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 (cw) What love could get this vicious ? • | Ari

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Basil Egerton
- chérubin de la trépas-nation -
Basil Egerton
- chérubin de la trépas-nation -
damné(e) le : o27/08/2023
hurlements : o380
pronom(s) : oelle
cartes : oavatar (c)corvidae (c)WALDOSIA lyrics (c)des rocs
bougies soufflées : o42
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What love could get this vicious ?
-- I shook all the wrong hands at all the right times
Who did you expect me to be ? (c)idkhow
(cw!!; meurtre, gore, détresse psychologique)

2020.

Over and over, I keep going over the world we knew
Once when you walked beside me
That inconceivable, that unbelievable world we knew
When we two were in love...

    La sueur brûlante coule dans tes yeux ; tu ne vois qu'à peine sous le voile carmin, la couverture nuptiale de votre dernière étreinte. Tremblant, la respiration erratique, sourd à tout ce qui n'est pas les battements de ton cœur fou. Plus conscient de rien sinon la sensation de son corps chaud sous tes cuisses, de son sang sur ta langue, de la douleur dans la crispation de tes doigts écrasés sur sa gorge, refusant de lâcher prise de peur qu'elle ne se réveille. Tu t'abandonnes aux vagues successives qui te subliment de part en part, au contrôle absolu et aux intenses, au soulagement de la fin de tout. Libre, libre de respirer seul l'air vicié de ton délire. C'est terminé. Cette abjecte excroissance de ton existence a rencontré la mort, ta première amante. Sa dernière injure aura été de vouloir se faire mère et elle en aura payé le prix fort, maudites à jamais les dents qui avaient croqué le mot défendu. Hélas. Le ravissement de ton visage n'est qu'éphémère alors qu'une autre impression s'immisce dans un renfoncement de ton euphorie. Le vide.

    Basil.
    Qu'as-tu fait ?


   Si souvent, tu as rêvé ce même acte comme un fantasme impossible. Si souvent, l'impuissance de ne jamais pouvoir passer ce cap t'avait donné l'envie de pleurer de rage, si souvent tu avais vengé sur elle le mystère de cet horrible sentiment. Phoebe qui t'avait consumé presque dix ans, obsédant tes moments de rien comme l'ennui fait fumer les cigarettes par paquets de cent ; l'amour crevé, souillé, était resté opium. Incapable de t'en défaire, malgré la haine ardente qui n'avait cessé de croître à mesure que votre idylle devenait routine. Maintenant, il ne te restait plus rien.

...But the dream was too much for you to hold
Now over and over, I keep going over the world we knew
Days when you used to love me
Over and...

    Le vide te crève en deux, empire de minute en minute, alourdi de silence. Tu aurais pu rester longtemps, à entretenir la chaleur de son corps contre le tien grelottant, à l'abandon de toute notion d'être, piètre spectacle de la médiocrité humaine. Mais insidieuse et subite, la réalité te rattrape et l'urgence te rend sobre comme un shot d'adrénaline pour quelques instants au moins. Tu es un tueur, maintenant. Et tu seras pourchassé comme tel, hanté par la peur de la capture, pris dans le piège de tes émotions. Tu sais pertinemment ce qui t'attend si tu ne réagis pas rapidement. Au mieux, l'incarcération. Au pire, la peine de mort. Oh, comme elle grandit vite, l'angoisse ; comme les ombres s'étendent comme une cage. Le reste peut attendre, il faut que tu recouvres ton crime avant le lever du jour – et avant de perdre la tête, par pitié, remets-toi dans ta tête, Basil.


