien reconnaître que même aujourd’hui, alors que Marlon est méconnaissable sous les blessures et le sang, c’est encore ces années qu’il ramène à moi.
Une brise légère s’élève et le froid me fait frissonner, m’ancre à la réalité et à l’odeur de sang et d’essence qui nous enveloppe.

« Tu es sûr que tu ne veux pas que j’appelle Susan ? Elle voudrait probablement savoir que tu as eu un accident. »

Je suis sûr que A. ne me le pardonnerait jamais si je lui faisais un coup pareil. Et si Marlon décède de ses blessures, c’est à moi que Susan ne pardonnera jamais, ce qui pourrait bien faire frein à ma carrière.

« Tu vas t’en sortir, mais ta famille va s’inquiéter de ne pas avoir de tes nouvelles. »

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La sensation dans sa bouche le dérange vraiment. Il voudrait pouvoir cracher mais ça lui demande trop d’effort, parler aussi mais pourtant, il ne peut pas s’empêcher d’essayer. Parce qu’il faut mettre du sens sur ce qui vient de se passer, il faut s’ancrer à la réalité. Max ne semble pas paniqué, sa voix est posée et le brun paraît concentré sur la voix lointaine que Marlon entend à peine. A la seconde où les mots s’échappent de ses lèvres, il oublie les avoir prononcés. La douleur reprend le dessus à chaque fois qu’il arrête de parler, les trucs qui se baladent dans sa bouche le gênent atrocement mais avant qu’il ne puisse le verbaliser, Max lui offre une nouvelle information. Son sang. Il doit avoir pris un sacré coup sur la tête parce qu’il a la drôle d’illusion qu’il y en a beaucoup, de son sang et ce n’est pas possible parce qu’il va bien. Sans trop réfléchir, rassuré de savoir que le sauveur n’est pas blessé il répond naturellement. « Tant mieux. » Il aurait pu développer, histoire de ne pas donner l’image qu’il est content de voir son sang étalé sur un mec plutôt qu’à l’intérieur de ses veines mais c’est trop demandant, trop prenant. Puis il n’a pas vraiment la lucidité pour réaliser ce qu’il dit, ce que ça peut amener.

La main de l’autre avocat vient rejoindre la sienne et c’est naturellement que Marlon cesse un peu de gigoter. Incapable de mesurer la gravité de la situation, son corps répond pour son esprit, là où rien ne fait sens, les réflexes prennent la relève. Les yeux bleus se perdent sur le visage connu et pendant quelques instants, sa mémoire se perd dans des souvenirs qu’elle pensait perdus. Il n’y a pas que le monde qui s’était retourné, son cerveau aussi en avait fait les frais. Max et Marlon n’avaient jamais été proches, pas même potes. Faut dire que celui qui avait ses lèvres qui bougeaient dans un flou relativement maîtrisé était plus jeune que l’accidenté. Pourtant, Marlon se souvient très bien de son cadet. Il faut dire qu’il appréciait vraiment l’aîné des Davidson, V. S’ils n’avaient jamais été de vrais amis, ils s’étaient compris dans les moments où le monde entier semblait ne pas le faire. Malgré les années, le fils Love avait gardé un grand respect et une certaine tendresse pour le frère de l’homme à ses côtés. Sa toux interrompt ses pensées et il s’apprête à demander à Max comment va V., comme si de rien n’était, mais avant qu’il n’ait réussi à sortir un son d’entre ses entrailles tuméfiées, le brun lui parle. Toute sa concentration volée par les mots, il oublie ses pensées. « Ma jambe ? » Qu’il articule difficilement dans sa bouche occupée. Il voudrait ajouter que ça va, mais il y arrive pas. Pourtant ça lui paraît insensé, si Max est calme, les mots qu’ils prononcent provoquent une certaine inquiétude sur son état de santé, mais il en est sûr, ça va aller.

Les pensées du blessé s’emmêlent et s’il parle, il ne s’en rend pas compte. Pas plus qu’il n’a tout à fait conscience de ce que Max a pu lui dire. Un accident ? Est-ce que c’est son imagination ou l’avocat lui avait vraiment dit ça ? C’est Susan qui prend rapidement toute la place dans sa tête, bien plus qu’un garrot, sa jambe ou tout son corps qui se rebelle contre le moindre micromouvement. Les relations avec sa cadette n’étaient pas au beau fixe et il voulait tellement tout arranger qu’il refusait même l’idée de pouvoir rajouter ne serait-ce qu’une mini dose de stress à sa juge préférée. Max, lui, ne semble pas de cet avis. Les mots du brun l’atteignent sans vraiment le toucher et il répond, sans y penser. « On attend. » C’est tout ce qu’il arrive à sortir avant de tousser à nouveau et Max lui, continue à vivre trop vite pour lui. Les directives le font acquiescer - enfin, est-ce qu’il a vraiment bougé, du moins il a songé à acquiescer - sans pour autant qu’il soit capable d’écouter. Dans un soupir il ajoute, toujours gêné pour parler. « Une fois… debout. Je l’appellerai. » Oui bon, personne n’a dit qu’il était très rationnel.

Avant qu’il ne comprenne les informations que Max lui avait donné, il sent une pression énorme contre sa cuisse et cette fois-ci, il hurle à plein poumons, crachant au passage, du sang, une dent, il n’en a aucune idée. Les larmes lui montent aux yeux et toute cette douleur devenue d’un coup si forte se calme et son envie de fermer les yeux revient de plus belle. Avant qu’il ne puisse le faire cependant, une main saisit la sienne et le contact chaud contre sa peau lui fait un léger électrochoc. Les pupilles se butent à nouveau contre Max, étrangement toujours là, comme si Marlon avait encore du mal à croire que tout ça soit tout à fait vrai. La question qu’il pose le laisse perplexe, si les méandres de son crâne divaguent entre souvenirs et inquiétudes complètement aléatoires, il a du mal à remettre des mots ou des images sur ce qu’il s’est passé. Il essaie, sa bouche un peu plus dégagée, sa voix un peu moins encombrée même si c’était encore loin d’être parfait. « C’est… Curtis. » C’était bien Curtis qui l’avait appelé, non ? « Les jumeaux… ils avaient faim. » Bon, c’est un souvenir comme un autre. « J’allais… leur proposer un fast-food. » Est-ce que c’était ça la question de Max ? Ce qu’il comptait faire manger à ses petits frères ? Il savait plus vraiment mais il était pas capable de se souvenir autrement, donc il faudrait s’en contenter.

