Revenir en haut Aller en bas


AccueilAccueil  Dernières imagesDernières images  RechercherRechercher  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  

-29%
Le deal à ne pas rater :
PC portable – MEDION 15,6″ FHD Intel i7 – 16 Go / 512Go (CDAV : ...
499.99 € 699.99 €
Voir le deal

Partagez
 

 togetherless - lazare

Aller en bas 
Ruben Mendoza
- le christ cosmique -
Ruben Mendoza
- le christ cosmique -
damné(e) le : o26/12/2020
hurlements : o1176
pronom(s) : oelle
cartes : ofurelise <3 (ava) ; heresy (sign) ; moodboard par le meilleur des procureurs du monde
bougies soufflées : o44
togetherless - lazare Empty
togetherless - lazare
Ven 1 Oct - 2:21


La radio crachait des informations diffuses dans tout l'habitacle de sa voiture usée. Le brouhaha permanent avait rapidement fait sa place dans la vie de Ruben, après l'Incident. Un besoin de s'occuper constamment, l'attention perpétuellement aux aguets, rarement là où elle le devait, souvent juste à côté. Le bruit, la musique, les sons avaient progressivement développé le don de le concentrer d'avantage sur la tâche à accomplir. Fourmillement de douleur le long des doigts, le long des membres. La chute avait été longue et s'était mal terminée. Ce qui aurait pu être pire, au demeurant. Pas de fracture ni d'entorse à déclarer, mais tout son flanc droit avait salement pris alors que la gravité avait fait son office.
Heureusement qu'il y avait la musique. L'oreille inattentive mais enregistrant chaque note, un rythme battu par la pulpe écorchée de ses doigts. Il avait, naïvement, tenté de s'accrocher à quelque chose le long de ce mur au crépit râpeux. Avait dû laisser une bonne quantité d'ADN dans les aspérités, suffisamment peut-être pour que la police scientifique puisse retrouver son identité. Etait-il dans les bases de données ? Il avait toujours tout fait pour ne jamais laisser la moindre trace. Mais après, il avait été tout de même admis en hôpital psychiatrique, peu après l'Incident. Peu après l'Incendie. Les occasions avaient été nombreuses pour le Gouvernement. Son sang, sa salive, devaient déjà avoir été enregistrés dans les petits dossiers de la Police depuis longtemps.

Et pourtant, cette nuit en particulier, il s'en fichait. Il s'en fichait de la douleur sourde qui battait tout le long de son flanc, il s'en fichait d'avoir couru à toutes jambes pour échapper au flash du vigile. Il s'en fichait des deux étoiles qui jonchaient l'écran en verre renforcé de son téléphone portable, réduit à l'état stellaire à cause de l'amie gravité. Ruben se fichait d'avoir manqué de recevoir une balle dans la couenne, trop occupé qu'il était à courir pour retrouver la carcasse brinquebalante de sa voiture. Trop occupé à essayer de rallumer ce maudit téléphone qui avait mal accusé le coup, et qui refusait d'obtempérer. Engloutis, les kilomètres qui le séparaient de son pôle d'observation. Engloutis, les substrats d'amour propre alors qu'il s'était précipité, fébrile, jusqu'à son ordinateur. Par sécurité, il ne connectait jamais ses appareils. Prudence était mère de tout, comme disait l'adage. Il fut toutefois reconnaissant envers lui-même d'avoir eu un moment d'égarement passager, en synchronisant ses appareils. Lui qui se jurait chaque semaine qu'il achèverait prochainement l'échange de données, il se remercia profondément de n'avoir pas encore cédé à l'appel du large numérique. Coupé de tout sur son île déserte au milieu de l'immensité des ondes, il n'aurait jamais pu sauvegarder le message à l'origine de tous ses maux. Mais les probabilités, aussi peu fiables que d'ordinaire, lui avaient été favorables.

Et il avait pu non seulement retrouver ces mots qu'il avait cru avoir imaginés. Je t'aime. Des choses qui ne se lisaient pas, ne se disaient pas entre eux. Pas avec Lazare, pas de cette manière. Pas depuis le temps qu'ils se connaissaient, en tout cas. Ruben avait bien compris certaines choses, la patience, l'abnégation. L'abdication. L'amitié était belle, elle était rassurante, avec ses travers et ses routines. Un dérapage une fois de temps en temps mais qu'étaient-ils sinon des créatures de chair et de sang qui avaient des besoins ? Tout était bien plus facile à envisager, quand on observait les choses du point de vue de l'amitié. Les regards étaient moins pesants, les soupirs moins mélancolique. Les caresses avaient un sens, un but purement pratique. Les embrassades ne comptaient finalement qu'à peine, une manière comme une autre de se prouver qu'ils existaient. Une extension à une amitié qui n'avait jamais été autre chose que particulière, depuis aussi loin que Ruben pouvait s'en souvenir. Et s'il avait espéré pendant longtemps que de ces bases naisse quelque chose de plus grand, il avait cessé d'y croire. Parfaitement conscient qu'il n'était qu'un enfant devant l'immensité du monde, et pourtant suffisamment mature pour comprendre que les chimères n'appartenaient qu'au monde des rêves. Un amour, une relation oniriques, qui devait rester cachés derrière les parois de son palpitant. Quelques battements un peu trop forts n'avaient jamais secoué le monde.
Tout du moins le monde de personne d'autre, sinon le sien.

Tout était tellement plus facile, de cette manière. Quand tout ça ne concernait que lui, et que ce monde n'appartenait qu'à lui. La disparition de Frida puis celle, partielle, de Ruben, avaient envenimé les choses. Ramené les rêves devant ses yeux, repoussant douloureusement une réalité que lui seul semblait vouloir. C'était le pourquoi de son comment, la raison de sa déraison. Un trait d'humour qui ne le faisait même plus rire, et que, pourtant, il déclarait quelques fois en pouffant. A soi. A d'autres. Jamais à lui.
Et c'était pourtant lui qui venait de tout remettre sur le tapis. Par message. Comme disait l'autre, loin des yeux devait bien signifier loin du coeur, non ? Et pourtant... Pourtant ce n'était pas de cette manière qu'il l'avait vécu, Ruben. Tout bercé d'illusions qu'il était, ses rêves charriant quelques fois ces mots à embraser le coeur, il s'était imaginé les recevoir de bien des manières. Certainement pas dans la froideur blafarde d'un écran de téléphone, et encore moins alors qu'il était à moitié assis sur le rebord d'une murette supplantée de barbelés. Les mots s'étaient abattus sur son coeur comme un coup de poing, lui coupant le souffle. La chute n'avait pas été que figurative. Et il était bien là, le problème.
Jamais il n'aurait cru que ces mots puissent lui faire mal.
Oh, ce n'était pas comme avant.
Ce n'était pas la même douleur que celle qui avait provoqué l'Incident.
Mais elle n'en était pas moins vivace.

Un parfum iodé, discret, accueillit son arrivée dans le quartier de Sirenwhyte. Les ruelles avaient beau être difficilement éclairées, entre l'heure et les problèmes d'électricité récurrents qui hantaient la ville, il n'eut aucun mal à se repérer. Il connaissait la route par coeur. Pourrait la refaire les yeux fermés, s'il n'était pas aussi vital d'être rendu à bon port et sans heurts. Ruben prit une profonde inspiration, la première depuis qu'il s'était installé derrière son volant. Ce ne fut que lorsque la bouffée d'iode se faufila à travers ses poumons qu'il réalisa à quel point il retenait son souffle. Ce ne fut qu'une fois que la brise maritime caressa son visage qu'il réalisa à quel point ses grands yeux étaient humides. Lointaines et pourtant si proches, les vagues. Le chant des marées, tout aussi entêtant qu'il lui paraisse sur le moment, ne l'attirerait pas ce soir-là. Il n'était pas question de fuir la douleur, cette fois-ci. Ce n'était pas comme si sa première et unique tentative de fuite avait été infructueuse, après tout.
Arrivé devant la porte si familière de l'immeuble où logeait Lazare, Ruben marqua une pause. Une hésitation. Lazare n'était pas la seule chose qu'il risquait de trouver en franchissant ce seuil, cette fois-ci. Une toute autre forme de douleur, l'espoir. Sordide. Atroce. Qu'il connaissait par coeur, qu'il refusait de laisser revenir en ce qui concernait cette relation. Mais il allait devoir l'affronter, lui aussi. Voir s'il le laisserait le dévorer tout entier, comme la fois d'avant. Digéré puis recraché, hein. Il finit par frapper. S'engouffra de son propre chef dans l'entrée, comme il le faisait toujours.

La routine était si confortable, en réalité...

-J'ai... J'ai fait aussi vite que j'ai pu.

Des débris d'arbre dans les bouclettes, des estafilades le long du corps. Son vieux jean complètement râpé sur tout le côté droit, écorché pendant la chute. Les blessures avaient séché sur le bout de ses doigts, mais Ruben ne sentait absolument rien de tout ça. Parce que l'espoir était peut-être la pire de toutes les douleurs : elle enrobait tout le reste d'ouate, assoupissant les sens, l'instinct et les connexions nerveuses. Ne restait plus que ce début d'euphorie qui le poussa à piétiner dans l'entrée, quelque pas rapides le temps que Lazare ferme la porte. Rien d'inhabituel, sinon une démarche plus électrique. A moins que ça ne soit à cause du stress.
Ou de tout le reste.

-Regarde, je te mens pas, j'ai même bousillé mon téléphone en tombant tout à l'heure.