    Batterie faible. Le numéro d'Ari Williams entré pour la sixième fois dans le téléphone d'astreinte du Sacred Heart, l'écran n'ayant de cesse de revenir en veille, tu hésites encore à amorcer l'appel. C'est la meilleure idée que tu aies, ta meilleure chance de t'en sortir. Après tout, c'est pour ça que le Macchabée l'emploie. Mais pas toi, toi tu n'as rien à y faire. Et s'il refusait ? S'il te dénonçait ? Si les choses tournaient mal, jusqu'où te faudrait-il aller ? Il était légiste, après tout. Tu le connaissais depuis un moment, mais pas suffisamment pour le traiter comme un acquis. Jamais encore tu n'avais eu à prendre un tel risque avec aussi peu de garantie. Mais avais-tu seulement le choix ? Le temps s'écoulait et ne t'attendait pas, le plus vite le corps serait débarrassé...
    « Il y a une livraison pour toi. C'est moi aujourd'hui. C'est urgent, viens dès que tu peux. »
    Tu avais soufflé les mots à toute allure, raccroché avant d'obtenir une réponse. L'écho dément de ta propre voix résonne dans ton crâne, te fait ressasser le moindre accent de ta prononciation, t'oblige à te trouver de moins en moins convaincant. Jamais encore tu n'as fait l'expérience d'un trouble comme celui-là. Tu hais, hais de devoir dépendre de qui que ce soit, d'abandonner dans les mains d'un autre ta vie sur une décision que tu n'as pas pu laisser mûrir. Quand tu fermes la housse sur le visage défiguré de ton épouse, il n'y a vraiment qu'une seule pensée qui parvienne à se former entière dans ton esprit : tu devras peut-être mourir ce soir. Si les choses devaient en arriver là, tu ne te laisserais pas prendre vivant. Peut-être qu'au fond, c'est aussi cette issue que tu désires - savais-tu seulement encore vivre, respirer dans un monde où elle n'existait plus ? Si tu meurs ce soir, ce sera seulement la fin d'un mauvais rêve. Ha! Qui aurait cru que tu te crucifierais sur l'autel de l'amour. Certainement pas toi.


    Tu croyais t'être fait à l'idée de sa mort, il n'en était rien. Dans les minutes solitaires sous les néons éclatant de la chambre mortuaire, arrangé sur le chariot, le corps inerte de Phoebe ne te semble pas humain. Tu cherches ses yeux éteints dans son visage déchiré, tu ne vois que des formes inconsistantes, incapable de concevoir que quoi que ce soit autour de toi est réel. Le front dégoulinant de ta douche de tantôt, un couteau de cuisine engoncé dans une poche de ton pantalon, incisant déjà ta cuisse – pour Ari s'il dit non, ou pour toi-même, qui sait. A cette heure, il n'y a que toi ; l'immense salle déserte te donne l'impression d'un rêve lucide, une terreur nocturne comme tu en as traversé tant d'autres, et tu te réfugies dans cette idée comme une protection pour ta psychè. Tu te réveilleras au matin aussi ébranlé qu'alors, et sur l'oreiller à côté de toi Phoebe. Phoebe avant que le tisonnier ne lui arrache le visage. Phoebe avant que, la voyant respirer à travers sa face sans lèvres, tu ne te presses tout entier sur sa trachée, terrorisé d'assumer la conséquence de ton acte barbare. Au fond, si tu ne reconnais pas Phoebe sur le plateau, c'est que c'est toi-même que tu regardes. Ta rage, la violence dont tu es capable. Tu ne l'as jamais contemplée aussi franche et elle est presque belle.

    Des bruits de pas te font refermer la housse sur ton crime à la hâte ; de nouveau, ce sentiment d'urgence. Comme hors de ton propre corps, tu te contrôles comme un pantin et tentes de te donner contenance. Tentes d'être normal, comme si tes yeux n'étaient pas déments, comme si tu ne voyais pas le sang couler partout où tu posais ton regard, comme s'il y avait autre chose dans tes pensées qu'un pathétique désordre ponctué d'appels au secours. Une tentative de sourire quand apparaît la silhouette d'Ari et l'heure du jugement dernier. Bonsoir, merci d'avoir répondu à l'appel, d'être venu si vite, merci. C'est ce que tu lui dirais si tu savais parler. Le silence dure un temps de trop. Mais tu parviens à articuler quelque chose, bien que tu ne jurerais pas que ça ait beaucoup de sens.
    « Je ne peux pas donner les détails mais elle doit partir ce soir. »
    Est-ce qu'il te répond ? Est-ce qu'il vient te frapper ? Est-ce qu'il va te passer les menottes ? Tu bredouilles presque, prétendant être le plus cohérent du monde, sans parvenir à l'entendre s'il s'avérait qu'il dise quelque chose. Je sais qu'il est tard et que ce n'est pas d'usage, je sais que ce n'est pas mon rôle mais...
    « C'est un cas exceptionnel, ça n'arrivera plus. Je le jure. »
    Pourquoi jurerais-tu si tu étais là de ton plein droit ? Qu'importe. Le simple fait que tu aies réussi à aligner des mots est la plus grande victoire dont tu sois capable dans ton état, et tu t'en remets à lui pour prendre la relève, emmener le corps jusqu'à sa boucherie, et toi avec. Et si ce doit être ta fin, eh bien. Tant pis pour toi.




half a man and half apocalypse, the chase, the thrill that you cannot resist, that one there is a natural-born thriller.