Alors qu’il galère toujours à aligner ses mots, il sent un poids, sur le coup trop lourd mais très vite réconfortant sur lui. Ses doigts lâchent la main de Max pour trouver la matière que ce dernier vient de poser sur lui. « Tu vas la tâcher. » Qu’il dit tout simplement, comme si l’avocat n’avait pas conscience de ce qu’il faisait. « Je la donnerai au pressing. » Qu’il ajoute, comme si c’était le moment. Sur l’instant, Marlon oublie totalement ce qui est en train de se dérouler et à nouveau, il s’emmêle dans ses propres pensées. Une fois de plus, son collègue le ramène à la réalité, la mention du nom de sa sœur comme rappel immédiat du réel, ancre plus forte que tout ce qui pouvait exister. Il rassemble ses pensées, son courage et l’énergie sporadique qui le compose entre les vagues de douleur pour lui répondre mais le brun en rajoute une couche. « Attends. » Sa main cherche à attraper son portable mais ses mouvements imprécis et douloureux ne le mènent à rien du tout. « Mon téléphone. » Il n’est absolument pas clair mais il donne tout ce qu’il peut. Un soupir, sa tête cogne alors que son oreille siffle de plus en plus fort. A moins que ce soit une sirène. « Le bruit. » Il essaie de froncer les sourcils mais ça aussi, c’est trop compliqué même si le cœur y est. Il reprend, sans trop savoir ce qu’il entend. « Dès que j’ai repris un peu… » de forces « J’appelle, j’te promets. » Le bruit se rapproche de plus en plus et Marlon voudrait poser ses mains sur ses oreilles sans pour autant faire le moindre mouvement pour que ça se réalise. « Faut juste, deux secondes. » Il tousse un peu et dit : « Max, toi ? T’as mangé ? »



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Tears running dry, shattered inside, but I still gotta smile
As I'm sinkin', I relive the story
Glitter comes off, battered and blue, but I gotta go on
As I'm singin', I rewrite my story


Si j’avais su que ma soirée se terminerait de cette façon, j’aurais probablement fait en sorte de mieux me préparer. J’aurais certainement regardé des vidéos de premiers secours sur Youtube à ma pause repas au lieu de faire des heures supp et j’aurais emporté une de ces couvertures de secours que je laisse au bureau lorsque les affaires se prolongent tard le soir.
Ou peut-être bien que j’aurais fait un détour pour ne pas passer par cette route.
Mon regard se pose sur Marlon et je peux entendre V. me dire d’ici que je ne peux pas le laisser mourir. Que je n’en ai pas le droit. Que je lui dois bien ça. Et il aurait bien raison. Ne serait-ce que pour V., je dois m’assurer que Marlon survivra.
L’espace d’un instant, l’image de V. se superpose à celle de Marlon et je nous revois tous les deux, dans la salle de bain alors que j’essuyais le sang du visage tuméfié de mon frère et pansait ses blessures. Je revois son sourire grimaçant et ses yeux tristes, ses poings serrés sur ses genoux. Je ressens l’impuissance dans mes veines, comme un poison qui détruirait lentement mais sûrement notre relation.
J’étais trop jeune à l’époque pour faire quoi que ce soit. Trop jeune pour comprendre ce que je devais faire, comment, pourquoi, prisonnier encore de cette illusion que la vie finirait forcément par récompenser ceux qui agissent bien.
La vérité c’est que la vie est une connasse et qu’elle frappe au hasard, sans se soucier des bonnes actions. Le karma lui-même ne rattrape pas forcément ceux qui le provoquent. La preuve en est que sinon, c’est moi qui serais allongé sur le béton, et non pas Marlon.

On ne se connaît pas bien, Marlon et moi. Mais c’était un ami de V. et pour l’avoir croisé parfois, au tribunal, je sais qu’il est ce qu’on appelle couramment « quelqu’un de bien ». Comme pour prouver que j’ai raison, alors qu’il est allongé dans son sang, cet idiot est plus préoccupé par l’idée d’inquiéter ses proches que par son propre état. Je secoue doucement la tête, désabusé par la situation, presque agacé par son altruisme.
Même alors que la douleur le traverse alors que j’exécute le garrot, ses pensées ne semblent pas vouloir s’arrêter sur lui-même. Son abnégation lui donne l’allure d’un saint et pour le sataniste en moi, je dois dire que c’est irritant.
Je suppose que tout le monde ne peut pas être aussi pourri que moi.

Marlon m’explique qu’il allait emmener ses frères manger et bien que ça n’ait absolument rien à voir avec ce que je lui demandais, je ne bronche pas. Je pense moi-même à A. qui va probablement finir par se demander où je suis passé. Je note mentalement de l’appeler dès que j’aurais regagné ma voiture.

« Ne t’inquiète pas pour ma veste, ce n’est vraiment pas la priorité. Est-ce que tu as froid ? Je dois avoir quelque chose dans ma voiture pour te couvrir. »

Je dis ça, mais c’est vrai que le pressing m’a aussi traversé l’esprit. La preuve s’il en est que nos personnalités ne pourraient pas être plus différentes.
Souvent des choses tragiques arrivent à des gens biens.
Alors que je songe à appeler Susan, Marlon m’arrête une nouvelle fois et je me demande ce qui peut bien le retenir de prévenir sa sœur. Ça ne peut pas être qu’une question de ne pas déranger. Déjà à l’époque, Marlon était très proche de Susan, comme deux doigts d’une main, inséparables. Ça me paraît inconcevable qu’il ne veuille pas que sa sœur soit au courant, soit là alors qu’il a besoin d’elle. Mes sourcils se froncent légèrement.

« Je crois qu’il vaut mieux que tu ne bouges pas trop pour l’instant. Tu as sûrement des os cassés. »

L’infirmière a été claire sur ce point. Le moins de mouvements possible. Le fait que j’ai traîné Marlon hors de sa voiture était déjà dangereux en la matière. Love attire mon attention sur le son qui résonne au loin et je redresse la tête, tends l’oreille.
Une sirène.
L’ambulance sera là d’une minute à l’autre. Rassuré par cette pensée, c’est à peine si j’entends la question de Marlon. Non, disons plutôt que j’ai du mal à croire que je l’ai entendu. Est-ce que j’ai mangé ? C’est vraiment ce qu’il vient de demander ? Je retiens de justesse un rire ironique.
Il est pas croyable ce mec. Il est en train de se vider de son sang et ce qui l’inquiète est de savoir si j’ai mangé ??? Non, vraiment, je crois que nous ne nous comprendrons jamais.
Avec douceur, je réponds :

« J’ai mangé. Tu peux arrêter de t’en faire pour moi et penser plutôt à toi. L’ambulance arrive. Je te retrouverai à l’hôpital, d’accord ? »

La lumière du gyrophare vient bientôt nous éclairer et je me félicite d’avoir laissé mes phares allumés, sans quoi elle nous serait probablement passé à côté. Je lâche la main de Marlon alors que les infirmiers se précipitent vers lui avec une civière et une trousse de secours.
Mon travail de sauveteur s’arrête là, mais la nuit n’est pas terminée. J’explique rapidement la situation au policier qui les accompagne, comment j’ai trouvé la voiture retournée, avec Marlon à l’intérieur, sans plus de détails sur comment ça s’est produit.
Le temps que ça me prend, Marlon a été embarqué et je signale aux infirmiers que je vais les suivre avec ma voiture. Techniquement, je pourrais m’arrêter là, rentrer chez moi pour prendre un bon repas chaud avec A., mais un petit quelque chose en moi me pousse à rester avec Marlon, jusqu’à ce que je me sois assuré qu’il va aller bien.

Une fois dans ma voiture, j’allume une cigarette et mets mon oreillette pour téléphoner à A. C’est avec une pointe de chagrin que je tombe sur son répondeur. Je me rends compte que j’aurais voulu entendre sa voix, comme pour me remettre dans la réalité, effacer l’odeur du sang et les tremblements de Marlon.