Comme un enfant en faute, alors qu'il avait tout fait dans les règles. Du mieux qu'il pouvait, tout du moins. Extirpant le malheureux objet de sa poche, il le présenta devant Lazare comme une explication.
Comme une excuse. Mais pour quoi, au juste ? Il fourra l'objet entre les mains de son ami, se faufila jusqu'au salon qu'il connaissait par coeur. La présence de Lazare entre ces quatre murs ne lui avait jamais paru aussi évidente qu'en cet instant. Il n'avait jamais été aussi conscient du regard, de la présence, de la corporalité de son compagnon dans les lieux. Dans sa vie, si. Malgré l'envie, il ne pivota pas sur ses talons. Joua avec ses propres doigts, nerveux, profitant de ne pas avoir à lui faire face pour poursuivre. La peur ne le dévorait plus autant qu'avant, depuis l'Incident. Mais la nervosité, elle, pointait encore quelques fois le bout de son nez.

-Fallait que je vienne, j'avais pas le choix. Je peux pas avoir une conversation comme ça par écrans interposés, c'est infaisable.

Un soupir. Il pouvait entendre, percevoir alors que Lazare se déplaçait dans la pièce. Se refusa de lui faire face, de le retrouver ou de se sentir faillir, et se dirigea vers l'un des placards où il savait que Lazare planquait quelques bonnes bouteilles ainsi que ses verres en cristal. Peut-être qu'une petite dose de courage liquide serait bénéfique. La première bouteille ferait largement l'affaire.

-C'est vrai alors, ce que t'as écrit ? C'est ni un jeu, ni une blague, ni une manière de me faire plaisir, hein ?

Pas que Ruben accuse Lazare d'un de ces trois faits. S'il y avait bien une chose qu'il reconnaissait chez le Sinclair, c'était cette droiture qu'il lui avait toujours admirée, même quand ils étaient jeunes. Lui qui était bien plus pliable que son colocataire avait toujours été admiratif de son code moral si particulier. Propre à lui-même. Mais n'était-ce pas ça qui en faisait tout le charme. Les verres remplis par la substance d'une bouteille piochée au hasard, il finit enfin par se retourner. Gratifia Lazare d'un sourire timide, un de ceux qu'il concédait quand les sentiments prenaient le pas sur la raison, un peu trop fort, avant de devoir les étouffer à nouveau. Un verre en cristal fourré entre les doigts valides, et il fit tinter le sien contre celui de son ami.

-Je partirai pas d'ici sans avoir eu toutes mes réponses, Laz. Je suis très sérieux.

Et pourtant il ne le regardait pas dans les yeux. Un lever de poignet. Le contenu de son verre lui brûla tout l'oesophage alors qu'il le sifflait d'une traite. Il en aurait largement besoin, ce soir.
Parce que quelque lui disait que le lendemain, plus rien ne serait jamais comme avant.




i have become
comfortably numb

Revenir en haut Aller en bas
Lazare Sinclair
- la grand-mère à moustache -
Lazare Sinclair
- la grand-mère à moustache -
damné(e) le : o28/12/2020
hurlements : o1661
pronom(s) : oshe/her.
cartes : o(av/icons) fürelise (cs/sign) tucker, blondieressources.
bougies soufflées : o44
togetherless - lazare Empty


togetherless

--- Walk into the woods: I’ll follow. Take me by the hand: I’ll follow. Whisper to my ear: I’ll listen. Walk into the woods: I’ll be there.


Il n'aurait pas dû accepter cette entrevue. Le message, reçu quelques minutes en arrière, avait provoqué une nouvelle bouffée inconnue dans ses poumons, et percevoir ces quelques mots en face de lui aurait des conséquences bien plus désastreuses, il en était certain. Il aurait été préférable qu'il passe la soirée seul, avec une affaire entre les doigts pour que son esprit vagabonde sur différents sujets, et la promesse de s'entretenir avec son meilleur ami un jour prochain ; quand l'information aura été oubliée, distillée dans ces vagues d'oubli qui constituaient une grande part de ce qu'était Ruben. Mais l'ami avait besoin d'un contact plus direct, et lui refusait le silence. Les quelques gestes qu'il avait eu jusqu'ici, étaient marqués par cette amitié faites d'étreintes, qu'ils avaient mis en place depuis leurs premières années d'étude. Il ne subsistait aucune obligation entre eux, seulement les restes de sourires qu'ils s'offraient lorsque les soupirs s'évanouissaient. Le coeur n'entrait pas en compte, dans cette relation qui s'était construite au fil des semaines, des mois, puis des années. Ils n'avaient aucune charge vis à vis de l'autre, et certainement pas de barrière érigée entre eux. Ils étaient libres, malgré cette vibration commune à l'évocation de l'autre.
Le corps totalement endolori par la pression, il était incapable d'engager le moindre geste, quelle que soit l'activité. Il aurait pu en profiter pour fuir, se frayer un chemin par sa fenêtre, et ne remettre les pieds dans cette ville qu'une fois les informations digérées. Mais si les défauts constituaient une bonne partie de son caractère, il n'avait pas la distinction des lâches. Il affronterait les conséquences de sa verve, et serait témoin de sa propre incompétence, face à un être aussi humain que Ruben. Alors, telle une statue que l'artiste viendrait tout juste d'achever, il attendait. Le bout de son pied frappait le sol, imperceptiblement, comme des battements représentant ceux de son coeur, alors qu'il veillait à ne pas trop l'affoler.

Ruben était en chemin, et le chasseur n'avait aucune idée des mots qu'il lui servirait.

Il n'était pas préparé, et Enoch ne pouvait faire de lui un as de la démonstration, malgré toute sa bonne volonté. Le plus jeune des frères avait toujours été le plus doué pour ce genre de choses, et Lazare l'admettait sans gêne. Il n'était pas de ces hommes contraints à une vie de romantisme, dont les mains tremblantes tendaient des fleurs aux visages aimés. Il était celui dans l'ombre, brisé par un amour qu'il s'était lui-même arraché, et dont la culpabilité n'avait d'égale que la nécessité de sa solitude. Enoch ne pouvait alors plus rien pour lui, et seule sa capacité de répartie pouvait le sortir de ce pétrin dans lequel il s'était engouffré. Et si son ami venait lui annoncer qu'il ne pouvait répondre favorablement à ses avances, et certainement que leur amitié ne pouvait en être qu'impactée, il lui faudrait accepter la défaite en gardant la tête haute. Lazare avait intercepté les regards que son ami lançait à sa fiancée, à l'époque. Il était certain de ne pas se tromper, lorsqu'il notifiait un sourire qu'il lui lançait, ou bien la manière qu'il avait de la regarder. Frida et Ruben se plaisaient, il en avait toujours été persuadé, mais n'avait jamais fait de remarques à ce sujet. Mais qu'en était-il de leur lien à eux ?

Ruben et Lazare.
Lazare et Ruben.
Les deux faces d'une même pièce. Les deux noms indissociables l'un de l'autre, alors qu'ils évoluaient dans le monde de la justice.

Les quelques coups donnés contre la porte en bois, comme trois coups frappés au seuil de son enfer, le firent sursauter. Lui qui n'avait peur de rien, en dehors de ces espaces exigus, venait de faire un bon face à de simples phalanges contre son entrée. Ce n'était pas sa tête qui avait fait un bon, mais son coeur éparpillé dans sa cage thoracique. Il sut qu'il n'avait pas besoin de se présenter à la porte, en entendant la poignée s'actionner. Ruben était ici chez lui, et il n'avait pas besoin de s'annoncer avant de faire son entrée dans l'espace restreint qu'occupait Lazare. Ce soir-là, pourtant, il aurait préféré fermer à clé, et jeter cet instrument qui charmait les serrures. Les termes que son frère avait employés raisonnaient pourtant en lui : son silence mettrait un terme à ce qu'ils avaient ; il en était étrangement conscient. Il laissa son meilleur ami s'avancer, et le coutourna afin de refermer la porte derrière lui.
Le dos droit, il s'y adossa un instant, attendant que l'invité prenne ses repères. Il l'examina brièvement, à la fois amusé et inquiet de ces blessures supperficielles, et de cet air d'enfant perdu qu'il portait toujours si bien, malgré les années marquant ses traits. Les excuses faisaient partie de ce lot, attendrissant, qui dressait Ruben au-dessus des autres, forçant un passage inévitable vers ses sentiments. Lazare n'eut aucune réaction face à l'appareil tendu. Il hocha la tête, une fois, deux fois, et reporta son attention au reste de sa présentation ; de ces souliers sales, de ce pantalon abîmé, de ces doigts écorchés. Le téléphone ne pesait rien entre ses mains, il décida de le poser sur un guéridon dans l'entrée, image de leur différent stoppé au seuil de son habitation. Les messages ne pouvaient les suivre, si les lettres étaient englouties par le portable défectueux. La méprise fut alléchante, mais la vérité était toute autre.

La vérité était que Ruben était là, lui, et n'avait rien perdu de ses tentatives désespérées de mettre des mots sur ce qu'il ressentait depuis bien des années déjà. Le chasseur fit quelques pas vers lui, passa dans son dos pour aller à l'autre bout de la pièce ; sans but, simplement pour ne pas rester inerte. Toujours silencieux, pour ne pas trop en dire. Il observa son compagnon faire comme chez lui, s'emparer d'une de ses bouteilles, et de deux verres immaculés. Les doigts attrapèrent le verre tendu, par réflexe plus que par envie, et le tintement se fit entendre. La question en suspens, trop significative pour être complétée trop rapidement. Lazare resta silencieux, le verre dans une main, et le regard levé vers son ami, qu'il semblait pourtant ne pas voir. Il le regardait, mais ne le voyait pas.
Amusé en voyant son vis-à-vis descendre sa boisson d'une traite, il l'imita d'un geste sec. Le liquide dévala son corps, offrit une vague de chaleur réconfortante, et la possibilité de lâcher les chevaux. Qu'adviendrait-il d'eux, si Lazare venait à se confier sur ses sentiments ? Et si Ruben n'en voulait pas de cette proximité, de ce coeur trop petit, et pourtant trop plein. De ce putain de regard qu'il n'arrivait pas à braquer dans ses yeux, de ces putain de lèvres qui refusaient de s'ouvrir pour faire leur travail. Et de ce putain de coeur, battant, pulsant, qui empêchait Lazare de garder le torse bombé.