Dernière édition par Basil Egerton le Mar 10 Oct - 1:21, édité 1 fois
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Ari Williams
- ari beau, c'est beau la vie -
Ari Williams
- ari beau, c'est beau la vie -
damné(e) le : o26/03/2022
hurlements : o1156
pronom(s) : oshe / her
cartes : ofürelise (ava) ; alcara (sign)
bougies soufflées : o46
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What love could get this vicious ?
Aotearoa n'était plus qu'un lointain souvenir, la grisaille d'Exeter revenue s'imposer dans sa vie comme une mauvaise habitude. La peau chargée de son soleil, mais le cœur toujours aussi froid, de plus en plus gelé à mesure que les journées l'éloignaient de la date de son retour. Les Williams avaient pansé des plaies, le sourire de Stuart à l'aéroport en avait soigné d'autres. Mais il y avait bien plus qu'une rature sur cette gravure d'Epinal qu'Ari s'était dépêché de retrouver. Une lacération brutale, qui avait déchiré la toile d'un bonheur qui aurait pu être parfait. Sagement enfermée dans son coffre-fort, confortablement nichée au fond de son coeur. La vidéo de ce crime parfait, de ce meurtre passionnel sans la moindre victime.

Niran ne devait pas le savoir. Niran ne serait jamais au courant de ce qu'il s'était vraiment passé.


La grisaille ne l'avait pas quitté, pas plus que la culpabilité ni la douleur. Il l'avait emportée avec lui, l'avait laissée diluer les couleurs vibrantes de sa terre natale. Une fuite calculée, en avant, sans prévenir personne. Ni le commissariat, ni l'agent Myers, ni même Stuart. Serre les dents. De vaines paroles pour tenter de se convaincre qu'il pouvait encore y faire quoi que ce soit. S'y laisser absorber, dans ce mantra. S'y laisser sombrer, pour mieux pouvoir recommencer à respirer. La grisaille ne venait ni de la ville, ni de la routine dans laquelle le légiste s'était laissé glisser sans la moindre résistance. Répéter ad vitam les mêmes gestes comme autant de garde-fous, afin de ne pas déraper de nouveau. S'éloigner de Niran, tant la grisaille ne venait pas de la ville, mais bien du souvenir.
La peau de Niran avait été si grise. Si froide, sous ses doigts...

Il aurait cru que la Mort le repousserait, après ça. Qu'il aurait besoin de plus de temps avant de se remettre au travail, que la vue de certains de ses patients serait plus difficile à supporter. Mais elle l'avait accueillie avec la compassion d'une ancienne maîtresse, ses bras décharnés grands ouverts pour le recevoir. Et Ari s'y était blotti pour mieux s'y réconforter. Les horaires de jour précédaient les horaires de nuit. Les salles de préparation du Macadam Macchabée succédaient les bloc d'opération de la Morgue. Serre les dents. Se perdre dans la routine, et laisser les teintes de gris diluer définitivement toutes les couleurs du monde n'était finalement pas une si mauvaise idée. Quitte à être devenu un monstre, autant accepter de perdre encore un peu de son humanité.

Boucher. A prendre davantage de missions nocturne, il avait fini aussi par s'habituer à ce surnom. Accomplissait son devoir avec la même diligence que pour ses activités diurnes, ne posait aucune question. Une ombre au masque chirurgical, les doigts voilés de gants violets, une charlotte recouvrant ses boucles poivrées. Uniforme de jour comme de nuit, et toujours les mêmes gestes. Les mêmes coups, contre la porte à l'arrière du Sacred Heart après les mêmes appels cryptiques, les mêmes salles dans lesquelles le bruit de ses talons résonnait un peu trop fort. Les mêmes visages, qu'il reconnaissait sans savoir les nommer, qu'il ne chercherait de toutes façons jamais à interpeller. Entrer. Découper. Repartir.
Disparaître. Tous les appels se ressemblaient, tous les regards étaient les mêmes. Jusqu'à ce soir là.