« C’est moi. Il y a eu un imprévu sur la route, je ne vais pas rentrer tout de suite alors ne m’attends pas. Je te raconterai. »

Je tire sur ma cigarette et martèle le volant du bout des doigts, prenant seulement conscience de l’anxiété qui m’habite et ça m’arrache un rire jaune. Pourquoi est-ce que je m’inquiète ? Je le connais à peine ce type. Il ne représente rien pour moi. Son sort ne devrait pas me préoccuper.
Mon sourire disparaît et je me concentre à suivre les petites lumières clignotantes de l’ambiance en me demandant ce qu’il peut bien se passer derrière ses portes.

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L’esprit de Marlon s’embrouille et s’embrume au rythme de la douleur et de son cœur qui bat un peu partout dans son corps. Tout se mélange et perd son sens, celui qui avait retrouvé l’envers de l’endroit n’était pas vraiment certain que tout ça soit réel. C’était sans doute un moyen de se protéger de la violence de l’accident qui venait d’avoir lieu, ne pas réaliser, se focaliser sur des détails bien particuliers. Love n’avait aucunement la force d’analyser ce qui était en train de se passer et chaque seconde était une nouvelle surprise dans la tête du traumatisé. Fatigué, il rebondissait comme par magie sur les propos de celui venu le sauver. Sans trop savoir pourquoi il ne cédait pas à fermer les yeux, Marlon continuait pourtant de s’accrocher. Et ça, même s’il était tellement fatigué.

Max parle trop, peut-être qu’il ne parle pas trop mais pour Marlon, en cet instant, c’est trop. Il a du mal à suivre et surtout à saisir les informations que l’autre lui délivre. Il se perd un peu trop dans les méandres de son propre crâne pour s’accrocher entièrement à l’autre à ses côtés. Des bribes lui parviennent, comme des échos plus ou moins lointains. Les yeux bleus cherchent le rivage dans le visage à ses côtés et il tente, comme si les vagues n’essayaient pas de le noyer. « Elle est confortable, ta veste. Elle a dû te coûter cher… Vraiment, le pressing. » La toux et la respiration saccadée toujours comme accompagnement dans sa voix, l’avocat tente de bouger, toujours très peu conscient de ce qui vient d’arriver. Mais son corps ne suit pas, les gestes s’activent dans son crâne et pourtant dans ses yeux, dans ses muscles il sent bien que la suite ne vient pas, du moins pas comme il voudrait. Davidson lui parle d’os cassés et Marlon ne relève pas. Au lieu de ça, il soupire et reprend. « J’crois que j’ai un truc dans les dents. » Bon, pourquoi pas, même si ce n'était pas tout à fait vrai. Ce qu’il sentait contre ses dents, au-delà du sang, c’était… des dents. Mais avant qu’il n’en dise plus, ou qu’il relève autre chose dont tout le monde se fout, un bruit vient lui agresser son oreille déjà fatiguée.

Il voudrait demander au brouhaha de se taire mais au lieu de ça, c’est une autre question qui traverse ses mâchoires tuméfiées. Les yeux rivés sur son interlocuteur, vraiment intéressé par la réponse, presque même inquiet de ce qu’elle pourrait donner, il écoute comme si sa vie en dépendait. « Ambulance ? » Qu’il répond alors qu’il ne comprend toujours pas pourquoi Max semble si inquiet. Il a envie de lui dire que ce n’est pas la peine et qu’il n’a pas besoin d’aller à l’hôpital mais le temps que les pensées s'alignent, c’est déjà trop tard. Le bruit est très près, le sifflement dans ses oreilles le fait froncer du visage alors que ça lui fait vraiment mal. La main chaude de Max quitte la sienne et, complètement perdu, Marlon se retrouve au milieu de voix inconnues. Il sent les gestes contre lui, on lui parle. Les mains sur sa peau le dérangent mais il est incapable de le dire. En cet instant, il veut Susan, elle, elle comprendrait. Une larme coule contre sa joue alors que l’odeur du latex vient se mêler à celle du sang, touchant chaque partie de son corps. On le soulève et le blessé ne sait pas s’il hurle réellement ou s’il pense juste à le faire. Toujours conscient, même si pas totalement présent, il se retrouve tout à coup face à beaucoup de blanc. Les yeux se ferment par réflexe tandis que la chaleur environnante vient l’embrasser avec une douceur qu’il est incapable d’apprécier. Pendant un instant, un tout petit instant, alors que les portes du véhicule claquent, il se sent bien, il va bien. Puis une main vient retirer la veste de Max qu’il avait posée sur lui et dans un réflexe, cherchant à tendre une main qu’on lui retient, il dit : « Attendez… le pressing. »

Les rires ne lui parviennent pas totalement, pas plus que tout ce qui se dit autour de lui. On lui parle de Max un peu, de sa chance, et on lui demande son nom. « Marlon. » Ca, il le savait. Le reste, c’est un peu flou et il n’a plus tellement le courage de se concentrer. Les questions n’ont même plus la force de traverser sa tête, alors quand un homme lui explique qu’ils ont récupéré son téléphone et qu’ils vont appeler son contact d’urgence pour qu’on le rejoigne à l’hôpital, il s’agite. « Non ! » Des mains le retiennent et son propre corps refuse de suivre son accès de panique. « Faut pas l’inquiéter ! » On lui dit de se calmer, que tout va bien aller. Et puis on lui pose des trucs et d’autres, un peu partout, on lui dit de respirer, que ça va bien se passer. Love a du mal à se laisser aller, il dit, entre ses dents encore en place « Les jumeaux… » et on lui demande d’arrêter de parler, d’arrêter de forcer. Quelques instants il pense lutter. Des mois qu’il se bat contre la fatigue et qu’il gagne, parce qu’on a besoin de lui, c’est pas des inconnus habillés bizarrement qui vont le faire changer. Pourquoi aujourd’hui serait différent ?

« Allô ? Mademoiselle… Je suis désolé je n’ai pas votre nom. » Susan, elle s’appelle Susan. « Je… je vous appelle parce qu’il semblerait que votre frère? Un certain “Marlon Love” ait eu un accident. On le transporte à l’hôpital, est-ce que vous pouvez nous rejoindre là-bas ? » Non, arrêtez. Faut qu’elle se repose, Susan a pas besoin de ça. Laissez… Lai…

Lorsqu’il se réveille, Marlon a un mal qui lui traverse le corps entier et surtout, l’impression d’avoir un poids sur lui. Ses yeux peinent à rester ouverts et lorsqu’il regarde l’environnement autour de lui, il est incapable de le reconnaître. L’odeur le dérange mais moins que ce poids partout sur lui. Son cerveau cherche à réunir les informations, à comprendre ce qui se passe mais l’effort est trop éreintant. Le monde bouge autour de lui et il a la drôle d’impression de ne pas en faire partie. Puis un bruit lui attire l’oreille et avec beaucoup de difficultés il se tourne pour voir un visage connu. « Max. » qu’il dit, avec une douleur dans la mâchoire qui lui donne envie de la saisir entre ses doigts, sauf que ses mains sont trop lourdes pour être soulevées. « Je… quoi ? » Bon, c’était pas très clair. Marlon se concentre et reprend, cherchant à apprivoiser la douleur. « On est où ? Pourquoi… toi ? » Ouais, pas fou non plus mais ça fera l’affaire.