Il tendit le bras, et posa son verre sur la petite table près d'eux. En deux enjambées, il se retrouva face à lui, en laissant une distance respectable entre leurs deux corps. Levant une main, il la posa dans les cheveux de son ami, pour en tirer les écorces.

— Un jour tu vas finir par te faire descendre. Tu aurais dû me dire où tu étais, c'était plus sûr. Tu es inconscient.

Malgré ces maigres reproches, le regard qu'il dardait sur lui n'était pas dur. Minutieusement, il s'activa pour retirer toutes les épines striant ses cheveux, puis croisa les bras sur son torse, dans une position défensive. Il fit ensuite les enjambées dans le sens inverse pour revenir à sa place initiale, et prit enfin la décision de répondre à son interrogation.  

— On n'est pas forcé d'en parler.

Ils pouvaient laisser l'énergie en suspens, changer de sujet et se contenter d'oublier cette soirée qu'il avait gâchée. Il avait d'autres perspectives, de meilleures idées, des galères en moins. Il voulait passer la nuit à ses côtés, silencieux, et profiter de ce temps suspendu pour réfléchir à ce qu'il s'était avoué, et qu'il avait déversé à Ruben avec tant de difficulté. Mais il souhaitait tout de même donner une réponse, et finit par s'épancher de ces mots :

— C'est vrai. Tout est vrai. Mais c'est pas important, alors oublie ça. Commandons une pizza, et profitons de la soirée. On pourrait regarder ce film que tu aimes bien, puis aller nous coucher.

Il se redressa, ne supportant pas de faire le dos rond, et braqua un nouveau regard sur lui, l'espoir au bord des lèvres. Il aurait aimé avoir mieux à lui proposer, mais n'avait pas prévu de lui consacrer sa soirée, ni même sa nuit. S'il avait échangé quelques messages avec Gabriel, ceux qu'il aurait du lui envoyer le lendemain étaient d'une autre dimension. C'était une chasse qu'il préparait pour quelques jours plus tard, et non une comédie romantique. Mais à court d'idées, il s'était laissé emporter par les banalités d'une soirée de colocation ; comme à l'époque.

— Tu en penses quoi ?




BURN WITH ME TONIGHT
i got all i need, when you came after me. fire meet gasoline, i'm burning alive and i can barely breathe, when you're here loving me, fire meet gasoline, burn with me tonight.
Revenir en haut Aller en bas
Ruben Mendoza
- le christ cosmique -
Ruben Mendoza
- le christ cosmique -
damné(e) le : o26/12/2020
hurlements : o1176
pronom(s) : oelle
cartes : ofurelise <3 (ava) ; heresy (sign) ; moodboard par le meilleur des procureurs du monde
bougies soufflées : o44
togetherless - lazare Empty
Re: togetherless - lazare
Ven 17 Déc - 19:24

Endolori par sa chute et la langue claquant sous la brûlure de l'alcool. Laissa ses sens et la douleur s'enrouler dans la chaleur du breuvage, s'y laissa même légèrement brûler les joues. Le regard braqué ailleurs, partout, mais jamais sur Lazare directement. Content d'avoir de l'alcool mais insatisfait lorsque ce dernier se prouva insuffisant pour calmer ses nerfs, mis à rude épreuve. Rien pour calmer cette nervosité qui filait à travers chacun de ses membres, son genou battant une cadence folle maintenant qu'il était assis. Mains enroulées autour du verre comme s'il s'agissait de son propre coeur. S'il le retenait aussi fermement, peut-être qu'il n'aurait pas l'occasion de bondir trop fort. Parce qu'en plus de vingt années à connaître Lazare, il n'avait jamais été aussi proche d'une forme d'espoir. Soleil ardent, irradiant et dangereux sur lequel il s'était déjà brûlé les ailes. Une fois qui s'était même prouvée fatale, en témoignait le dossier médical de l'époque qu'il avait gardé en souvenir. L'amour était dangereux, l'amour avait toujours été cruel, Ruben connaissait parfaitement cette leçon. S'était retenu autant qu'il avait pu mais s'en était toujours prouvé incapable. Parce qu'il était comme ça. Attiré par les astres quels qu'ils soient, Frida et Lazare, les deux soleils de son existence. Lune parmi les satellites, à graviter tout autour pour avoir la chance, le privilège, même, de profiter un peu de leur chaleur. Leurs révolutions condamnées à s'effleurer de temps à autres, mais jamais à se toucher réellement. Un fait qui était devenu habitude, lorsque, l'espoir étant devenu trop fort, il s'était fait danger. Lorsque la douleur avait été trop difficile à contenir. A soutenir.
Vingt années déjà, et les cicatrices blanches qu'avait provoqué la perte de tout espoir, celle de toute forme de soleil, s'étiraient encore sur ses poignets. Des mises en garde pour Ruben, à chaque fois que son coeur se mettait à frissonner un tout petit peu trop fort.
A chaque révolution où il se sentait un peu trop proche du dernier soleil qui lui restait.

Il tira sur ses manches pour les planquer, ses aveux d'échec. Battit l'air du genou, lorgna au fond de son verre pour s'assurer qu'il n'y reste plus rien à boire. La bouche sèche, affreusement, alors qu'il n'avait pas soif. La langue qui claquait sur ce qui lui passait par la tête, et l'impression que cette dernière était bien plus vide que d'ordinaire. Il suivit Lazare du regard, ressentit l'étrange envie de se tasser au coin du canapé pour lui laisser toute la place de s'installer. Les doigts dans ses cheveux lui arrachèrent un frisson. Lazare avait toujours été précautionneux, Lazare avait toujours été attentif à certains de ces détails. Les doigts dans ses boucles poivre-sel, à en tirer toutes les petites feuilles, les infimes branchages. Un geste que Ruben l'avait déjà vu avoir à son égard, qui avait valeur d'interdit tant il invoquait l'espoir, avant. Qui prenait une toute nouvelle dimension au regard des dernières révélations. Le guédé retint son souffle, se laissa épouiller sans mot dire. Le corps traversé d'impulsions électriques et l'envie de déguerpir du canapé, mais il n'en fit rien. Ne respira que lorsque Lazare eut achevé son œuvre.

-Tu sais très bien que les affaires que j'étudie sont plus que louches. Le moins tu en sais, le plus tu es en sécurité.

Et c'était tout ce que demandait le photographe. Que Lazare soit en sûreté, qu'il ne lui arrive rien. Des années qu'il le protégeait du reste du monde, Ruben, petit bout par petit bout. Qu'il s'occupait de brouiller ses pistes, qu'il essayait de l'impliquer le moins possible dans ses affaires. Qu'il ne lui présentait que du concret, que lorsqu'il avait un dossier suffisamment solide pour que la confidence lui convienne autant qu'elle ne l'implique pas dangereusement. Conscient que son mode de vie pouvait être pesant, certaines paroles prononcées par Lazare lui-même lui revenant régulièrement en mémoire. Ces regards lassés par sa vie à courir après les moulins de la vérité, Don Quichotte qui finirait par en abattre un ou deux, à force d'acharnement. Il avait vu la fatigue s'étirer sur les traits de son compagnon, avait senti la lassitude dans ses yeux noirs. Avait entendu ses mots, aveux de dépit, d'abandon, même, des fois. S'était senti de trop, ou juste trop pour ce compagnon qu'il noyait dans le secret de sa propre existence. A la lumière de ce qu'il savait à présent, l'incompréhension s'étirait en ombres terrifiantes derrière la radiance de certains sourires. Derrière la tendresse qu'il pouvait sentir dans le geste si anodin de débarrasser ses cheveux des feuilles, que Lazare venait d'avoir.
Des petits gestes de rien derrière lesquels se cachait le spectre abominable de l'espoir. Ruben déglutit, mains toujours rivées autour de son verre. S'il le serrait d'avantage, il risquait de le briser. Le reposa sur la table basse, bien plus maître de ses mouvements maintenant que Lazare s'était éloigné de lui. Pas que la présence lui ait été désagréable. Bien loin que ça. Et c'était exactement là que résidait tout son problème. Le genou qui battait la cadence s'arrêta, en suspension dans l'air alors que son compagnon reprenait la parole.

Et changeait encore toute la perspective. Basculait la pièce autant que les sentiments, autant que les années passées côte à côte. Ruben avait toujours été admiratif du pouvoir des mots, d'autant plus de ceux qui avaient la chance de savoir les manier à leur guise. Savait leur violence comme leurs double-sens, savait qu'une prononciation pouvait apporter un tout autre sens à une existence. Savait, aussi, à quel point il en avait fait les frais. L'impression de glisser de sa propre vie, alors que le monde se métamorphosait tout autour de lui. L'imagination bien trop florissante, surtout quand on en venait à Lazare. Resserrée, cerclée et verrouillée à double tour, et Ruben qui s'était persuadé d'avoir jeté la clé. A croire qu'il n'avait pas été suffisamment efficace, que verrouiller un sentiment n'empêcherait jamais ce dernier de faire basculer tout ce qu'il était. Parce qu'il avait l'impression de tomber une seconde fois, ce soir. Et cette chute là était bien pire que celle qu'il avait faite juste avant d'arriver.
Celle-ci continuait, continuait, et menaçait de jamais s'arrêter. Un monde tout entier de certitudes lui échappait, et Lazare continuait de parler. Même le canapé sous ses fesses semblait incapable de retenir sa chute.

-2001, l'Odyssée de l'Espace ? Mais tu le connais par coeur...

Il ne comprenait pas. Ni ce que Lazare voulait, ni où il voulait en venir. Ce que ce film qu'ils avaient vu et revu pouvait signifier, s'il était même certain que Lazare l'ait apprécié un jour. Lui ou le film ? C'était vrai. Mais ce qui était vrai n'enlevait pourtant pas la lassitude qu'il avait perçue plus d'une fois sur ses traits. Ruben passa une main sur son visage, soupira profondément. Tout son monde basculait autour de lui, toutes les informations se bousculaient dans sa tête et il n'avait qu'une seule réelle envie, sur le moment.