Les caractères noirs Sacred Heart Funerarium n'avaient tranché que trop l'écran de son téléphone portable. Cinq fois, déjà. Ari l'avait laissé sonner, sachant pertinemment qu'il avait posé une condition ferme et sans appel sur ses jours de présence. Uniquement le Mardi, le Mercredi et le Vendredi. Les jours de Niran. A la sixième, il avait fini par prendre l'appel, excédé. Prêt à rappeler les termes de son engagement, sauf que la voix qui résonna dans le haut-parleur n'était pas la même que d'habitude. Il y a une livraison pour toi. C'est moi aujourd'hui. C'est urgent, viens dès que tu peux. Basil Egerton. Il en connaissait la voix, pouvait reconnaître son visage parmi la masse des employés officiels et officieux qu'il avait pu croiser au Sacred Heart. Jamais celui qui l'appelait de nuit, et jamais avec une urgence pareille dans le ton. Ari avait dégluti, avait laissé son regard divaguer un instant sur le laboratoire terriblement vide où il avait décidé de perdre sa soirée. L'avait laissé buter sur le coffre-fort blanc, au pied de son bureau. Un frisson le long de la nuque, il finit par répondre qu'il se mettait en route. Il n'y avait aucun intérêt à rester avec le spectre de sa culpabilité, quand quelqu'un de bien vivant venait de l'appeler.

Les mains déjà gantées de violet, en arrivant sur les lieux. Le tendre silence de la Mort régnait entre les couloirs. Accompagna ses pas le long des corridors alors que le légiste retraçait rapidement la route qu'il prenait à chaque fois qu'il venait. Rassuré de ne pas croiser âme qui vive, il bifurqua en direction de la chambre froide dans laquelle il avait l'habitude d'œuvrer. Ne trouva rien qui puisse suggérer que l'on ait besoin de lui, fronça les sourcils en enfilant son masque et sa surblouse. Les autres, toutes les petites mains du Macadam Macchabée, n'étaient nulle part dans les autres pièces. Il allait rebrousser chemin avant de se souvenir que ce n'étaient pas eux qui l'avaient appelé. C'était Basil. Rien dans l'appel ne respectait le protocole établi par les têtes pensantes, il y avait fort à parier que le corps ne serait donc pas au même endroit que d'habitude. Ses doigts finirent par se poser sur une énième poignée, poussèrent la porte de la salle où les thanatopracteurs œuvraient de jour. Un espace qui lui était toujours fermement interdit.

Plus que l'odeur caractéristique de la mort, ce fut l'éclat d'une tignasse rousse qui l'interpella. L'agacement qui lui crispait les mâchoires, sous son masque, fondit comme neige au soleil en croisant le sourire bancal de l'autre homme. Un mauvais pressentiment au creux du bide, le boucher se contenta d'un hochement de tête et souffla un bref :

-J'ai fait au plus vite.

L'urgence qu'il avait perçue dans le ton d'Egerton se traduisait sur ses traits. Son regard, en particulier, n'était pas celui auquel Ari était habitué lors de leurs échanges diurnes. Basil avait l'air secoué, nerveux. Le Néo-Zélandais ne prêta pas beaucoup d'attention à ce qu'il disait, ses yeux sombres rivés sur l'élément qui trônait au beau milieu de la pièce. Juchée sur un chariot à roulettes comme si elle n'attendait que lui, se trouvait une housse mortuaire visiblement pleine. Le pressentiment s'accentua, il ne répondit rien aux bredouillements de son interlocuteur. Entreprit de le contourner, comme il le faisait d'habitude, son attention butant pourtant sur un élément différent de tous les appels qu'il avait pu avoir pour le Macadam Macchabée. Elle. Ari s'arrêta à mi-chemin, coula un nouveau regard vers Egerton. Interrogateur, cette fois.
La réponse qui arriva, elle, n'était pas celle qu'il aurait attendue dans ce genre de circonstances. C'est un cas exceptionnel, ça n'arrivera plus. Je le jure.

Et le pressentiment d'enfler, dans son estomac. L'expression était spontanée, presque enfantine. Une de ces promesses que l'on fait pour se rassurer, pour ne pas avoir à encaisser la pleine réalité de ce qui avait pu se passer. Une seule et unique pensée résonna, sous les boucles poivrées. Admission de culpabilité. Une autre la chevaucha presque immédiatement, dans le but d'étouffer aussitôt la moindre spontanéité : ne pose aucune question. Un rappel au carcan rassurant des règles du Macadam Macchabée, dans lequel il s'était lui-même lové pendant des années. Qui se traduisit d'un incertain :

-Je ne suis personne pour dire quoi que ce soit, je suis juste là pour faire mon travail selon le protocole.