Autour de lui, la salle n’est pas une chambre, ça s’apparente plus au couloir. Le monde va trop vite et si des discussions floues lui viennent en tête, il ne comprend pas ce qui a pu se passer. On dirait qu’il attend, couché, avec quelque chose de lesté sur lui, pourtant, il ne sent qu’un drap contre ses doigts. « J’ai mal. » Qu’il balance, pas forcément à Max, juste comme ça. Alors que des blouses leurs passent à côté et qu’il entend des mots comme “opération”, et “bientôt prêt” sans en saisir le sens. Mais pourquoi Max est là ? Max n’a pas à rester avec lui comme ça. « Max… faut que tu… » Quoi, exactement ? Il n’a aucune idée de ce qui se passe ni de quelle heure il est. Pourtant, il se doute que Max a mieux à faire. A moins qu’il n’attende sa veste ? C’est sans doute ça, ça, Marlon s’en souvient, il avait sa veste, sans doute que c’est ce que Max attendait. Mais où était cette veste ? « Ta veste… Où j’ai mis ta veste… » Il cherche du regard autour de lui, la révélation divine, quelque chose qui va le ramener à tout ce qui vient de se passer mais au lieu de ça, une pensée lui traverse la tête. « On devrait manger un big mac. On mange pas assez de big mac toi et moi. » Et bien, voilà, ça c’était dit.




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Je n'ai plus honte il faut que tu saches, assez
De toutes les plaies que l'on cache
Et de tous les cris que l'on garde en soi
Tout ce mal qu'on se fait par amour


Dans la voiture, tout est calme. Trop calme. Sans A. ou même les babillements de Marlon pour meubler l’atmosphère, le silence s’installe, simplement perturbé par le grésillement doux de ma cigarette et le bruit subtile du moteur. La nuit rafraîchit l’air et me fait frissonner. Quelle drôle de soirée pour aller s’écraser. Marlon a bien choisi son moment. Sans doute qu’un soir d’été eût été plus agréable, mais je suppose que le destin n’attend personne. Je me demande bien comment l’accident a eu lieu. Marlon n’a pas parlé d’une personne ou d’un être vivant, alors j’imagine qu’il n’essayait pas d’éviter quelque chose. Il n’avait pas non plus l’air ivre ou défoncé et croyez-bien qu’en ayant vécu avec Gary toutes ces années, c’est un état que je sais parfaitement reconnaître.

Je tire une taffe.

Est-ce qu’il a perdu le contrôle de son véhicule ? La fatigue peut-être ? Ou un dysfonctionnement des freins ?
Tous ces questionnements n’ont d’importance qu’ils occupent mon esprit alors que je roule lentement derrière l’ambulance. Ça m’évite de penser à V. même si celui-ci rampe doucement dans ma conscience, comme un serpent vicieux. J’entends sa voix, dans le fond de mon esprit, comme un écho qui se répercuterait. T’as fait ce que tu pouvais, Max. Les yeux mélancoliques de V. et toujours ce sourire triste au coin des lèvres me reviennent. V. ne perdait jamais le sourire, même dans les pires situations. A. et lui sont d’éternels optimistes, je suppose que c’est dans les gènes de Gary, ceux-là même qui m’ont été épargnés.
T’as fait ce que tu pouvais.
Si V. me voyait maintenant, est-ce qu’il serait fier de ce que je suis devenu ? Un avocat renommé, certes, mais celui qui défend les gens comme Gary. Les agresseurs, les ivrognes et les junkies. V. toi qui avais promis de nous protéger contre ce genre de personnes, qu’est-ce que tu penserais de moi alors que je suis passé dans le camp de ceux que tu abhorrais ?
Mes doigts se referment sur le volant, phalanges blanches sous la tension. Et alors ? Et alors si je défends des monstres ? De quel droit V. pourrait me juger, lui qui est parti en nous laissant derrière ? J’ai fait ce que j’avais à faire pour qu’A. puisse s’en sortir, qu’elle fasse des études et n’ait pas à souffrir pour nos parents. Pour sûr que notre mère n’aurait pas bougé le petit doigt. Si j’ai dû devenir l’ennemi dans le process, eh bien, ça en valait la peine.
Nerveusement, je porte la cigarette à mes lèvres.
J’ai fait ce que j’avais à faire, V. ne me regarde pas comme ça.

L’ambulance tourne à un carrefour et je la suis sans me presser alors qu’elle se gare dans le parking de l’hôpital. Ils ont dû prévenir Susan maintenant. Ça m’enlève au moins un poids à faire. Qui sait ce qu’elle aurait pu me reprocher si j’avais dû lui téléphoner personnellement.
Je me gare finalement et reste un moment là, dans le silence de la nuit. La braise au bout de ma cigarette luit faiblement dans l’obscurité. Je prends une minute pour reprendre le cours de mes pensées et chasser V. là où est sa place, très loin de mon esprit.
Marlon n’est pas V.
J’ai beau me le répéter, j’ai du mal à dissocier.
J’écrase finalement ma cigarette dans le cendrier, à côté des autres et passe une main dans mes cheveux pour me recoiffer. Me remettre en place. Dans le rétroviseur intérieur, mon reflet me renvoie l’image d’un homme qui pourrait sortir d’un massacre. J’ai l’air fatigué, et le sang de Marlon souille aussi bien ma chemise que mon visage. J’essaie de l’enlever, sans résultat. Il a déjà séché.
Un soupire m’échappe et j’abandonne ma voiture pour m’aventurer dans les couloirs de l’hôpital. En suivant les indications des infirmières, il ne me faut pas bien longtemps pour retrouver Marlon qui attend pour son opération d’urgence.

Autour de nous, le monde est en effervescence, les infirmiers et les médecins vont et viennent. Il n’y a pas une seule seconde d’hésitation ou de repos. Il y a toujours une urgence et Marlon fait partie d’entre elles. J’observe un instant le monde autour de nous, cette agitation, cette impatience, et le professionnalisme du personnel.
Finalement, la voix de Marlon me tire de ma léthargie et je me tourne vers lui. Il a l’air déboussolé et qui pourrait lui en vouloir ? La situation, de son point de vue, doit être extrêmement confuse, c’est en tout cas ce que je ressens d’ici.

« On est à l’hôpital. »

Une infirmière passe près de moi, me prévient que Marlon va bientôt passer sur la table d’opération et je hoche sans bien trop savoir quoi dire. Je ne suis pas de la famille de Marlon, je ne suis même pas un proche ou un ami, juste un inconnu qui l’a trouvé sur le bord de la route. Je me tourne quand même vers Marlon.