Hurler.

-Je comprends pas, Laz. Je comprends vraiment pas.

Désolé par l'aveu, soufflé entre ses propres doigts. Désolé de s'avouer aussi vaincu alors que ce n'était pas à lui de s'excuser, mais au monde entier de se déclarer coupable. A moins qu'il n'y ait ni coupable ni innocent. Ni bourreau ni victime. Juste des non-dits aux quiproquos, bien trop abstraits pour qu'il parvienne à les saisir. Des filaments de vérité qu'il n'aurait jamais vus, alors qu'ils tissaient leur toile tout autour de son existence. Attachés autour de ses poignets, les lacérant comme des lames de rasoir.
Exactement au même endroit.


-Non. Il faut qu'on en parle. Depuis combien de temps ?

Lazare lui avait offert une porte de sortie, c'était la seule chose que le Guédé avait réussi à voir. Cette opportunité infime d'oublier tout ce qu'il s'était passé, tout ce qui s'était dit, de retrouver une once de normalité factice et désuète. Mais quelle normalité pouvaient-ils retrouver après tout ça ? Trop de choses s'étaient dites et trop peu de vérités avaient été dévoilées. La grande majorité des convictions de Ruben, celles autour desquelles il avait construit son existence ces dernières décennies, étaient en train de voler en éclat. Son palais de miroirs, tout de courants d'air, où le reflet de Lazare s'associait encore avec celui de Frida. L'ancien colocataire devenu amant sans qu'un lendemain ne soit faisable, persuadé que Ruben était qu'il n'y aurait jamais rien d'autre entre eux. Il l'avait attendu, cet enfant de l'air. S'était rendu compte que comme le vent, il ne l'attraperait réellement jamais. Une raison sur laquelle il s'était rebâti, pour ne pas s'effondrer une nouvelle fois.
Et maintenant, ses convictions étaient toutes d'air, elles aussi. Il se redressa, Ruben. Le corps traversé de filaments électriques avec l'envie de se débattre contre la toile d'une vérité trop difficile à supporter. Mains dans les cheveux alors qu'il reprenait ses cent pas. Paumes pressées contre les tempes dans l'espoir que s'il comprimait suffisamment son crâne, il ne lui donnerait pas autant l'impression qu'il allait exploser.

-Pourquoi tu me fais ça, Lazare ? C'est injuste, c'est putain d'injuste.

Longtemps qu'elle n'avait pas frappé, la crise. Longtemps qu'il avait réussi à la contenir, qu'il avait construit son bunker pour s'empêcher de péter. Longtemps que les allumettes de son coeur, de son esprit et de son corps étaient sagement remisées dans le sous-sol de sa vieille bicoque, pour éviter que la déflagration soit trop violente. Le palais de Justice en avait fait les frais. Et Ruben avait toujours préféré être le seul à faire les frais de sa propre explosion.
Mais il était trop tard, la mèche était déjà en train de brûler. Siffla entre ses dents dans un gémissement paniqué, un signal d'alarme à peine retenu entre ses dents. Quelque chose venait de sauter dans sa tête, il avait entendu le claquement. Le verrou qui retenait l'espoir, sauf qu'il avait oublié, Ruben. Il avait oublié que ce n'était pas que ça qu'il avait remisé si loin dans sa propre cervelle.
Il y avait aussi la détresse, il y avait toute la colère, l'incompréhension, le désespoir, noir comme l'encre, lors du premier abandon. Un torrent d'émotions qui dévalait, impossibles à contenir, dans tout son système. Et, menant la déferlante comme un chef de guerre mènerait son armée, l'amour portait l'étendard de son coeur continuellement brisé. Larmes aux yeux, sans qu'il sache si elles étaient de rage, de peine ou de joie. L'envie de hurler, de dégueuler la vérité, sa vérité à la gueule de Lazare, lui qui rêvait tellement de planquer la sienne. Noire et mauvaise, âcre et douloureuse, de la bile teintée d'amour qui sentait encore le sang, même vingt années après. Gémissement d'alerte, en cherchant à tout contenir, en cherchant à reculer avant d'exploser à nouveau.

-M'approche pas. Pourquoi tu me dis ça maintenant ? Pourquoi t'as attendu tout ce temps ?

Mais ses mains n'étaient que des mains. Vingt années de rien qui devenait subitement un tout étaient bien plus fortes que cette maigre défense contre la crise. Qu'importait qu'il les enfonce dans ses tempes, qu'importait qu'il soit courbé en avant, les muscles tendus contre tout ce qui se cassait la gueule. Même plus la force de la diriger contre lui-même, toute sa violence.
Même plus la force de protéger Lazare de ce qu'il avait fait.

-Des années que je crois qu'il n'y a rien. Des années que je me dis qu'il faut que j'arrête d'espérer, qu'il est temps que je raccroche, qu'il y aura jamais grand chose de plus. Que je me dis que c'est moi qui en fais trop, parce que c'est déjà arrivé, que j'ai déjà fait n'importe quoi en y croyant trop alors que j'aurais mieux fait d'y croire pas assez. Des années que je le porte dans ma putain de peau, qu'il faut que j'arrête d'y croire. Et tu me dis ça maintenant ?

Poumons vides mais coeur trop plein. Le bruit de son palais des illusions qui se brisait à chacun des ressacs de sentiments, et plus aucune envie d'endiguer la vague. Tout aussi grande qu'elle soit. Tout aussi destructifs que puissent être ses hurlements. Dirigés contre Lazare, mais jamais directement. Le regard rivé au sol, il pivota pour lui faire dos. Se recroquevilla sur lui-même, qu'importait qu'il soit au milieu du salon, peut-être que cela pourrait l'aider à se contenir. Une barrière maigre, risible contre la déferlante qui s'échappait d'entre ses lèvres, qui coulait en larmes amères le long de ses joues. Incontrôlables.

-J'ai passé le plus gros de ma vie à espérer ce que tu me donnerais jamais. T'as pas le droit de me faire croire à ces chimères, t'as pas le droit de me faire ça, Lazare, pas maintenant.

Pas alors que j'ai commencé à me faire une raison.
Pas après une vie entière à attendre quelque chose qui ne viendrait jamais.




i have become
comfortably numb

Revenir en haut Aller en bas
Lazare Sinclair
- la grand-mère à moustache -
Lazare Sinclair
- la grand-mère à moustache -
damné(e) le : o28/12/2020
hurlements : o1661
pronom(s) : oshe/her.
cartes : o(av/icons) fürelise (cs/sign) tucker, blondieressources.
bougies soufflées : o44
togetherless - lazare Empty
Re: togetherless - lazare
Sam 18 Déc - 2:05

Il avait essayé de se faire le plus petit possible derrière ces propositions qui semblaient ne pas convaincre son meilleur ami. Il avait beau ressentir l'envie de camoufler ses tentatives désespérées de disparaître derrière un film pour le reste de la soirée, Ruben devait bien voir qu'il n'y avait rien de distrayant dans les heures qu'il lui annonçait. Ils avaient vu ce film tant de fois, échangé leurs impressions durant les scènes, et fini par passer un bras autour des épaules de l'autre en attendant que les crédits n'arrivent, plus de fois encore. Lazare ne les avait pas compté ces instants, semblables et pourtant toujours uniques grâce à l'esprit si large de son compagnon de cinéma. Ruben qui trouvait toujours à redire, sur un film, un acteur, une théorie, juste une image qu'il n'avait pas perçu les visionages précédents. Et si Lazare était fatigué par ses longues journées au tribunal, et plus encore par ses obligations auprès de Dieu et du genre humain, jamais il ne s'endormait face à l'écran ; ces moments étaient bien trop précieux pour lui.
Il ne s'endormait que devant des longs-métrage que Ruben ne portait pas assez en son cœur pour lui rendre passionnant. Le film commençait, son ami restait silencieux par désintérêt, et le chasseur finissait toujours pas sombrer dans un sommeil profond après seulement quelques minutes. Mais ce soir, s'ils venaient à se conforter devant une cassette qu'il ne connaissait que trop bien, il était hors de question qu'il ne ferme les yeux un seul instant. Il serait là pour son ami, pour lui prouver que tout allait bien, malgré les apparences.

2001, l'Odyssée de l'Espace ? Mais tu le connais par coeur. Il avait raison, mais Lazare savait que l'expérience ne serait jamais la même tant qu'il aurait ce compagnon à ses côtés. Il irait de sa remarque, de son interprétation, et prouverait qu'un film pouvait contenir des milliers d'histoires différentes. Alors, ça ne le dérangeait pas, tant qu'il pouvait voir son ami heureux de lui exposer ce qu'il pensait de cette œuvre qu'il aimait tant. Certaines théories de Ruben lui arrachaient un soupir, il fallait bien l'avouer, mais il ne s'agissait jamais de méchanceté. Le film pouvait bien les emmener dans d'autres pérégrinations, le chasseur s'en moquait tant qu'il pouvait rester dans le monde de Ruben, et se nourrir de son imaginaire. Il pouvait donc supporter un visionnage de plus, et se cacher pour le reste de la soirée dans l'esprit de son ami. Je comprends pas, Laz. Je comprends vraiment pas. Les deux injonctions signèrent le fracas de l'espoir, annoncèrent une conversation que Lazare avait peur d'avoir. Il retint son souffle quelques secondes, et laissa à Ruben le temps de reprendre la parole, ne voulant pas le couper. Il ne répondit pas à sa question, ne savait comment lui dire qu'il n'avait pas la moindre idée du point de départ de ses sentiments. Sûrement parce qu'il n'y avait pas eu de commencement, l'affection s'étant créée au premier coup d'œil, et ayant faussé tout ce qu'il pensait de ce qu'ils partageaient.

