the observer, a witness of life (maluum & barbie)

the observer, a witness of life

The lovers.
Une belle carte pour commencer la journée. Lydia sourit devant son tirage du jour, tenant entre deux de ses doigts le dessin des deux amoureux se tenant la main. Partenariat, union, dualité, choix. Mmh... est-ce qu'elle allait devoir faire un choix ou bien croiser une personne intéressante aujourd'hui ? Peut-être bien Klaus ou le sympathique antiquaire. Elle avait l'air d'être populaire auprès des personnes plus âgées qu'elle en ce moment. En tout cas, elle enverrait un brouillon de son prochain tik tok à son sauveur, c'était certain.

Rangeant la carte dans son jeu avant de lui donner son habituel et soigneux mélange, Lydia plaça le tarot dans sa boîte, puis dans sa poche de veste. Elle hésita un moment, caressant nerveusement son collier rond en scrutant la pièce de l'hôtel dans laquelle elle résidait mais à laquelle elle ne s'habituait pas. Cette bâtisse, elle avait les os lourds, et parfois Lydia avait l'impression qu'elle la portait avec la seule force de ses épaules tellement l'air était chargé. C'était indescriptible, mais ce qui était sûr, c'est qu'il fallait qu'elle sorte. S'assurant que son portable se trouvait dans la poche opposée, Lydia s'enfuit tel un lapin s'enfuirait d'un trou de renard, consciente qu'elle y retournerait ce soir.

Elle aurait aimé dire qu'elle commençait à connaître la ville, mais la vérité était qu'Exeter la surprenait tous les jours et, à vrai dire, elle ne s'attendait pas à moins. Ses vacances étaient loin d'être terminées et Lydia ne s'ennuyait pas le moins du monde, c'était donc une réussite. De plus, il y avait encore des endroits qu'elle n'avait pas exploré, des endroits plus excentrés.
Lydia s'aventurait, filmait, mangeait, observait, s'émerveillait, jusqu'en début d'après-midi, lorsqu'elle atterrit dans le quartier d'Ashmill. Elle n'y avait jamais mis les pieds. C'était... brumeux. Et presque abandonné. Un frisson d'appréhension lui parcourut l'échine, mais l'excitation de la découverte fit bondir son cœur en avant, entraînant ses pieds et les forçant à marcher l'un après l'autre.

Lydia sortit son portable, un peu plus rassurée, comme si elle pouvait invoquer des présences rassurantes avec son appareil. Elle n'était pas assez sûre de vivre quelque chose de dingue, et elle n'avait rien de particulier à dire, donc elle ne ferait pas de live. Mais elle avait quand même l'impression de ne pas être seule lorsqu'elle parlait à son téléphone.
Les bâtiments désaffectés défilaient devant elle et dans son écran, inconscients de mener une vie dédoublée. « Nouveau jour, nouvelle aventure à Exeter ! Si vous voyez quelque chose malgré la brume, je vous félicite ! » narra-t-elle à ses futurs spectateurs. « Glauque... mais c'est ça qu'on aime. »

Lydia entendait principalement le bruit de ses pas sur les graviers éparpillés et les bouts de béton peut-être plus vieux qu'elle. Il n'y avait vraiment pas un chat... Jusqu'à ce que la brume commence à se dissiper un peu et qu'elle distingue plusieurs silhouettes au loin. « Des silhouettes... humaines, n'est-ce pas ? » fit-elle à moitié rassurée pour la vidéo. Oui, c'était stupide de penser le contraire. Haha. Et en effet, à son plus grand soulagement, ces gens étaient en chair et en os. Et ils faisaient... ils faisaient quoi, au juste ? Lydia fronça les sourcils. Elle ne comprenait pas du tout ce qu'il se passait. Ils traînaient juste ? Ils avaient l'air de... brûler des choses ? Non. Si ? Il y avait une vibe très étrange autour du rassemblement et le soulagement de Lydia commença à retomber comme un soufflé. « Ok, c'est bizarre... »

Il y avait une femme au centre de tout ça qui dénotait dans le paysage. Le reste était majoritairement des hommes qui portaient majoritairement des blousons en cuir. Il y avait des bikers à Exeter ? La pensée la fit doucement sourire. Pas pour longtemps. Au loin, la femme finit par tourner la tête dans sa direction. Lydia s'arrêta net.
Est-ce qu'elle avait le droit d'être là ? Et de filmer, surtout ? Mh... Merde, ils l'avaient définitivement remarquée. Plusieurs têtes commençaient à se tourner vers elle, et ils n'avaient pas l'air très contents. Est-ce qu'elle... avait interrompu un truc ? Bon, c'était rien, Lydia s'en fichait s'ils voulaient brûler trois cannettes, c'était pas écolo mais c'était leurs bails, hein. Ils allaient venir vers elle, mais elle pressentait que si elle se mettait à courir, ce serait encore pire. Lydia s'apprêta à arrêter la vidéo, mais eut l'idée de continuer d'enregistrer, simplement pour avoir une preuve s'il lui arrivait quelque chose. Ouais, des fois Lydia avait de la jugeotte, il fallait croire. La jeune femme baissa son téléphone, faisant mine de le tenir nonchalamment.