« Ils vont bientôt s’occuper de toi. »

C’est tout ce que je peux dire.
Tout ce qu’il y a à dire de toute façon. Je n’ai aucun mot pour rassurer Marlon. Je regrette que Susan ne soit pas là pour s’occuper de son frère. Je suis sûre qu’elle aurait les mots pour soulager sa peur et sa peine. Mais il n’y a que moi. Alors quand Marlon me sort son histoire de fast food, je ne peux m’empêcher de rire.
Alors que tout le monde s’inquiète pour lui, la seule chose qui lui vient est de me parler de nourriture et de ma veste. Qu’est-ce qu’il peut bien se passer dans sa tête ? Franchement je me pose la question. J’admire autant que je déteste Marlon. La question se pose dans ma tête.
Il est ce que j’aurais aimé être. Ce que je serais peut-être devenu sans Gary, sans le départ de V.
Non.
Je n’ai jamais été aussi altruiste. C’est irritant.
Ma main se pose sur celle de Marlon.

« Ok, alors disons que tu me devras un big mac quand tu sortiras d’ici, ça marche ? »

Je ne mange pas de big mac. Disons plus. J’ai arrêté une fois que j’ai été en contrôle de mes finances. Ça fait très longtemps que je n’ai pas mis les pieds dans un Mac Do, je n’emmène A. que dans les meilleurs restaurants. Pourtant le goût me manque parfois. Comme un vieux relent d’autrefois. Voyant que les infirmiers s’approchent de nous, j’ajoute pour Marlon :

« T’as intérêt à t’en sortir, j’attendrais mon big mac. »

Je ne sais pas si je dis ça à Marlon ou à V.
Peut-être un peu les deux, comme si ça pouvait ramener V. à moi, alors que je sais que c’est impossible. Les infirmières s’emparent du lit de Marlon, me bousculent pour prendre ma place et je me retrouve comme un étranger dans le couloir. Un type qui n’a pas sa place ici. Pourtant, à l’encontre de Marlon, j’enjoins, plus fort :

« Je t’attendrai ! »

Comme si ça avait plus de chance de le voir sortir en vie.
J’en sais rien. Je ne suis pas doué pour les prédictions, je ne suis pas Madame Irma, ça n’est pas mon métier. Je ne suis que moi. Et je dois faire avec les incertitudes de la vie.  

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C’est nuageux dans la tête de Marlon. Il ne sait pas trop s’il flotte sur un nuage ou si son corps s’enfonce tout au fond de l’océan. Le nuage est différent de ces quelques minutes juste avant. Blanc, immaculé, aseptisé. Un nuage sur lequel il n’a pas trop envie de flotter. Les étoiles lui manquent, le bruit des arbres et le silence de la nuit aussi. C’est bizarre aussi, sans trop qu’il comprenne pourquoi. Ses pupilles ont du mal à s’accommoder des néons trop blancs au plafond qu’il semble s’acharner à fixer. Heureusement pour lui, entre l’obscurité et la lumière, quelque chose n’a pas changé : Max est toujours à ses côtés. Comme point de repère, comme seul rappel du réel, la voix de l’avocat suit la sienne de près. Calme, doux, elle détonne avec l’agitation ambiante. Marlon se raccroche à ça, à Max, parce que c’est la seule chose qu’il est capable d’encaisser en cet instant précis. Il soupire. L’hôpital. Il a du mal à comprendre, toujours incapable de remettre ses souvenirs en place. Une cassette mal rembobinée, un disque dur rayé. Des informations manquantes, pourtant essentielles, qui semblent vouloir se planquer.

La voix de Max s’élève encore et cette fois-ci, sans être capable de reconstituer le puzzle, Marlon y ajoute une pièce, une pièce qu’il tenait depuis un moment maintenant mais qu’il refusait d’accepter. « C’est pas si anodin, hein… » C’est pas vraiment une question, plutôt un constat. Aussitôt fait, aussitôt oublié pourtant. Les drogues lui embrouillent sa cervelle déjà bien amochée et ses frères lui reviennent en tête, ou plutôt le fait qu’il faut les faire manger. Ils n’ont pas mangé. Alors Marlon pense à manger, à toutes ces fois où il a oublié, s’est privé ou s’est contenté d’un sandwich vite fait et il sait que l’homme à ses côtés n’est pas mieux. Métier prenant, vie occupée. Alors il balance la première chose qui lui passe par la tête : ils devraient penser à manger, pas pour se nourrir, mais pour se faire plaisir. Au moins une fois. Le rire de Davidson lui donne envie de sourire, il essaie mais les bleus commencent à se former et son visage répond de moins en moins à ses ordres pourtant parfaitement donnés. Qu’importe, le cœur y est. Comme en réponse au sourire invisible, la main chaude qui l’avait tenu éveillé se pose une fois de plus sur la sienne. Soulagé, Marlon ne peut exprimer combien il est content que Max soit à ses côtés. Bizarre, inexplicable mais aussi indiscutable. Le brun lui avait sauvé la vie, à son échelle de conscience, Marlon le savait et malgré lui, avoir toujours la main de Max auprès de lui signifiait qu’il était bel et bien encore en vie.

Le sourire se glisse entre les hématomes alors que Max ne se contente pas d’un rire mais lui propose un deal. Bien, alors ils iront manger un big mac. « Deal. Et le pressing. » Qu’il rajoute sans même y penser, étrangement obsédé par ces deux seules idées. Peut-être parce que c’était plus facile que tout ce qui l’attendait. Honnêtement, Love serait bien resté comme ça encore un moment. C’était un peu reposant, probablement parce qu’il était drogué et que son corps, bien que lourd, vivait. Mais le monde était trop rapide et ne l’avait pas attendu pour avancer. Alors que les mots de Max semblent d’une gravité qui l’atteint en plein cœur sans qu’il ne sache trop pourquoi, Marlon se retrouve éloigné de la main qui lui montrait la réalité. On lui parle, on l’éloigne de la voix de sa raison, on l’éloigne de tout, et puis on lui dit ça va aller.

Encore une nouvelle ambiance, il l’aime encore moins que la précédente. Bien moins bruyante mais beaucoup plus pesante. Y a quelque chose dans l’air, alors qu’il entend ces voix qui parlent de lui, sans lui parler à lui. « Vous avez fait des radios ? » « Pas le temps doc, il avait perdu trop de sang. » « A l’aveugle alors. » Voilà qui est rassurant. L’avocat voudrait protester, expliquer aussi son métier. Peut-être qu’ils y réfléchiraient. Mais ses yeux se ferment, tout devient noir et les voix s’éloignent. L’océan l’engloutit et il s’enfonce, s’enfonce, jusqu’à lâcher.

☾☾☾


« Monsieur Love ? » Les yeux de Marlon s’ouvrent avec difficulté, comme si on le sortait du plus profond sommeil de sa vie. « Tout s’est très bien passé. Vous nous avez fait un peu peur mais vous allez vous remettre ! » Il veut répondre mais les mots ne sortent pas, par contre, l’infirmière semble ne pas s’arrêter de parler. Elle lui explique en détail ses blessures, qu’ils ont dû mettre des broches dans son tibia et sa cheville, mais que tout est en place, à l’intérieur. Elle lui explique qu’ils ont bien observé les hématomes les plus violents mais que, heureusement aucun organe n’était touché. Il a une côte fêlée, une épaule luxée, un poignet avec une entorse, la gueule en vrac et deux dents pétées. Elle dit qu’il faudra aller voir le dentiste mais qu’il faut que sa mâchoire se remette. Elle parle, elle parle, donne des informations et Marlon, n’en écoute pas la moitié. Il a mal à la gorge et elle lui dit que ça va passer. Alors il finit par enfin réussir à marmonner. « Ma… sœur ? » et l’infirmière lui fait un énorme sourire.