Il ne pouvait lui formuler cette vérité à voix haute, et ne pouvait pas plus lui avouer que certains de ses sentiments s'étaient peut-être présentés alors même qu'il avait Frida à son bras. La pensée de la demoiselle disparue lui mit un coup supplémentaire au cœur, le força à se racler la gorge pour pouvoir avaler sa salive. Le visage baissé, il ferma les yeux un court instant ; lorsqu'il les rouvrit, Ruben s'était relevé. Il était debout, lui faisait face, comme un duel qu'ils devraient entamer pour ne pas seulement repartir chacun de leur côté, et oublier cette relation tissée au fil des années. Il aurait aimé dire quelque chose, mais le premier mot commença déjà à buter contre son palais : articuler serait difficile. Il se contenta alors de refermer sa bouche, et garder ses pensées pour lui. Ruben commença à faire les cents pas, et reprit la parole sans que le procureur n'ait pu placer les mots qu'il souhaitait lui soumettre.
Les mots refusaient de s'élever entre eux, il lui fallait alors parler avec ses gestes. Il fit donc un pas vers lui, un pas qui voulait dire beaucoup, un pas qui contenait tout ce qu'il essayait de dire mais que le begaiement refusait d'exprimer. Dans ces moments-là, le premier mot était toujours le plus difficile à sortir, et ce premier pas fut également le plus difficile à faire. M'approche pas. Il ne pouvait pas parler. Il ne pouvait pas l'approcher. Il ne pouvait que l'écouter, le regarder, et le voir chuter. « J'pouvais pas. » Il entendit soudainement les paroles de son père : crache-le ce mot ! Il n'eut pas le courage d'en cracher un de plus. La vérité était là, mais pas entière. Il ne pouvait rien lui dire, mais surtout, il ne savait pas. Comment mettre des mots sur des sentiments dont il n'avait pas réellement conscience ? Ruben avait toujours été d'une importance singulière dans sa vie, mais les aléas de son quotidien l'empêchait de prendre tout ça pour l'amour. Il n'était pas certain que son ami ait entendu ces trois mots prononcés trop vite, plus crachés que véritablement prononcés.

Peut-être qu'il avait raison, après tout : pourquoi il lui disait ça ? Il avait lâché l'information comme si elle n'avait aucune importance, par réflexe. Il ne l'aurait pas fait dans le cas contraire, en aurait été incapable. Il n'avait pas choisi de tout lui révéler, alors pourquoi ? Comment pouvait-il le savoir quand il n'était pas à l'origine de la confidence ? C'était son cœur, caché dans sa poitrine, qui avait pris la décision à sa place. Il leva le pied pour faire un pas de nouveau, mais se ravisa en se rappelant de son ordre de ne pas l'approcher. Il resta le pied en l'air, comme un joueur de foot venant de frapper dans la balle et attendant de voir si elle entrait ou non au fond des cages. Il aurait pu rester ainsi des heures, son équilibre étant plus qu'entrainée, mais il finit par reposer le pied par terre et croiser les mains dans son dos. Il ressemblait à un écolier qu'on réprimandait ; un comble pour lui qui avait toujours fait tous ses devoirs et plus encore, lui qui s'était démené pour être la fierté de ses parents, l'objet d'admiration de ses frères, et la meilleure version de lui-même. Il aurait aimé l'arrêter, mais n'en avait ni les moyens, ni la force. Ruben devait aller au bout, et le chasseur comprenait peu à peu d'où venaient tous ces sentiments négatifs qu'il déversait si abruptement depuis plusieurs minutes déjà. « De quoi tu p-. » Des années que je le porte dans ma putain de peau, qu'il faut que j'arrête d'y croire. Il avait tant besoin de lui demander de quoi il parlait. Il en avait une idée, comprenant peu à peu ce qui se tramait depuis toutes ces années, mais n'était pas certain de remettre toutes les pièces dans l'ordre.
Il avait besoin d'aide, mais personne ne serait là pour le sauver. Il pinça ses lèvres, réclama à son esprit un minimum de lucidité sur l'état émotionnel de son ami, et lui intima de faire des connexions par la même occasion. Il analysa la situation, ainsi que les mots de son meilleur ami, et fit appel à son esprit analytique, de chasseur, pour mettre des images claires sur ce qui était en train de se passer. Il n'était pas doué dans les rapports humains, mais savait décortiquer, il lui fallait seulement le temps de recréer une logique qui ne lui appartenait pas.

Il fit deux pas en arrière, lorsque Ruben se retourna. Il devait partir. Il ne pouvait l'aider, il ne savait comment faire ces choses-là. Le premier réflexe qui lui était venu à l'esprit avait été de penser à le prendre dans ses bras, et ne plus le lâcher avant que les tremblements ne prennent fin. Mais Ruben lui avait demandé de ne pas l'approcher, alors comment faire ? Partir. Il était chez lui, mais pouvait attendre sur les marches de son péron que la tempête ne prenne fin. Il fit un pas de plus en arrière, le regard braqué sur le dos de son meilleur ami qui semblait être bien plus que ça. Et un détail le força à rester, un détail qu'il n'avait pas remarqué dans sa voix, parce qu'il n'arrivait jamais à comprendre ce qui se passait dans ces moments-là, trop paniqué pour être assez attentif. Ruben pleurait. Il ne pouvait le laisser ainsi, et attendre à l'extérieur que la tempête ne passe. Il devait calmer lui-même la déferlante, donner un coup dans son courage pour foncer vers son ami et l'empêcher de se faire tant de mal. Il s'en voulut d'avoir pensé un seul instant quitter cette pièce avant que Ruben ne soit calmé, il se mortifia intérieurement - abstraitement, mais peut-être plus physiquement plus tard - d'avoir été si stupide ne serait-ce qu'une minute. « Benny ? » Le surnom sortit bien plus facilement que les derniers mots, il n'eut même aucun mal pour lui adresser.
Il refit trois pas en avant, pour revenir à sa place initiale. Un regard circulaire l'aida à envisager toutes les possibilités, et comment pouvait-il l'aider s'il ne pouvait communiquer avec lui ? Il eut envie de se brusquer à la parole, et tant pis si la moitié des mots devaient rester coincés dans sa gorge, tant pis s'il devait buter contre chaque syllabe, tant pis s'il avait l'air ridicule. Il lui devait bien ça. Il fit alors les pas restants pour l'atteindre, et se posta juste derrière lui, droit comme un i, comme le soldat qu'il avait du mal à étouffer même dans ces moments-là. Il serra les dents, désolé de se savoir aussi impuissant, et voulut frapper dans un mur pour évacuer sa frustration. Il avait prévu de se reposer, de reprendre des forces avant une chasse qu'il savait périlleuse - comme toutes les autres - mais cette soirée se montrait plus fatiguantes que toutes les précédentes, que toutes les chasses possibles.

Et une fois de plus : il se trouva désolé de ne pas avoir trouvé le courage de l'arrêter avant. Lui si courageux, bravant tous les dangers, jusqu'à risquer sa vie un nombre incalculable de fois. Il aurait dû se mettre entre Ruben et sa terreur, mais les mots lui manquaient, et les gestes encore plus. Les dents toujours serrées, en rogne contre lui le monde entier, mais surtout contre lui-même de ne pas avoir rempli une mission de la plus haute importance : veiller sur l'homme qui comptait tant pour lui. Il se redressa alors encore plus, et contourna Ruben afin de se poster face à lui : repousse-moi, ça m'est égal. Il leva une main, et attrapa celle de son amant, la serrant dans ses doigts afin qu'il ne lui échappe pas. La vague de peine, de terreur, de ressentiment qu'il prit de plein fouet fut d'une violence qu'il n'aurait pas soupçonnée. Le don au bout des doigts, et des gants qu'il ne portait pas. Il ne lâcha pas pour autant, accepta de partager ses émotions les plus déstructrices, afin de mieux le comprendre, et mieux l'aider. Il se rapprocha plus encore, et lâcha finalement sa main, afin de le laisser en paix. « Je ne sais pas quoi te dire. » La diction revenue, comme par obligation. Il s'était concentré pour prononcer ce "pas" qui aurait bloqué ses cordes vocales. Il ne voulait pas cracher ces paroles, refusait de faire ainsi. Lui qui n'avait jamais été loquace, aurait donné énormément de sa personne pour pouvoir lui adresser un récit entier sur ce qui comptait vraiment : lui. « Comment as-tu p-pu ne pas t'en douter ? » Le "pas" maîtrisé, travaillant sur son souffle par la même occasion. Il osait lui dire cela alors que lui n'en doutait pas non plus. Mais s'il était aveugle concernant ses sentiments, depuis toujours, Ruben semblait infiniment plus clairvoyant. « T'as toujours été plus imp-portant que tout le reste. » Il aurait aimé le toucher en lui disant ces quelques mots, le prendre contre lui, lui montrer qu'il ne s'agissait pas de paroles en l'air. Benny l'accepterait-il ?

Il n'en était pas certain, mais était prêt à prendre le risque. Il l'attira contre lui, sans aucune violence, plus capable maintenant qu'il n'entrait plus en contact avec sa peau, et enroula ses deux bras autour de lui, dans une étreinte qu'il voulut réconfortante, mais qu'il risquait de regretter. « Je suis qu'un abruti, mais tu mérites pas de te mettre dans cet état pour moi. » Il n'osait même pas lui parler de ses sentiments à lui, de ce qu'il comprenait dans sa réaction et dans ses paroles. Il ne se sentait pas assez légitime pour lui réclamer des explications. Il le serra dans ses bras, et trouva seulement la force de lui demander : « Je savais pas que tu ressentais tout ça ... » Pourquoi tu ne me l'as jamais dis ? Il ne posa pas la question, la trouvant déplacée. Il ne s'agissait pas de lui, mais de Ruben. Il avait l'impression d'avoir une bombe entre les bras, capable d'exploser à n'importe quel moment. Et si tel devait être le cas, alors il accepterait d'en subir la déflagration. Il se laisserait faire, si Ruben devait riposter, même physiquement. Il ne répliquerait pas, ne lui ferait jamais de mal. Jamais, intentionnellement. « Je te jure que j'en savais rien. » Il en vint à jurer. Habilement, il essayait de parler en utilisant le moins de p possible, afin de ne pas se tirer une balle dans le pied, essayer de rester le plus fluide possible. « Je te jure. » Et il était sincère. Il était foutrement sincère.