Une détachement volontaire, coup de scalpel chirurgical sur la moindre connexion émotionnelle qui pourrait se faire entre les deux hommes. Malgré que la culpabilité de Basil l'interpelle, malgré qu'un million de questions commence déjà à se bousculer dans son crâne. Il reprit sa route, approcha du chariot. L'envie d'ouvrir partiellement la housse pour comprendre ce qu'il s'était passé lui brûlait le bout des doigts, mais il ne devait surtout pas y céder.

-On l'amène à la salle 3. Son territoire. Tu viens avec moi, en l'absence des autres, je vais avoir besoin de ton aide.

A commencer par l'ouverture des portes. Ses doigts s'enroulèrent autour des poignées du chariot, il ne laissa pas plus de temps à Basil pour se rebiffer. Pas alors qu'ils n'en avaient aucun devant eux, encore moins avec le "paquet" qui se trouvait en leur possession. Ramener l'autre homme sur son propre terrain lui permettrait de mettre davantage d'ordre dans ses propres pensées. Qui que soit la malheureuse enfermée dans sa housse mortuaire. Chaque pas le menant à sa salle d'opération était plus pesant que le précédent. L'immaturité de la réaction de Basil, devant le poids des conséquences, laissait un arrière-goût de bile au fond de son palais. Ari le laissa ouvrir la porte et poussa enfin le chariot dans son espace. La familiarité du lieu, malgré tout ce que ce dernier impliquait, avait quelque chose de rassurant. Il poussa son fardeau jusqu'au bord de la table d'autopsie. S'approcha de la housse pour l'ouvrir enfin. Un geste qu'il avait reproduit des centaines de fois, mais qui, pour la première fois de sa vie, le mit étrangement mal à l'aise.

La victime était méconnaissable. S'efforçant de conserver une expression parfaitement neutre, le légiste évalua les dégâts. Ne put s'empêcher de ciller devant la brutalité qu'elle avait subie, devant la violence qui avait effacé une partie de ses traits. L'hématome sur son cou, qui prenait une teinte violacée, preuve que le décès était très récent. Il ne connaissait que trop bien ce type de marques, ne pouvait qu'imaginer leur raison. La mort n'était pas planifiée, l'emplacement des coups, leur intensité, ne pouvaient prouver rien d'autre que l'intensité des émotions de son bourreau. Ari se retint de relever les yeux vers Basil, retint la vague de tremblements qui dévala dans ses membres. Il finit par libérer la femme de son cocon, remarqua l'alliance qui ornait sa main gauche et, se redressant, soupira longuement. Coula un regard d'un noir d'encre dans les prunelles de la seule personne qui pouvait, logiquement, être responsable de ce qu'il avait les yeux :

-Elle partira ce soir, comme convenu. Et nous reprendrons chacun le cours de nos vies comme s'il ne s'était rien passé. Mais pour que tout soit fait convenablement et vite, tu vas devoir m'aider. En seras tu capable ?

La dureté de son ton, tout juste voilée par le masque qui cachait ses traits. Pour la première fois depuis bien longtemps, la tendre étreinte de la Mort lui gelait le sang. Et si ce qu'il avait sous les yeux était une autre preuve de la culpabilité supposée de l'homme en face de lui, le légiste ne comprenait que trop toutes les conséquences de leur tête à tête nocturne. Un élément qu'il était facile de nier en bloc, quand on en venait à tous ceux qui étaient déjà passés sous les outils du boucher. Qui lui sautait à la figure, lourd de sens, maintenant qu'il avait bourreau et victime dans la même pièce.
Cette femme n'était pas n'importe qui. Et Ari était impliqué jusqu'au coup dans un crime passionnel, depuis la seconde où il avait franchi la porte du funérarium. Il avait bien trop à perdre pour permettre à Basil de se défiler devant les conséquences de ses actions.




How do I make you love me? How do I make you fall for me? How do I make you want me
And make it last eternally?