Susan l’attend dans sa chambre, elle s’est occupée de tout, il n’a pas à s’en faire, on va bientôt le remonter. Et puis, son ami aussi est resté. Son ami ? Quel ami ? Visiblement, l’homme a charmé l’équipe et elle ne cesse de faire d’éloges sur ce dernier, puis ça lui revient. Max, Max lui avait sauvé la vie. Putain, ça, jamais il aurait deviné. Les minutes durent un peu et après divers longs discours sur tout et rien dont Marlon ne retient… rien, il est enfin amené jusque dans une chambre. Son corps est encore lourd mais différemment d’avant. Il a l’impression qu’on l’a utilisé comme une poupée de chiffon et posé sur ce lit une fois qu’on en avait terminé. Arrivé dans sa chambre, on l’installe confortablement, autant que possible et on lui dit d’appeler s’il a besoin de quoique ce soit. Il faut qu’il se repose.

La porte se referme avec les blouses blanches derrière elle et quasiment instantanément, on se met à frapper. « Entrez. » Sa voix est rauque, comme enrouée. Il n’en fait pas cas alors qu’il tente désespérément de s’appuyer sur sa main qui n’a pas d’attelle - mais une perfusion - pour se redresser. Frustré, il relève les yeux pour trouver Max face à lui et pour la première fois depuis les heures qui les ont réuni, il comprend enfin un peu vraiment. « Oh putain. » Qu’il lance du cœur tout en faisant une grimace, sa mâchoire lui faisant un mal de chien à chaque fois qu’il ouvre un peu trop la bouche. « Tu vas bien ? » Peut-être qu’il avait déjà posé la question mais il ne s’en souvenait pas et franchement, vu la tête de Max, on pouvait lui pardonner de demander. Il sourit, les souvenirs flous et mêlés dans sa tête, pas trop capable de mesurer le vrai du faux et même, tout ce qui s’était passé. « T’étais pas obligé. » Il tente de parler sans trop ouvrir la bouche, les grimaces accompagnent quand-même les mots tandis qu’il soupire en imaginant sa tête - toujours à vouloir se relever sans y arriver. « J’veux dire, merci… Merci Max. » Il est sincère, ses yeux bleus et gonflés se posent sur ceux du sauveur et il tente un sourire, tant bien que mal, avant de dire. « … On m’a pas dit que Susan était là ? Pourquoi elle est pas en train de me hurler dessus ? » Au moins, Marlon reprenait ses esprits, c’était déjà ça de pris.

Pourtant, il ne semblait pas avoir encore conscience de l’accident, de ce qui s’était passé vraiment…



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Vengeance & mercy don't live side by side
So in retribution I abide
I'll tip the scales to justice's end but can it make amends?


C’est pas si anodin, en effet Marlon. Mais à quoi ça servirait de lui dire, sinon à l’inquiéter ? Alors je me tais, j’étouffe les mots que je voudrais dire. Il faut dire que j’ai l’habitude, l’honnêteté n’est pas ma plus grande qualité. À chaque étape de ma vie, j’ai menti pour m’en sortir et ça n’est pas très différent aujourd’hui. Ça ne me coûte rien d’apaiser sa conscience, ne serait-ce qu’un peu.
Je me dis que c’est pour le bien de mon image, que ma réputation a besoin que je sois agréable, pourtant je sais que c’est plus profond que ça. Ce sont des années passées à ne pas protéger V. qui remontent à la surface, comme un vieux démon qui viendrait régler ses comptes.
Marlon n’est pas V..
J’ai beau me le répéter, ça n’imprime pas. Est-ce que c’est parce qu’ils étaient amis ? Est-ce à cause de ça que je me comporte de cette façon ? Je dois avouer que mes propres réactions m’irritent. J’ai sacrifié des gens, mon propre père adoptif, il est trop tard pour se montrer sentimental. Trop tard pour avoir des émotions. Trop tard pour les regrets, et de toute façon, je me suis toujours considéré trop bien pour ce genre de sentiments faibles.
Je tâche de m’en rappeler alors que la chaleur de Marlon se diffuse entre nos mains. Est-ce qu’il va mourir ? L’éventualité m’effleure pour la première fois depuis que j’ai découvert les lieux de l’accident, aussitôt chassée par la certitude que Marlon va s’en sortir. De toute façon, il a promis pour le big mac.
Même s’il est vrai que les gens ne sont jamais très forts pour tenir les promesses qu’ils me font.
Est-ce que c’est Marlon qui tremble, ou bien c’est moi ?

Mais voilà Marlon qui s’éloigne, et me voilà, seul. À nouveau. La solitude s’abat sur mes épaules, accompagnée par le brouhaha de l’hôpital et soudain, c’est trop.
Je m’échappe, rejoins le parking et tire une nouvelle cigarette comme pour calmer mes nerfs. L’ombre de V. pèse sur mon dos et j’ai l’impression de ne pas pouvoir m’en éloigner. Où que j’aille, V. me suit. Ce serait plus simple si j’avais la moindre piste pour le retrouver, si j’avais le moindre indice que V. est encore en vie. Si je me disais que le dernier souvenir qu’il a de moi n’était pas celui d’un gamin apeuré qui voulait le faire rester dans une situation où il était abusé.
Je passe une main dans mes cheveux, à nouveau. Ravale mes doutes comme la boule qui obscurcit ma gorge, tire sur ma clope. La brise me fait dresser les cheveux sur la nuque. J’offre du feu à un infirmier qui traîne et échange quelques mots innocents avec lui, des paroles que j’oublie dès qu’elles ont franchi mes lèvres souriantes.
Continue Max. Fais semblant. C’est ce que tu fais de mieux.
La voix de Gary me fait me retourner, comme pour vérifier qu’il n’est pas vraiment là. Offre un sourire doux à l’infirmier en insistant que non, tout va bien, ne vous en faîtes pas.
Lorsque je rentre dans l’hôpital, on me dit que ça va durer un moment. Que je pourrais rentrer chez moi. Et en effet, je pourrais, pourtant je sais que ça va me travailler. Je veux m’assurer que Marlon est en vie, j’ai besoin de savoir. Alors à défaut, je vais chercher quelques dossiers dans ma voiture et m’installe dans la salle d’attente, lunettes sur le bout du nez.

Me plonger dans le travail a l’avantage de me faire tout oublier. De mes préoccupations, à Gary, en passant par V. Il n’y a plus rien sinon les affaires. C’est à peine si, du coin de l’oeil, j’aperçois Susan lorsqu’elle arrive. Du coin de l’oeil, j’observe alors qu’elle s’active au secrétariat. Marlon n’est pas encore sorti de la salle d’opération.
Je replonge le nez dans mes écrits.
J’ai l’impression qu’une éternité s’écoule avant qu’une infirmière ne vienne m’informer que Marlon est sorti. Je suis le premier sur les lieux, alors que Susan s’affaire encore avec la bureaucratie. Je me dis qu’il vaut mieux que je sois parti avant qu’elle ne revienne. Ma place n’est pas vraiment ici de toute façon.
Embarquant mes dossiers sous un bras, je demande à l’infirmière en chef de m’indiquer le chemin, ce qu’elle accepte gentiment de faire, et bientôt je me retrouve devant la porte de la chambre de Marlon. J’hésite un instant. Est-ce que je fais bien de passer ? Marlon devrait se reposer. Puisque je sais qu’il est en vie, c’est tout ce que j’avais à faire. Mais pour V. et peut-être un peu aussi pour ce qu’il me reste de conscience, je finis par toquer.
Marlon me répond immédiatement et j’entre, un peu raide.
Il n’a pas plus mauvaise allure que quand je l’ai trouvé, mais au moins il n’a plus l’air de se vider de son sang. Bon eh bien voilà, maintenant que j’ai vérifié, je peux repartir !