BURN WITH ME TONIGHT
i got all i need, when you came after me. fire meet gasoline, i'm burning alive and i can barely breathe, when you're here loving me, fire meet gasoline, burn with me tonight.
Revenir en haut Aller en bas
Ruben Mendoza
- le christ cosmique -
Ruben Mendoza
- le christ cosmique -
damné(e) le : o26/12/2020
hurlements : o1176
pronom(s) : oelle
cartes : ofurelise <3 (ava) ; heresy (sign) ; moodboard par le meilleur des procureurs du monde
bougies soufflées : o44
togetherless - lazare Empty
Re: togetherless - lazare
Mar 1 Fév - 0:32

Et elle était là, la crise. Insurmontable, traversant tout son corps, muscles, nerfs, raison, sans discernement. Noire et opaque, rideau voilant ses yeux pourtant grands ouverts. Plus puissante que Ruben aurait voulu. Il aurait voulu la contrôler, pour lui-même, pour Lazare. Ne pas lui imposer d'avantage de tout le fracas qui régissait sa vie depuis toujours, ces spécificités qui le rendait juste légèrement bancal. A trop manquer de stabilité, il savait qu'il finirait par basculer. Avait tout fait pour le prévenir mais il arrivait quelques fois qu'il n'y arrive pas, Ruben. Que les émotions soient trop intenses, que le tumulte devienne beaucoup trop bruyant. Le bunker dans son sous-sol n'était pas uniquement une manière de se protéger des attaques extérieures, non. Il était aussi là comme un caisson de contention, pour protéger l'extérieur de lui-même.
Ce n'était pas faute de vouloir le faire pour Lazare. Ce n'était pas faute d'avoir tout fait pour protéger Lazare. Tantôt des dangers qu'impliquait la vie à proximité de Ruben, tantôt de tout ce qu'impliquait la vie de Ruben à proprement parler. Mais les murs de verre et de miroirs qu'il avait érigés étaient beaucoup trop fragiles pour cette réalité. Brisés d'un simple coup d'espoir, ils s'étaient éparpillés en un million de fragments, juste à ses pieds. Larmes de verres, amères, le long des joues du Guédé. La morsure de leurs éclats, tranchants, le long de poignets qui ne saignaient plus l'amour depuis longtemps. Mais la crise s'en foutait, du temps. Les trous noirs existaient depuis aussi longtemps que l'univers, hantaient ses recoins infinis avec toujours la même hargne. Dévoraient l'espace, la lumière et la vie sans discernement. Sans se préoccuper de l'âge ou du potentiel de tous les êtres qu'ils anéantissaient.
C'était ça, le mot qu'il avait quelques fois chercher pour résumer les crises. Son corps tout entier qui se crispait pour cracher, expulser les fragments de vie qui pouvaient rester tandis que le néant, lui, emportait tout le reste. Longtemps qu'il avait cessé de prendre les petites pilules anti-néant que lui avaient filé les psys, longtemps qu'il ne se préoccupait plus que de la beauté des étoiles. Plus aucune inhibition depuis l'Incident, les émotions allant et venant comme le ressac dans tout son être. Ruben savait se gérer, connaissait les signes avant-coureurs aussi bien que les alternatives pour ne blesser personne. S'était même donné pour mot d'ordre d'épargner Lazare de ses crises, lui qui avait les frais d'une des pires.

Mais c'était inutile, n'est-ce pas ?
De gérer les crises, de prétendre que tout ce cinéma lui convenait.
De faire croire au monde que le néant était loin, que le trou noir ne reviendrait pas dévorer tout ce qu'il était.

La vérité était plus crasse, plus sombre que tout cela. Elle était bien plus douloureuse, n'avait aucune gloire, aucun éclat. Monde en nuances de gris devenu noir d'encre, et c'était en refusant les pilules qu'il avait retrouvé ses couleurs. Aurait dû éclater de joie, de couleurs et de lumières, en apprenant la vérité des lèvres de l'astre Lazare.
Avait éclaté, oui. En miettes et sanglots dans son foutu salon.

Paumes contre les tempes, dans un dernier effort de contenir les quelques fragments d'illusion qui restaient tout autour de lui. Une maison bâtie à grands renforts de pragmatisme, d'impressions et de certitudes. Chasser les étoiles ne bâtissait pas des vies, Ruben avait fini par le comprendre. Cherchait encore à se raccrocher aux impressions, même si c'était inutile. Des doigts s'enroulèrent autour de son poignet. Cri étranglé, le contact de la peau contre la peau le brûlant immédiatement. Réflexe, alors que son corps tout entier se tendit pour échapper au contact. Les yeux affolés de Ruben croisèrent ceux, visiblement inquiets, de Lazare. Lazare qu'il aurait préféré loin, Lazare qu'il aurait préféré ailleurs. Parti. La crise réagit à la place de Ruben, tira d'elle-même ce bras que tenait Lazare pour se dégager de l'étreinte. Ce n'était même pas une lutte interne, tant les émotions avaient pris le pas sur Ruben, dans son propre corps. Seuls restaient ses yeux pour voir la misère, ses oreilles pour capter le ronronnement de la voix de Lazare. Il l'aurait mis en garde, l'aurait supplié de ne pas approcher d'avantage, si les émotions n'étaient pas aussi fortes. Si l'amertume de ses propres larmes, si ses sanglots ne lui donnaient pas l'impression de vomir encore et encore toutes ces années de désespoir et de noirceur. Et les mots de son ami de tomber, étoiles filantes dans l'obscurité. Pluie de météores qui menaçaient d'achever le travail, de terminer de tout détruire sur leur passage. Une supplique, entre les dents. Mâchoires serrées, paumes contre les tempes, et ses doigts qui labouraient la naissance de ses boucles.

-Arrête... Arrête ça...

Continue. Dualité des sens, dualité dans le coeur. L'envie d'en savoir plus ébranlée par la crise, la certitude d'avoir eu raison d'y croire noyée dans les heures d'agonie à se dire qu'il avait tort. Le corps prisonnier du trop plein qui sourdait dans sa tête, il n'essaya même pas de se calmer. Compta naïvement sur Lazare pour comprendre le message qu'il essayait de lui intimer, celui de lui laisser le temps. La crise passerait, elle finissait toujours par passer. Violente, tumultueuse, mais temporaire. Quand il n'y avait plus rien à détruire ou à dévorer, le trou noir passait à autre chose. Mais Lazare n'avait pas l'air décidé à quitter son côté, pas plus qu'il n'avait l'air de comprendre la nécessité de laisser son ami seul. Sa voix retentissait en une kyrielle de paroles trop dures à comprendre, trop douloureuse à entendre. Il ne savait pas, lui, tout ce que Ruben avait espéré. Les heures, les journées à attendre que l'un ou l'autre de ses soleils daigne quitter son propre trajet pour venir évoluer un peu à ses côtés. L'agonie des étreintes partagées, corps contre corps, avec un rêve qui ne se réaliserait jamais. Il l'avait attendu même des années après, Lazare. Avait pris ses cachets pour faire passer l'orage, avait espéré que cette version moins dérangeante, plus arrangeante, soit la bonne. S'était haï de croire une telle idiotie, avait compris qu'une lune ne remplacerait jamais la radiance d'un soleil. Cachets au fond de la poubelle, pour ressusciter l'anesthésie. Et cette haine de lui-même qui ne l'avait pas quitté.
Qui était encore là, ravivée, attisée par le regard qu'il pouvait sentir contre sa peau. Accroupi sur le sol, ramassé contre lui-même pour mieux disparaître. Et pourtant, pourtant cette envie d'entendre encore la voix de Lazare. De l'entendre parler, mais pas pour dire ces choses-là. Dualité dans le cœur, l'envie de lui hurler de partir comme celle de le supplier de rester. Car il n'y avait que de lui qu'il voulait l'attention, au fond. Et c'était ça le plus difficile à avaler. Pas les cachets qui changeaient la personnalité, pas les couleuvres qu'un gouvernement tyrannique essayait de faire avaler à la population, pas le fait que l'homme était fait de failles et faisait si facilement le mal tout autour de lui.

Non, le plus difficile à avaler c'était le bien que lui faisaient ces révélations. Saillies de lumières dans l'obscurité, des éclats d'apaisement au milieu de la tempête. Autant de mal que de bien. Il n'y comprenait plus rien, Ruben. Sentit les bras de Lazare s'enrouler autour de lui et son premier réflexe fut le même que quelques instants plus tôt. La brûlure était insupportable, partout où il était en contact avec son ami. Un courant électrique traversa ses muscles, le poussant à se débattre aussitôt contre l'étreinte. Ni maître ni dieu de son propre corps depuis longtemps, encore plus maintenant que Lazare venait de rompre l'unique défense qui le séparait encore de la crise. Se sentant basculer en arrière, Ruben enfonça ses doigts dans les bras de l'autre homme. Tenta de les repousser de toutes ses forces, donna des coups de coude, de genoux. De pieds, quand ils ne raclaient pas le sol pour essayer de se libérer. Il sentit ses membres heurter ceux de Lazare, plusieurs fois. Ne l'entendit pas, aveuglé par le besoin de s'échapper de l'étreinte. De partir, de fondre hors de sa propre peau tant le contact lui était douloureux. Le cœur battant à tout rompre contre ses tempes, il l'aurait mordu, il l'aurait griffé, s'il l'avait pu.