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Basil Egerton
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    Ce ne pouvait être que Ari, mais ç'aurait pu être n'importe qui d'autre, tu aurais eu bien du mal à le dire. La charlotte, le tablier, les gants de couleur définissaient davantage la profession que la personne, et même presque plus un alien qu'un être-humain. Et c'était tant mieux. C'était déjà bien assez difficile pour toi de te laisser voir dans un état pareil, de laisser à un autre la charge de choisir si tu allais vivre ou mourir, ou une alternative pire encore ; la couverture anonyme avait quelque chose de réconfortant, comme on autorise un chirurgien à vous ouvrir le ventre. Il sait ce qu'il fait, ça signifiait que toi, tu n'avais pas besoin de savoir, tu pouvais éluder la responsabilité de l'acte profondément cruel que tu étais venu demander de lui. Tu n'en mesurais d'ailleurs pas l'ampleur, mais engoncé encore si profondément dans le déni que tu n'étais même pas tout à fait conscient de traîner après toi un sac contenant le corps de ta femme, ni que tu donnerais l'image d'un bien piètre mari. Non, peu de chose a du sens, en cet instant crucial, si ce n'est de savoir s'il accepterait de te rendre ce service, et ce d'ailleurs même s'il en attendait une rétribution. Qu'importe ce qu'il en attendait, tu aurais été capable d'accepter n'importe quelles conditions pourvu que tu puisses cacher ton crime aux yeux du monde.
    Il approche, prononce quelques mots que tu ne saisis pas. Tu ignores parfaitement s'il te regarde et de quelle manière – car tu te sens bien incapable de te confronter à son regard, à cet instant. Un pied sur l'échafaud, le cou sur le billot, tout prêt à recevoir la guillotine. Chaque seconde d'incertitude s'associe à de nouveaux vertiges, alors que tu restes immobile, les bras le long du corps, dans une posture qui manque de naturel quand elle est tenue sur le temps long. Quelques mots te parviennent dans la mélasse vocale : travail, protocole. Des mots rassurants qui te font penser qu'il accepte, sans condition, sans jugement, quand bien même tu n'avais aucun droit de le lui demander. Retrouvant ton souffle pour la première fois depuis son apparition, tu te retournes dans la direction du chariot, concentrant tous tes efforts pour te ramener dans l'instant présent. Ce n'était pas le moment de te perdre, il y avait encore tant à faire dans cette nuit interminable. Tant à faire encore, quand tu reviendrais dans votre maison cauchemar, puis encore demain et les jours suivants, dans lesquels il te faudrait prétendre que rien de tout cela n'est de ta faute. Si, toutefois, ta vie continuait aussi loin.

    On l'amène à la salle 3, la consigne est brève, nette, efficace. C'est ce dont tu as besoin, quelqu'un pour te guider fermement au travers des prochaines étapes pour compenser le brouillon mental dans lequel le délire qui persistait depuis désormais plusieurs heures te plongeait incessamment. Tu acquiesces, acceptes de l'accompagner – à dire vrai, tu n'avais pas envisagé la chose autrement. C'était ta femme, ta Phoebe, tu n'allais pas tolérer de l'abandonner à un autre dans ses derniers instants qui devaient n'appartenir qu'à toi ; tu avais beau la haïr de tout ton cœur battant, elle était tienne et c'est ce qui t'avait empêché de la quitter tout ce temps. En revanche, tu n'avais pas pensé devoir participer à la boucherie pour autant, et le trouble puissant qui te passe devant les yeux est nettement visible. Oh, si tu avais préféré n'en mêler personne, tu aurais peut-être tenté la chose toi-même. Tu t'étais posé la question, à vrai dire, une fois seul dans cette chambre mortuaire que tu connaissais comme ta poche – tu savais où trouver tout le nécessaire. Mais tu n'avais jamais eu à faire ça. Tu ne savais même pas par où commencer. La tête, peut-être ? Tu fermes les yeux, contenant une première nausée, éteignant aussitôt toute pensée en ce sens. Et tu plonges tête la première dans un déni absolu, alors que hochant la tête de haut en bas, tu réponds : « Je ferai ce que tu me demanderas. »
    Ta propre voix te parvient d'outre-tombe, méconnaissable sous l'émotion dont elle est chargée, mais tu parviens tout de même à te mouvoir – suivant mécaniquement les consignes détachées de l'homme qui par ta faute tremperait les mains dans le sang encore frais de ton crime, deviendrait ton complice par la force des choses. Tu prends les devants, un pied après l'autre, ouvrant le passage sur le bruit familier des roulettes mal huilées. La salle 3 n'est pas l'une de tes salles habituelles, tu ne réalises d'ailleurs qu'alors que tu t'étais réfugié dans des environnements qui t'étaient plus familiers, mais qui ne correspondaient pas à ce fameux protocole que tu ne connaissais qu'avec une certaine distance. Tu étais conscient, bien sûr, des activités du Macadam Macchabée, les couvrant sans faillir, toujours un peu curieux, voire prêt à aider. Mais tu n'avais jamais participé à quoi que ce soit. Tu aurais tout le temps ultérieurement de penser aux conséquences que cette nuit aurait sur le rôle que tu jouais dans cette mascarade de corps. Si tu sortais de ce meurtre lavé de soupçons, tu aurais toutes les occasions de leur repayer la faveur.