Ce serait bien si c’était si simple. Mais Marlon m’interpelle et je ne peux m’empêcher de lever un sourcil.

« Ce n’est pas moi qui ai eu un accident… »

Même si c’est vrai qu’en voyant mon allure, on pourrait se poser la question. Marlon enchaîne sur le fait que je n’étais pas obligé et je dois me retenir de lui dire que j’en suis bien conscient, que je ne sais pas bien moi-même pourquoi j’ai agi. Au lieu de quoi, je me contente d’un sourire un peu pâle :

« Je n’allais pas te laisser comme ça. »

Je n’allais pas, je n’allais pas… tout de suite les grands mots. Probablement que j’aurais laissé la grande majorité des gens se vider de leur sang à la place de Marlon. J’en aurais peut-être même récupéré un peu pour certains rituels. Je ne lui dis pas non plus que c’est à cause de V. qu’on en est là.
Le pauvre a déjà bien assez à penser, à commencer par sa sœur. Je secoue la tête :

« Elle n’est pas loin, elle s’occupe des formalités administratives. Mais j’imagine qu’elle ne doit pas être ravie, effectivement. »

Bon eh bien, voilà. On s’est tout dit. Il n’y a plus qu’à repartir.

« Comment est-ce que tu te sens ? Ils ont assez poussé sur la morphine ? Sinon je peux aller négocier avec les infirmières. »

Je suis presque sûr qu’elles m’ont à la bonne, vu le regard que certaines m’ont lancé et les émotions que j’ai senti des autres. Je remonte les lunettes sur le bout de mon nez et ajoute :

« Tu as des souvenirs de l’accident ? »

Je vois bien que Marlon essaie de faire bonne figure, il sourit, fait la conversation, et c’est vrai qu’il sort à peine du coaltar, mais la question m’a habité depuis que j’ai trouvé l’épave de la voiture, et il ne me reste pas beaucoup de temps pour élucider le mystère. Maintenant que Marlon est soigné et réveillé, que sa vie ne risque plus rien, je n’ai pas l’intention de m’éterniser.

« Il n’y avait pas d’autre victime sur le lieu de l’accident. Je ne pense pas que tu pourras récupérer ta voiture, mais ça peut attendre. Alors essaie de te reposer maintenant. De penser à toi. »

Je ne peux pas m’en empêcher. Sûrement parce que Marlon n’a cessé de parler des autres, sans jamais parler de lui, une seule fois. Peut-être parce que mon propre égoïsme me pousse à penser qu’on ne peut pas être aussi altruiste sans s’oublier dans la partie. Que Marlon ferait bien de se focaliser sur sa personne cette fois, alors que son abnégation l’a poussé dans des brancards.  

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L’arrivée dans sa chambre est un peu nuageuse. Marlon n’a pas vraiment la notion du temps. S’il se souvient vaguement d’avoir eu un accident, tout est encore en bazar dans son crâne et rien ne semble faire sens. Les minutes et les heures écoulées depuis l’instant fatidique ne sont qu’un brouhaha nuageux qui plane au-dessus de sa conscience. Si ce n’était pas pour les douleurs bien vives, Love aurait peut-être même tout oublié. Encore un peu sonné de l’anesthésie, bien que parfaitement réveillé - pour le moment - il bataillait entre ce qu’il voulait faire et ce que son corps lui permettait. Max au milieu de cette scène hors du temps comme sauveur, encore une fois ancré dans le réel, les yeux bleus se raccrochent à l’image ensanglantée face à lui. La réponse à sa question lui esquisse un sourire qui disparaît aussitôt sous le coup de la douleur et il répond malgré tout. « Vu ta chemise, la question se pose. » Dans son état normal il aurait sans doute accompagné les mots d’un geste mais pour l’heure, on s’en passera. Les yeux suffiront à faire passer le message. Les mots qui suivent l’enfoncent dans du plus sérieux, et une moue légère mais bien là, habille ses lèvres. Dans un soupir, Marlon se dit que Max a sans doute raison, il n’allait pas le laisser comme ça, mais quand-même. Techniquement il aurait pu, qui l’aurait su ?

L’esprit du blessé dérive et l’absence de sa sœur à ses côtés le laisse interrogatif. Persuadé qu’on lui a parlé d’elle, l’avocat se demande si sa cervelle ne fait pas des siennes. Heureusement pour lui, son sauveur lui offre une réponse sensée et rassurante. Enfin, à moitié rassurante. Susan est bien là, et l’idée de l’avoir près de lui le rassure grandement. L’état dans lequel elle va le retrouver le rassure beaucoup moins. S’il n’a pas souvenir de tout, Marlon sait pertinemment qu’il est entièrement responsable et que sa cadette risque de ne pas trop aimer. Il laisse un soupir lui échapper et cherche à rassembler ses esprits pour trouver le meilleur moyen de s’expliquer avec sa petite sœur adorée.

Mais Davidson le sort de sa tourmente. Les yeux océan se fixent sur l’homme, et un instant, ça lui traverse la tête. Pourquoi Max s’inquiète autant ? Il est en vie, Susan est là… Pourquoi ? Ils n’ont jamais été proches, pas plus que des politesses de loin dans un tribunal qu’ils foulaient chaque jour depuis des années. Certes, les deux hommes se connaissaient depuis à peu près toujours et grâce à V. ils avaient gravité dans une sphère commune pendant des années. Mais de là à… ça ? Sans aller plus loin dans sa réflexion, son attention se focalise sur ce qui vient de lui être demandé. Tentant toujours péniblement de se redresser entre deux grimaces et quelques regards pour vérifier si tout était bien vrai il articule avec sa bouche abîmée. « Ça va, ça va. Je préfère rester encore bien conscient même si j’ai mal, je t’avoue que je suis un peu paumé. » Sa gorge le gratte et il commence à avoir soif. « Je crois que c’est pas de la morphine qu’elles veulent négocier mais ton numéro. » Il sort ça sans vraiment réfléchir mais avant qu’il ne puisse réaliser ses propos, la voix de sa réalité s’élève encore et cette fois-ci, la question fait vraiment mal.