Mais ce fut un mot, un tout petit mot de rien qui parvint finalement à ses oreilles. Pas de ceux que l'on veut entendre, pas de tous ceux qui lui faisaient un tel mal de chien, à lui en vriller âme, cœur et cervelle. Non, c'était un de ces mots que certaines personnes ne prononcent jamais. Et le noir qui voilait ses yeux s'étira juste une seconde, juste le temps qu'ils soient dits. Jure. Lazare ne jurait jamais, c'était interdit. C'était ce que les parents Mendoza considéraient comme trop important, c'était ce que les Sinclair tous entiers semblaient redouter. Bien trop gros pour la bouche de son ami, et pourtant le mot était tombé. Entre eux. Pour lui.
Pour lui. Les sanglots reprient de plus belle, mais la crise, elle, s'étiolait doucement. Plus de forces pour la combattre, pour se débattre. Plus rien contre quoi se battre, si la vérité était jurée. Lazare Sinclair n'était pas le monstre que la crise aurait voulu qu'il soit. Et même si ses bras continuaient d'imprimer leur brûlure dans tous ses membres, Ruben s'y agrippa. Les retint plutôt que les repoussa, ces foutus bras. Dualité des sens, agonie du cœur. Il avait suffi que de ce mot, de toute son importance, pour que le soleil commence à chasser le trou noir. Epuisé de lui-même, battu par ses propres émotions. A ne pas savoir si c'était lui ou Lazare qui berçait l'autre mais, le nez pressé fermement contre ce bras qui le serrait trop fort, il sentait que la violence au moins était passée.
Ne restait plus qu'un champ de ruines.

Il ne sut pas combien de temps ils restèrent là, dans ce salon. S'il avait continué de pleurer encore longtemps, si Lazare avait dit d'autres choses. Rien ne supplanterait ce mot, parce que celui-là, le légiste ne le prononçait jamais. Raccroché à cette bribe et à ses bras pour ne pas se laisser tomber. Peut-être que ses doigts avaient laissé une marque dans la peau de Lazare, ses coups laissé des bleus. Et la haine de revenir doucement contre lui-même, malgré que l'épuisement ait fait revenir le silence dans son esprit.

-Vingt ans...

La voix éraillée et le coeur en lambeaux, Ruben soupira. Décrispa ses doigts de l'avant-bras de Lazare, se laissa reposer dans le creux de son épaule. Les combats contre ses nerfs, il les connaissait. En connaissait les répercussions, depuis bien longtemps. Mais jamais ils ne lui avaient donné l'impression d'être aussi vide. Anesthésié par le trop plein d'émotions, peut-être qu'ils avaient eu raison, à l'époque. Peut-être qu'il était là, le but des petits cachets. Lisser l'agonie pour la rendre plus tolérable. Parce qu'épuisé qu'il était, il ne savait même plus s'il devait continuer de se haïr ou être heureux de savoir qu'ils avaient perdu deux décennies à être des imbéciles. Un rire sans joie passa ses lèvres. Il cala sa tête dans le creux du cou de Lazare, l'impression d'être un pantin duquel on aurait coupé les ficelles.

-Vingt ans à avoir jamais rien vu...

Et ce n'était même pas un reproche contre Lazare. Plutôt contre lui-même de n'avoir rien su montrer. D'avoir toujours tout gardé. Champ de ruines intérieur, il en évaluait à présent la portée, de son erreur. Mais son soleil avait juré. Ne disaient-ils pas faute avouer à moitié pardonnée, les parents Mendoza ? Peut-être que c'était par là que tout devait commencer. Par avouer. Car dans son coeur, Lazare avait été pardonné à l'instant même où leurs lèvres s'étaient touchées pour la première fois, dans cette chambre d'étudiant qu'ils partageaient. Responsable de rien et catalyseur de tout.

-... Pourquoi tu me l'as jamais dit ?

Un murmure affaibli, lassitude dans tout le corps. Vingt années dans le sang, dans les muscles, vingt années de trop dans un système qui n'en pouvait plus. Et ce fut là que la réalisation le heurta comme une gifle. Que certains regards, que certaines remarques, se dévoilaient sous un tout nouveau jour. Justifiaient l'amertume qui lui étreignaient la gorge depuis aussi longtemps qu'il pouvait le replacer, car en vérité, ça coulait de source.

-C'est à cause de tout... ça, c'est ça ?

Et sa main de se lever pour le designer. Lui, Ruben tout entier. Avec ses fêlures, avec ses crises, avec ses difficultés à se concentrer, à comprendre, à évoluer sur le même pan d'existence que les autres. Trop de travail pour le gérer, une bonne action, peut-être un acte de charité que lui faisait Sinclair. Parce que Lazare était généreux, il était altruiste et capable d'un amour profond, Ruben le savait très bien. Avait dû épuiser des trésors de patience en ce qui le concernait, surtout depuis l'Incident. Là où tout avait basculé, et, la barrière des inhibitions apparemment levée, les excès avaient commencé. Ca ne pouvait être que ça, que pour ça que Lazare n'avait rien dit. Pour tous les dangers qu'impliquait évoluer sur le même plan que Ruben. Il se mordit la lèvre inférieure, le regard se perdant quelques part à l'horizon.

-T'as pas besoin de le dire, je comprends... Moi aussi j'ai du mal, des fois...

Et ça aurait pu être de l'ironie. Après tout, ça l'avait été à plusieurs reprises, pour minimiser une situation, pour en désamorcer une autre. Mais Lazare avait juré, et c'était pour cette raison qu'il n'y eut aucune ironie, aucune humour, dans sa manière de délivrer les faits. Seulement une compréhension profonde et sincère, parce que tout était vrai. Lui aussi aurait voulu s'extirper de sa propre tête, lui aussi savait à quel point il était épuisant de se supporter. Une main lasse vint chercher celle de Lazare, caresser le bout de ses doigts. Il soupira, vaincu.

-Tu mérites mieux que tout ça.




i have become
comfortably numb

Revenir en haut Aller en bas
Lazare Sinclair
- la grand-mère à moustache -
Lazare Sinclair
- la grand-mère à moustache -
damné(e) le : o28/12/2020
hurlements : o1661
pronom(s) : oshe/her.
cartes : o(av/icons) fürelise (cs/sign) tucker, blondieressources.
bougies soufflées : o44
togetherless - lazare Empty
Re: togetherless - lazare
Mer 2 Fév - 23:30


togetherless

Il se réveillerait certainement avec quelques marques, quelques griffures, des témoins de cet instant qui semblait échapper au contrôle de Lazare. Les créatures les plus redoutables ne pouvaient marquer le cuir du chasseur ; l'agilité assez aiguisé pour se sortir de bien des situations, l'entraînement payait toujours. Et pourtant, Ruben aurait pu le blesser de bien des manières ce soir-là, plus rudement qu'avec ses coudes, s'il avait décidé de frapper pour de vrai. Il aurait été bien difficile de taire les réflexes de celui qui avait été dressé pour les avoir plus sensibles que la moyenne, mais il se serait fait violence pour s'assurer de ne pas faire de mal à son ami. Il refusait de répliquer, de rendre le moindre coup, de s'essayer à un jeu qui semblait bien trop risqué. Il était en capacité de le neutraliser sans lui faire de mal, d'avoir les gestes assez précis pour le mettre hors d'état de nuire sans le blesser, mais à quoi bon éveiller le palpitant de son ami, plus qu'il ne l'était déjà. Il souffrirait de lui faire peur, de le secouer trop fort alors qu'il n'avait besoin que de son aide, son soutien.
Il gardait les bras autour de lui, le maintenait avec force mais sans violence ; une attitude qu'il garderait jusqu'à le relâcher. Il en venait à se demander s'il ne devait pas abandonner l'idée de le calmer ? Et si son absence pouvait avoir un effet plus apaisant que le moindre de ses gestes ? Mais il ne pouvait le laisser ainsi ; plus que tout, il avait peur qu'il ne s'en prenne à lui-même. Il n'aurait pu survivre à une chose pareille, la moindre blessure qu'il aurait pu infliger à son propre corps ; comme punition ? Lazare n'en savait rien, mais il connaissait trop bien son ami pour accepter de le garder sans surveillance.

Il avait fini par se mettre à genoux, suivant la chute pour amortir l'impact. Il se voulait réconfortant, et avait l'impression que la pression de ses bras avait l'effet inverse. Il eut envie d'attraper son téléphone, composer le numéro d'Enoch, et l'implorer de trouver une solution ; si lui n'avait pas le pouvoir d'apaiser son ami, qui en aurait la force ? Il ne pouvait l'adoucir, mais était en capacité de lui permettre d'expulser les mauvaises ondes qui lui collaient au cuir. Il encaissait les coups, ne reculait pas face aux coudes, aux pieds, à tous les membres de son ami qui stoppaient leurs courses contre le corps du chasseur. Il ne lui dévoilerait pas les bleus qui en résulteraient, garderait pour lui les égratignures, même les plus étendues. Ruben avait plus de force qu'il ne l'aurait cru, eut besoin de ses deux bras pour le maintenir contre lui, malgré les rouades qu'il recevait avec toujours plus de ferveur de sa part.
Le pire ne venait pas des coups, mais du contact. Les mains touchant une parcelle de peau, et le don l'empêchant d'y voir très clair. La douleur physique était presque inexistante, le chasseur avait subi de bien pire punitions au cours de son éducation, et plus globalement durant sa vie. Mais la sensation de tomber, cette détresse profonde qu'éprouvait Ruben était plus pressante. Il garda les yeux fermés, domptant à la fois son ami, et les émotions éreintantes qu'il lui transmettait malgré lui. Il aurait donné beaucoup pour porter ses gants, mais ne s'en inquiétait jamais lorsqu'il s'agissait de Ruben.