Ça sentait pas très bon... Mais elle ne faisait rien de mal. Pas vrai ? Peut-être qu'ils étaient sympa et que personne avait de quoi allumer leur cigarette et qu'elle était la première passante à qui demander un briquet ? Oui, ça devait sûrement être ça. Haha. Mais elle n'avait pas de briquet. Merde.

(c) AMIANTE

Tongue-tied, I am bound
To weave my words with thistledown
Sickle moon on the moor
Turns thistledown silver in fingers raw|
(c) code astra

La brume entourait le lieu du rituel, comme si Exeter savait ce qu’il s’y tramait, voile opaque tombé au fil de la nuit, dissimulant jalousement quelques secrets inavoués. Maluum se tenait au centre d’un cercle rituel, genoux au sol, position de prière nécessaire. Étoile tracée à la craie où à chaque extrémité était posée une bougie. Chaque flamme désignait l’apparition éventuelle d’une âme défunte. Les bougies devaient s’éteindre d'elles-mêmes. Le lieu devait être éradiqué de toute forme de hantise. Ordre du boss. Les gestes de Maluum étaient fluides, gracieux. C’était une danse qu’elle maîtrisait. Elle se leva et marcha posément de branche en branche. Maluum récitait puis déposait les cristaux adéquats à sa chorégraphie occulte. La moindre hésitation pouvait provoquer une perturbation. La moindre erreur était une porte ouverte à une altération imprévue, non-désirée, qui serait difficile à éradiquer. Sans oublier la récitation. Une prière à psalmodier dans la plus parfaite des tonalités. Car l’âme des défunts n'aimait pas être perturbée. Elle outrepasse la convenance Maluum. L’autre monde commence même à la reconnaître. Elle nous appelle. Elle nous rejette. Maluum était le brouillard d’une nuit d'hiver troublant la réalité.

La prière n’était pas terminée que Maluum aperçut que les âmes étaient dérangées. Elle ne le sentait pas, n’était pas omnipotente non plus. Elle le voyait. C’était dans les pierres ; ils ne réagissent pas. « Barbie, approche. » appelle-t-elle d’un ton neutre, difficile de deviner alors ses arrières-pensées. Mais les pierres ne mentent pas. Et l’absence de réaction signifiait une seule chose. Ils n’étaient pas seuls. Elle attendit qu’il pénètre au sein du cercle, lui fit comprendre qu’il ne risquait rien malgré les bougies allumées et les symboles dessinés. Peu d'entre eux étaient présents parmi leur camarade. Une présence trop importante perturbe les rituels, les pensées malfamées et leurs ondes indirectes ont un impact sur l’efficacité de ses rites. Ils le savaient tous, Maluum travaille seule. Sauf à de rares exceptions. Comme aujourd’hui, aide nécessaire dans ce terrain à découvert, ne pouvant avoir les yeux indispensables à la défense du territoire ni l’énergie pour la couverture du terrain à analyser. Telle une scientifique dans son laboratoire, décryptant des formules qu’elle seule peut interpréter. Mais un laboratoire qui se devait d’être protégé. Son clan était son bouclier lui pourvoyant une défense avérée. « J’ai besoin d’un service. » N’aimait pas demander aux autres de faire un travail qu’elle pourrait faire elle-même, mais une force étrange l’intimait qu’elle devait rester en place. Qu’elle devait rester dans ce cercle tandis que l’on s'assure de la véracité de ce qu’elle voyait à travers les cristaux. Qu’une présence en dehors des cyclops l’empêchait d’accomplir correctement son rituel. « Éclipse-toi, discrètement, et inspecte les environs. » Mots presque chuchotés dans le bruissement d’un timbre assuré. Elle avait besoin de lui pour son esprit et sa présence singulière qu’aucun autre de ses camarades n’auraient pu fournir. Cette nuit, elle avait besoin de sa fougue dissimulée et de son assurance invétérée au détriment de la force physique commune parmi ses camarades affiliés. « Nous ne sommes pas seuls. » qu’elle murmure dans un souffle, capturant ses iris. Elle en était certaine et il fallait qu’il le soit également.

Maluum resta étonnamment impassible. Aucune émotion ne trahissait le doute qu’elle ressentait comme les prémisses d’une marée débordante. Ses traits étaient lisses et son maintien digne. Ses yeux cependant. Ses yeux laissaient transparaître une appréhension. Seul Barbie pouvait les voir à ce moment-là. Un voile qui embrume partiellement ses pupilles ; fenêtre de son âme tempérée. Elle avait confiance en Barbie. Trouve-moi cette âme vagabonde. Elle était proche, cette perturbation qui obstruait son avancée. Autrement, son cercle de rituel n’en aurait pas été affecté. Il y avait autre chose dont elle doutait. Du nombre. Une ? Plusieurs ? Simple curiosité ou ennemis déclarés ? Espionnait-on leurs procédés ? Art de la sorcellerie devenue objet de trafic où les plus exubérants y voyaient un outil à exploiter plutôt qu’une alchimie à préserver.

@Lydia Fry | @Barbie Tarrare

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