Le silence comme réponse immédiate, Marlon cesse de s’agiter dans son lit, laisse même sa tête basculer contre l’oreiller, comme pour s’y enfoncer. Les yeux rivés face au mur, il se perd dans ce poids lourd contre sa poitrine alors que le premier sur les lieux l’accompagne dans sa quête de vérité. Les mots le rassurent, ce qu’il pensait savoir se confirme, il était seul et puis le brun lui parle de sa voiture et de prendre soin de lui. Sauf que sa tête se noie dans un tourbillon de souvenirs et de questions qui semblent s’ajouter les unes aux autres sans jamais lui donner de réponse. Toujours rivé droit sur son mur fade, l’homme sent sa gorge se nouer au delà de la gêne qu’il sentait jusque-là et sans savoir comment ou pourquoi, il lance à son interlocuteur qui n’a rien demandé. « Un peu. C’est flou. » Il tente de reprendre contenance en dégageant son regard de ce point trou noir et retrouve Max avec un sourire léger, mais soulagé. « J’ai vraiment cru que j’allais y passer. Je crois que sans toi, ça aurait été le cas. » Il le regarde un peu plus, pour de vrai et ajoute. « Merci, Max. » cette fois le ton était grave, bas, presque un peu caché, juste pour eux. Les mots renferment clairement tout ce que Marlon n’arrive pas à dire, à décrire. Un moment dur et violent et sans doute des pensées qu’il n’est pas prêt d’avouer. Il tente un sourire au milieu des bleus et lance, avec ce qui se veut être un ton léger, s’il en est. « T’as fait assez Max, j’te remercierai jamais assez mais tu devrais rentrer. T’as l’air un peu fatigué. » Dans ses yeux, une reconnaissance sans fin alors qu’il dit, un sourcil légèrement haussé. « Va dormir avant d’en avoir marre de moi. Parce qu’on doit manger un bigmac, souviens-toi. »



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Every song
Every dream filled with help from beyond
As I'm sinking
I relive the story


C’est vrai qu’en me voyant, on doit se demander par où je suis passé. Pourtant je n’ai rien risqué ce soir, ni fait quoi que ce soit d’illégal, ce qui en soit, est déjà plutôt rare en ce qui me concerne. A. va probablement poser des questions en me voyant revenir, et elle aurait raison. Mon retard est déjà pour le moins inhabituel. Disons que tout ça ne me ressemble guère, porter secours à quelqu’un, encore moins. Ça ne fait pas partie de mes attributions. Et si je n’ai rien à y gagner, disons que je me serais abstenu. Alors pourquoi je me suis déplacé et plus encore pour Marlon ? À vrai dire, tout ça ne fait aucun sens qu’en on y réfléchit.
Je ne pouvais pas. Je ne pouvais juste pas. V. était là, plus présent que lors de ces vingt dernières années. Une main pesante, posée sur mon épaule. Comme une obligation silencieuse, un devoir envers mon frère aîné, disparu depuis toutes ces années. Une aspiration familiale en somme.
En parlant de famille, Marlon évoque Susan. Lui qui hésitait à l’appeler, la cherche à présent, et je ne peux m’empêcher de me demander comment j’aurais réagi à sa place. Probablement qu’A. Aurait été ma première pensée, à moi aussi. Voilà plusieurs années que nous partageons le même appartement, et parfois nos soirées, quand nos emplois respectifs nous le permettent. A. se serait inquiétée de ne pas me voir revenir. Je me demande s’il en va de même pour Susan et Marlon. J’ignore à quoi ressemble leur relation, et s’ils sont encore aussi proches qu’ils l’étaient quand nous étions adolescents. Pourtant, à en écouter, Marlon, on peut encore sentir tout l’amour qu’il ressent pour sa cadette. Je ne pousse pas plus loin la question. La réticence de Love à appeler sa sœur m’a appris que tout n’était peut-être pas aussi rose que ça en a l’air dans leur maison et de toute façon, toute ça ne me regarde guère, ne m’intéresse pas davantage. Ce que je voudrais vraiment est lui parler de V., lui demander comment il était dans ses derniers jours à Exeter, si Marlon se souvient de quoi que ce soit qu’il ait pu dire qui puisse donner une indication d’où il comptait partir.

Je m’abstiens.
Parce que ça n’est pas le moment. Parce que Marlon est encore dans les vapes, qu’il n’est pas très clair dans ce qu’il raconte et que je me doute bien que dans sa tête ce doit être un tout différent bordel.

Quand il me parle des infirmières qui pourraient vouloir mon numéro, je ne peux m’empêcher de lever les yeux au ciel d’un air désabusé. Qu’est-ce que je pourrais bien faire de leur numéro ? Je suppose qu’une infirmière est toujours bonne à avoir sous le coude, mais je n’ai pas l’envie ni la détermination à entraîner l’une d’entre elles dans un jeu de chasse au chat et à la souris ce soir. Ça demande trop d’effort et de volonté que je n’ai pas actuellement. Je n’ai qu’une envie, rentrer chez moi, prendre une bonne douche et faire chauffer un plat à réchauffer dans le micro-ondes avant de m’affaler devant ce qui daignera passer à la télévision. Si j’ai de la chance, peut-être que je croiserais A. et qu’on parlera de ce qui s’est passé ce soir. Mais la connaissant, je doute qu’elle soit encore là ou encore debout quand je rentrerais.
Dans le doute, je demande quand même à Marlon des détails de l’accident, comme si ça pouvait m’aider à éclaircir le mystère. Mais Marlon ne s’étend pas. Il ne m’apprend rien que je ne sache déjà. Disons même qu’il m’en apprend moins que ce que j’en sais. J’imagine qu’il n’a pas particulièrement envie d’en parler et ne pousse pas davantage la question. Je sens sa gêne d’ici, palpable jusqu’au bout des doigts. Peut-être ne se souvient-il vraiment de rien.

« Tu n’as pas besoin de me remercier. Je suis sûr que tu aurais fait la même chose à ma place. »

Et de ça, je suis vraiment certain. Marlon est une bonne personne, le genre qui ne laisse pas les gens mourir sur la chaussée. Tout l’inverse de moi en somme. Il ressemble à V., un peu, ou en tout cas, à celui que V. était. Un protecteur des plus faibles.
J’ai besoin d’une clope.
Comme pour me donner raison, Marlon évoque la possibilité de rentrer chez moi et j’esquisse un sourire.

« Tu as sans doute raison. »

Je passe une main dans mes cheveux, tâche d’évacuer la fatigue qui m’habite et ajoute :

« Ce n’est pas contre toi Marlon, mais je crois que j’ai besoin d’une bonne douche. »

Et c’est peu de le dire, l’odeur du sang me colle à la peau. Je lance un regard derrière moi :

« Susan ne devrait plus tarder, alors je vais y aller. Tâche de te reposer et de soigner tes plaies. J’attendrai mon bigmac, quand tu te sentiras mieux. »

Une promesse est une promesse après tout. Même si Marlon a fait cette promesse lorsqu’il était en train de mourir… J’imagine qu’elle tient toujours, pour l’instant, qui sait ce qu’il en sera lorsqu’il ne sera plus sous anti-douleurs. Je ne connais pas bien Marlon mais je me dis qu’il tiendra sa promesse, ne serait-ce que parce qu’il est communément sympa. Même si ce sera sans doute gênant, de se retrouver en tête à tête quand son esprit sera moins embrouillé…
Merde, c’est vraiment une idée à la con hein ?
Autant ne pas y penser maintenant. J’adresse un dernier signe de main à Marlon avant de sortir :

« Prends soin de toi, Love. »

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