Il n'avait pas le temps de chercher ses mots, pas plus que de se questionner sur ce qui était le plus bénéfique pour le supplicié. Le seul recours à sa disposition était la patience. Résigné, à attendre que son meilleur ami ne se calme de lui-même ; seule force restante étant ces quelques mots qui n'avaient rien de préparés tant ils lui venaient du cœur. Mêlés d'incompréhension, et d'une lourde dose de compassion. Lazare n'avait jamais remarqué les signes envoyés ; n'avait voulu y croire, peut-être, quand son frère y faisait allusion. Il se contentait de lever les yeux au ciel, changeant de sujet. Ruben ne pouvait éprouver ces choses-là à son égard. Il ne s'agissait pas de fausse modestie, Lazare en était dépourvu, mais bien d'une lucidité qui n'appartenait qu'à lui. Les évènements l'empêchaient d'y croire, de se dire qu'il pouvait exister quelque chose de plus romantique qu'amical entre deux êtres comme eux. Et pourtant, la simple terreur qu'il ressentait à cet instant précis, et qui vrillait entre ses tempes sans qu'il ne parvienne à l'en chasser, prouvait qu'il s'était trompé. Le lien existait, concernait Ruben dans sa globalité, et non le souvenir qu'il en avait.

Il pouvait le lui jurer, et c'était ce qu'il s'était hasardé à faire. Les dents serrées, les yeux pressés, le corps entier contracté afin de maintenir ses forces. Il n'avait aucun mal à l'immobiliser, mais la peine qu'il ressentait à identifier l'état de son amant ne lui donnait aucun courage supplémentaire. Il se fustigerait, le moment venu ; rendrait quelques soupirs, mêlés de prière, demanderait pardon en essayant de se convaincre qu'il avait agi convenablement. Les gestes de Ruben changèrent. La créature qui semblait avoir pris vie, déchirant tout sur son passage, venait alors s'agripper à lui, avec une force redoutable. Il resta immobile, Lazare, ne sachant s'il devait alors - enfin - le lâcher, ou non. Il garda ses bras bloqués, autour de lui, comprenant que c'était le souhait de son amant. Il le sentit abattu contre lui, sans force, résigné. Il put détendre sa prise, se contentant de le maintenir, sans y accorder la moindre force, ni fermeté. Il soupira en le gardant contre lui, et baissa la tête en sentant la tristesse prendre le relais.
Le corps entier commença à imprimer quelques gestes tendres, berçant la carcasse de Ruben contre la sienne, dans un rythme qu'il n'aurait accordé qu'à un nouveau né. Il n'ouvrit pas les yeux, chercha à se débarasser de ce qu'il avait retenu des émotions captées, de tout ce que le don lui avait infligé. La seule pensée qui le traversait étant : si j'ai retenu tous ces tourments, comment peut-il tenir le choc ? Le pouvoir lui permettait une fresque de ce que ressentait l'autre, mais il n'en ressentait pas tous les détails, toutes les aspérités, tous les désagréments. Lourds à encaisser, mais bien moins que celui qui vivait réellement l'expérience.

Il n'eut même pas l'envie de se surprendre de sa capacité à prendre sur lui, tant le contact avec Benny était devenu naturel avec les décennies. Il avait grimacé les premiers temps, s'était parfois montré un brin violent, mais n'avait aujourd'hui que le besoin de le sentir près de son cœur. Le contact partagé avec lui n'était plus qu'une évidence, et il ne pouvait plus s'en féliciter, seulement l'apprécier. Il apporta sa main jusqu'à la nuque de son meilleur ami et plongea les doigts dans ses boucles, l'incitant à se reposer contre son épaule, le visage dans son cou. Pourquoi tu me l'as jamais dit ? Il ouvrit enfin les yeux, en reprenant son souffle, comme s'il n'avait pu respirer tant que les pensées de Ruben n'étaient pas revenues à la normale. Il prit une grande inspiration, mais ne répondit pas. Il préféra le laisser poursuivre, reprendre la parole afin de vider son esprit de pensées négatives. Lui, ne faisait que rester ainsi, contre lui, une main agrippée à sa nuque pour en caresser quelques bouclettes, et l'autre toujours autour de lui. Il n'était pas là pour prendre de la place, seulement pour l'aider, pour le soutenir ; alors c'était ce qu'il faisait, humblement, en regardant au loin, silencieux. Il baissa son regard lorsqu'il reprit la parole, et que ses doigts vinrent s'emparer des siens.

Les pleurs calmés, il sentit qu'il était de son devoir de lui répondre, dire quelque chose, n'importe quoi. Il passa une langue sur ses lèvres, leva un instant les yeux vers le ciel, puis dévia vers son ami. Il ne savait comment formuler, sachant que ses mots pouvaient être mal compris ; lui qui avait l'habitude d'enchaîner les maladresses dans ce genre de configurations. Il ne pouvait se tromper, se devait d'être pertinent. « Tu n'as jamais été le problème, Benny. » Il lâcha ce que tenaient ces deux mains, et cherchèrent ses joues afin d'en chasser les larmes. Il ne pouvait le laisser ainsi, se devait de mettre un terme à ce désarroi qui peignait ses traits imbibés de perles. Il passa alors ses doigts contre les joues de son amant, le visage impassible - comme à son habitude - quand bien des émotions différentes passaient pourtant à travers son cœur. « Ne te mets jamais le contraire en tête, rien de tout ça n'est en cause. » Il se remit debout avec beaucoup d'attention, accompagnon son geste de pressions douces contre les bras de son ami, puis de sa taille, afin de le faire avancer en même temps que lui. Il refusait de le laisser ainsi au sol, l'accompagna donc difficilement jusqu'à son canapé, où il l'invita à s'asseoir, posant les deux mains contre ses épaules.

Il eut envie de lui demander de ne pas bouger, mais savait parfaitement qu'il n'en aurait pas la force, ne craignait donc pas de retrouver son canapé vide à son retour. Il marcha jusqu'à sa cuisine, et y attrapa une bouteille d'eau. Il en profita pour attraper une barre protéinée, et revint vers Ruben en se postant devant lui. Il ne s'installa pas à ses côtés, se contenta de s'accroupir face à lui, et lui tendit la bouteille d'eau et la barre de céréales sans calorie. « Tiens, j'aurais aimé t'offrir plus de sucre mais ... j'ai pas mieux. » Il s'interdisait les sucreries, et même ses barres de céréales étaient allégés et hyperprotéinées. L'entraînement accompagnait ces encas, et il n'avait jamais été un gourmand. Il aurait aimé avoir gardé quelques douceurs qu'aimait son amant, mais n'en avait plus. Il pouvait toujours lui faire avaler un sucre en morceau, mais voulait le voir d'hydrater avant tout ; il lui tremperait un sucre dans de l'alcool, ensuite.

Mais il n'avait toujours pas répondu à sa question initiales, à savoir pourquoi il n'avait jamais fait le premier pas, à lui dire ce qu'il avait sur le cœur le concernant. Il attendit que son ami s'empare de ce qu'il lui tendait, et posa ses deux mains sur les genoux de son ami, sans pour autant le regarder dans les yeux. Il savait que ce serait plus aisé ainsi. « Les choses ont toujours été si évidentes entre nous, je crois que je n'ai jamais voulu remettre notre amitié en question. » Il garda les yeux baissés, et plissa les lèvres avant de reprendre. « Je ne pensais plus être capable d'aimer, et tu n'avais pas à subir mon incompétence dans ce domaine. » Il soupira : « Tu n'as pas à le faire, non plus, aujourd'hui. » Il avait été un fiancé honnête, concernant Frida, s'il fermait les yeux sur les nuits de débauche contre le corps de celui assis en fasse de lui ; mais l'histoire s'était terminée de manière tragique. Il n'était pas certain d'être fait pour entretenir une relation stable avec qui que ce soit ; Ruben se trompait, c'était lui, qui méritait mieux que ça. Les Sinclair n'étaient pas fait pour être heureux en amour, trop dangereux, trop difficile. L'expérience de Gabriel, avec Ruth, en était une preuve de plus. Ils ne pouvaient se mêler si aisément à ceux qu'ils étaient en devoir de protéger. Ruben ne pouvait faire les frais de ce qu'il était, du chasseur qui ne devait offrir son cœur à quiconque, sinon à Dieu. Il eut envie de le lui dire, mais ne trouva pas les mots pour cela, seulement un sourire d'une tristesse infinie, alors qu'il laissa ses doigts se faufiler vers une des mains de Benny, afin de se l'accaparer. « Tu es dur envers toi-même, tu l'as toujours été. Mais tu as tort. Tu mérites bien plus que tu ne le penses, et je n'ai jamais pu me considérer comme ... » ... un parti acceptable, pour toi. Il n'avait jamais rejeté l'idée de se marier, malgré la tragédie. Mais il avait plutôt pensé à un mariage de profit, plutôt qu'à l'amour. Pouvait-il seulement aimer, tel qu'il le fallait ? Il aimait Dieu. Il aimait ses frères. Il aimait Ruben. Il n'était pas certain d'avoir une place supplémentaire pour accueillir l'amour, et celui concernant son meilleur ami pouvait-il aboutir un jour ? En refusant ainsi de trop s'épancher sur ses émotions, il lui retirait l'occasion de prendre lui-même cette décision, et de faire son choix. « Tu me connais mieux que quiconque, tu sais que je ne suis pas fait pour ces choses-là. » Incapable d'aimer. La malédiction des Sinclair, il en était persuadé. « Et même si j'en ai envie, et que je ressens toutes ces choses pour toi, ce serait te mettre en danger. Je ne peux pas te perdre, je crois que j'en mourrais. »



BURN WITH ME TONIGHT
i got all i need, when you came after me. fire meet gasoline, i'm burning alive and i can barely breathe, when you're here loving me, fire meet gasoline, burn with me tonight.
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé
togetherless - lazare Empty


Revenir en haut Aller en bas
 
togetherless - lazare
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» ruled by secrecy (lazare)
» lazare sinclair & don mattheson (sms)
» ari williams & lazare sinclair (sms)
» i'll tell you a story that'll make a skeleton cry (lazare)
» dark side of the moon - lazare

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
flw :: exeter :: sirenwhyte-
Sauter vers:  
<