    Sitôt dans la salle, tu t'effaces quelque peu – laissant Ari prendre les commandes. Et il y avait une étape, cruciale, qu'il vous restait à passer avant que tu puisses confirmer que tu n'avais plus à le craindre. Elle arrive bien assez tôt, alors que les mains violettes ouvrent la housse et exhibent à la lumière blanche le tableau de ton carnage, depuis l'écrasement de sa trachée à ses lambeaux de visage. Mesurais-tu pleinement l'horreur que tu imposais à cet homme ? Considérant son double emploi, tu prenais comme un acquis le fait qu'il serait prêt à tout encaisser, alors tu ne le redoutais pas tant. Plutôt, c'était pour toi que c'était embarrassant – tu avais l'impression de le laisser voir dans ton intimité. Lui qui ne te connaissait finalement que professionnellement, de visage et de réputation ; le premier, après ta femme, à te voir sans ton costume, sans la bride au cou, à l'abandon de tes pulsions les plus primitives et les plus intenses. Tu ne pensais même pas au fait qu'il comprendrait l'identité de la victime – pas encore.
    Ari cherche tes yeux, tu acceptes de les lui servir mais votre échange de regard demeure à sens unique. Tu n'arrives pas à voir ce qu'il pense, son visage dans tes rétines se reflète morcelé. C'est à peine si tu perçois un nez, un œil, un sourcil, le passage de l'un à l'autre comme une pellicule noire, comme des tâches oculaires, et tout a l'air déformé. Alors que lui, tu le sens et tu le sais, te voit pratiquement à nu, dans le vif de tes émotions. Il t'expose ses termes. Elle partira ce soir, comme convenu. Le soulagement est tel que pour un court instant, tu laisses derrière toi l'hypothèse de mourir. Et nous reprendrons chacun le cours de nos vies comme s'il ne s'était rien passé. Tu en aurais ri, si tu n'avais pas été siphonné de détresse. Reprendre le cours de ta vie comme s'il ne s'était rien passé ? Après tout ça ? Il ne pouvait pas le penser sincèrement. Peut-être n'était-ce pour lui qu'un corps de plus, toi tu ne reviendrais jamais au monde d'avant. Et tu n'avais même pas encore mesuré l'ampleur de tes actes, et de ce nouvel engagement. Tu le devras bien, car il te faudra l'aider dit-il. En seras-tu capable? Tu n'en avais encore pas la moindre idée, mais tu avais compartimenté suffisamment de choses pour être prêt à tout, absolument tout, pour peu que cela te sauve. Et tu étais trop loin dans cette idée pour pouvoir revenir sur ta décision.
    « Je vais faire de mon mieux, mais il faut que tu me guides. »
    Te retournant vers la paillasse où reposait partiellement le matériel, tu entreprends comme ton complice d'enfiler une paire de gants et un tablier de protection. Cette partie-là t'est heureusement familière, tu serais capable de suivre tes automatismes au moins jusqu'à ce qu'il soit question de démembrement – mais ce n'est pas un mot qui parvenait encore à se former clairement dans ton esprit. Tu viens prêter main forte à Ari pour passer le corps de Phoebe du chariot à la table d'autopsie, et en l'ajustant tu remarques à ton tour l'alliance à son doigt. Tu devines qu'il sait déjà. A quoi bon faire semblant ? Sans relever les yeux, sans t'inquiéter de son jugement, tu la retires avec infiniment plus de douceur que tu n'avais eu pour elle dans les dernières heures, même les derniers mois. Cela te semble si lointain, une autre vie, lorsque tu l'y avais placée là toi-même. Son visage juvénile, avant que tu le creuses de tant de soucis. Tu te souviens de ce jour victorieux où tu l'avais faite tienne, ses yeux remplis d'amour, sa robe sirène de tulle et de dentelle. Il n'y avait presque personne, vous ne vous étiez mariés que pour vous-même. Tu avais quitté pour elle ta terre natale, traversé le monde pour remplir ton air de sa présence, tu voulais qu'elle ne soit qu'à toi, et surtout empêcher quiconque d'occuper cette place. Qu'avais-tu écrit dans tes vœux ? Je te jure ma loyauté dans la vie comme la mort. Et tant d'autres mensonges. Tu n'as pas été un homme fidèle, d'ailleurs. Mais Phoebe était une addiction et tu ne parvenais pas à concevoir ce que demain serait, au pic le plus intense de ton sevrage.

    L'alliance rejoint le couteau dans ta poche, et sentant la détresse émanant de ces idées tu les fais taire d'un commandement royal, l'esprit momentanément trop silencieux. Ton regard s'éternise sur ses vêtements de nuit tant imbibés de sang qu'ils lui collaient à la peau, et tu vas par habitude les lui ôter comme à tant d'autres corps, encore que tu étais plus un habitué de la mécanique inverse. Mais sitôt que passe sous ton doigt la courbe de son sein, tu t'arrêtes, soudain un peu trop conscient que tu partages la pièce avec un autre homme. Qu'il allait devoir la voir, la toucher. Un nœud de colère se forme dans ton estomac, alors qu'un mouvement de tête part dans sa direction, sans oser atteindre son regard. Tu peines à dire les mots, mais tu les dis quand même, avec une autorité neuve que tu n'aurais pas pensé pouvoir dégager dans ton état. « Je m'occupe de cette étape-là. » De toute façon, il a déjà compris. Oh, tu savais très bien que ton caprice représenterait un peu de temps perdu et un manquement au protocole, mais il comprendrait bien. Car si tout comme toi il avait vu passer des corps nus par paquets de mille, cela ne vous était sans doute jamais arrivé d'en déshabiller avec le mari dans la pièce. En tout cas, pas quand le corps en question était un cadavre – les vivants, c'était encore autre chose. Et puis, n'avait-il pas du matériel à préparer ? Avait-il vraiment envie de se disputer avec toi maintenant ?
    La peau était encore si souple, si chaude sous la pression de tes doigts. Un bras, puis l'autre, le vêtement rejoint le chariot de tantôt – tu t'inquiéterais plus tard d'en détruire l'existence. Tes yeux s'arrêtent sur son ventre, la cause de tout cela. Un hématome gigantesque témoignait du fait que son visage n'avait pas été le premier à prendre – et l'on y devinait aussi le souvenir de coups d'autres jours, d'autres nuits. Avais-tu seulement une once de culpabilité en toi ? Si ta rage n'avait connu son paroxysme que ce soir, cela faisait déjà longtemps que votre couple avait pris une teinte plus sinistre. Tu n'aurais même pas su expliquer pourquoi, vraiment. Avec elle, tes sentiments prenaient des couleurs trop intenses, dans les meilleurs comme dans les pires aspects. Sa seule existence t'obsédait, te poussait à bout, et maintenant ? Maintenant ? C'était comme si tu n'avais plus eu autant de douceur et de tendresse pour elle que depuis qu'elle était morte. Ta main contre sa cuisse pour la déshabiller n'essayait même pas de lui lacérer la peau. Rien de tout cela n'avait de sens, pour toi, à cet instant. Quand tu lisais les lignes de son corps et que la moindre aspérité, tout ce qu'elle portait sur elle d'indélébile venait de toi. Même ce qui se lovait dans son ventre encore plat. Tu saisis sa main pâle et la porte à tes lèvres, rien qu'un instant, alors que revient derrière tes yeux Phoebe chancelante dans votre cuisine, presque timide, les yeux mouillés plein d'espoir, serrant dans ses mains le petit test en plastique. L'impact de la tasse que tu avais brisée, comme la peur avait pris son visage. Tu voulais qu'elle avorte, bien sûr. En vérité, même si elle avait accepté, tu n'aurais pas réussi à tenir jusque-là. Le simple fait que cette potentialité naisse dans ton esprit t'avait changé, avait enclenché quelque chose en toi dont tu n'avais pas mesuré l'ampleur. Tu ne le mesurais toujours pas, à quel point ça te brûlait de penser à ça. Reposant sa main dans un soupir résolu, tu tournes ton visage dans la direction d'Ari.
    « Dis-moi ce que je dois faire. »




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